Affaire Marie-Jeanne dépaysée à Paris
Me Boulogne Yang-Ting, Me Ursulet et le bâtonnier Charrière-Bournazel, le 9 septembre avenir Foch, Paris
Le dépaysement du procès Marie-Jeanne devant la CEDH
La Cour de cassation a ordonné mercredi le renvoi de l'affaire Marie-Jeanne devant le tribunal de Paris.
Ses avocats saisissent la Cour européenne des droits de l'Homme et s'insurgent contre un complot politique.
Au lendemain de la décision rendue par la Cour de cassation renvoyant le procès Marie-Jeanne pour prise illégale d'intérêt, qui aurait du avoir le 9 novembre à Fort-de-France, devant le tribunal correctionnel de Paris, la défense d'Alfred et Maguy Marie-Jeanne et de Mark Frampton a annoncé son intention de saisir la Cour européenne des droits de l'homme et dénoncé "une organisation politique de déstabilisation".
"Une condamnation de la France par la CEDH ne remettrait pas en cause la décision de dépaysement, mais, observe le bâtonnier Christian Charrière-Bournazel, si l'affaire n'est pas encore jugée au moment où la CEDH se prononce, je n'imagine pas que des juges français n'en tiennent compte au moment où ils auront à juger l'affaire."
Corinne Boulogne Yang-Ting, avocate de Maguy Marie-Jeanne, estime que cette délocalisation démontre une "fuite du parquet" et une "défiance" à l'égard du peuple, mais surtout des juges en Martinique : "Paris est un refuge où l'on attend ce qu'on sait qu'on n'aurait pas obtenu à Fort-de-France !"
Me Boulogne Yang Ting estime encore ce dépaysement "grotesque" : "Maguy Marie-Jeanne n'est que la fille de ce député, mais elle n'est pas du tout en politique et n'est en rien concernée par ce procès politique dans lequel elle a été embarquée."
Car sur le fond, la défense a établi un parallèle entre le calendrier procédural et les rendez-vous électoraux. "L'affaire, reprend Me Ursulet, a démarré au moment de la campagne régionale de 2010, par une dénonciation anonyme (affaire "green parrot", NDLR) ; Létchimy prend la Région à Marie-Jeanne. En 2012, après qu'Alfred Marie-Jeanne annonce son intention de se présenter dans une nouvelle circonscription législative, il est convoqué par les enquêteurs. Il en ressort sans avoir été placé en garde à vue, ni mis en examen. Ce n'est que juste avant les élections que le juge le reçoit et le met en examen. Non seulement AMJ est élu, mais son poulain Nilor garde sa circonscription au MIM."
Létchimy ministre en cas de victoire à la CTM ?
A la deuxième convocation chez le juge, la défense soulève et obtient de la chambre criminelle la nullité des mises en examen. Dix-huit mois plus tard, AMJ annonce sa candidature à la CTM. Aussitôt il est convoqué chez le juge qui le met en examen "avec les mêmes qualifications que celles qui ont été annulées". Contre toute attente, la liste d'AMJ, soutenue par la droite, bat celle de Létchimy. C'est ce "choc politique", explique Me Ursulet qui explique la demande de dépaysement : "Cela permet d'ouvrir une trêve qui laisse une épée de Damoclès au dessus de la tête du futur candidat AMJ, quand le risque n'est ni plus ni moins pour le gouvernement qu'un grand chelem pour le MIM aux législatives." Me Ursulet va plus loin quand il soutient que l'enjeu n'était autre pour Serge Létchimy que la succession de George Pau-Langevin à Oudinot, mais en cas de victoire à la CTM seulement. Si cette hypothèse appartient à la stratégie de la défense, il n'en reste pas moins vrai que Matignon avait bien songé à ce scénario. Pour le reste, il s'agira d'être attentif au moment où l'affaire Marie-Jeanne sera appelée devant une chambre correctionnelle à Paris.
FXG, à Paris