Roaming outre-mer
Pour avoir la 4G à Noël, les consommateurs s'assoiront sur le roaming !
Alors que le Sénat s'apprête à examiner le projet de loi "République numérique", un drôle de combat connexe se livre en coulisse. Il concerne une spécificité française et ultramarine, l'itinérance mobile dite encore "roaming". Spécialité française puisque l'Espagne n'a pas introduit ce service facturé entre les Canaries et le continent ; spécialité ultramarine, puisque c'est France Télécom qui a choisi, à l'origine, de séparer l'Hexagone de ses outre-mer...
En décembre 2015, la loi de modernisation du droit outre-mer a été promulguée. En son sein, un article issu d'un amendement du député PS Lurel qui propose de faire prendre de l'avance aux Outre-mer sur le règlement qui doit entrer en vigueur en 2017 au niveau européen : la fin du roaming entre les Etats européens. Cette disposition devait être appliquée entre l'Hexagone et les DOM au 1er janvier 2016, puis à la demande des opérateurs au 1er mai... Dans les faits les opérateurs n'ont aucune envie que s'applique la fin de l'itinérance.
Le 16 mars dernier, la secrétaire d'Etat au numérique, Axelle Lemaire, a réuni à Bercy les parlementaires d'Outre-mer, son cabinet numérique et le directeur général de l'ARCEP. Ce dernier a clairement affiché le point de vue de l'autorité indépendante qu'il représente, en disant aux parlementaires, en substance : "Si vous n'acceptez pas de revenir sur l'amendement Lurel, vous n'aurez pas la 4G à Noël !" L'ARCEP soutiendrait-elle les opérateurs contre les consommateurs ? Et Mme Lemaire ? Victorin Lurel la croit résolument aux mains des lobbys des grands opérateurs. Pour autant, le vrai problème ne vient pas des grands opérateurs comme Orange, mais plutôt des petits opérateurs ultramarins type Dauphin télécom ou Digicel qui craignent de perdre des positions commerciales avec la fin du roaming et le changement de modèle économique qu'il implique. "Ils vont passer du statut de fournisseur de marché de détail à celui de fournisseur de marché de gros", commente un proche du dossier. La perte annoncée serait de 5 centimes par appel... O comprend le manque à gagner même si rien ne dit que son coût réel est de 5 centimes...
C'est ainsi qu'Axelle Lemaire a proposé un amendement dans son projet de loi République numérique qui prévoyait de supprimer le roaming, mais pour une durée limitée de quinze jours. Il a vite été retiré sur pression des députés. Cette fois, les lobbystes ont soumis au sénateur LR Michel Magras une carence de soixante jours. On est encore loin des 365 jours sans roaming prévus par l'Europe... Nul doute que le Sénat adopte cet amendement le 3 mai prochain, mais il ne devrait guère survivre à la commission mixte paritaire Sénat-Assemblée nationale, laissant le dernier mot aux députés.
Au final, la loi devrait s'appliquer au 1er mai, sauf si les opérateurs décident d'entrer dans l'illégalité en attendant 2017...
Mais dans le fonds, nos parlementaires auraient peut-être du faire plus simple : oublier le roaming et imposer aux opérateurs de téléphonie mobile qui proposent des forfaits outre-mer inclus à 19,99 en métropole, qu'ils révisent à la baisse leurs forfaits outre-mer à 49,99 euros !
FXG, à Paris