Le nègre de personne, par Roland Brival (NRF, Gallimard))
Brival s'empare du nègre Damas
Damas a 29 ans, il est fringuant et il part plein de rêves et d'espoir aux Etats-Unis où il se prend des gifles à tous les coins de rue ! Le jeune Guyanais tombe amoureux d'une jeune femme qui lui ouvre des paysages intérieurs qu'il n'a jamais connus... Roland Brival publie chez NRF/Gallimard "Nègre de personne", une fiction inspirée de Léon Gontran Damas. "Ce titre, c'est juste un constat", s'amuse l'auteur... En réalité, c'est la phrase que prononce Damas lorsqu'il rencontre les intellectuels américains de Harlem avant la seconde guerre mondiale. On lui demande de se présenter et il lâche la sentence : "Je suis Damas, nègre de personne." Damas est le "nègre libre" ! Roland Brival confie que Damas n'a jamais fait ce voyage, "mais il résume sa dimension américaine et son intérêt pour la culture du continent nord-américain et notamment celle de Harlem..." N'empêche que ceux qui connaissent bien Damas pourront le reconnaître aisément ! C'est lors de ce voyage que le Guyanais apprend à mieux redéfinir le concept de négritude et à le discuter, l'éprouver.
Brival s'avoue dans ce roman plus damassien que césairien. "Quand la négritude a été dressée à un moment précis, elle était une arme de réaction dans des circonstances historiques précises. Ces circonstances ont évolué et la parole de Damas qui avait été un peu minorée revient au goût du jour et en phase avec notre monde. Damas correspond mieux aux aspirations de la jeunesse..." Brival fait du métissage le concept damassien par excellence, "plutôt que la négritude"... "Damas est un outil pour notre présent, poursuit l'auteur. Damas était un Rimbaud noir ; ce n'est pas quelqu'un qui était figé dans la forme ni dans la représentation sociale." Finalement Roland Brival qui cherche à réhabiliter la grandeur du poète guyanais se réjouit qu'on l'ait oublié, lui évitant ainsi une affreuse institutionnalisation. "Du coup, il est un électron libre et c'est en ça qu'il nous intéresse aujourd'hui."
FXG, à Paris