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Publié par fxg

"il a déjà tes yeux" - Lucien Jean-Baptiste conditionne son exploitation aux Antilles aux respects des règles du CNC

Lucien Jean-Baptiste remet en cause le système d'exploitation des films aux Antilles et en Guyane

"Si nous ne trouvons pas une solution, je m'engage à ce que les Antillais voient mon film gratuitement"

"Il a déjà tes yeux" sera-t-il projeté aux Antilles et en Guyane ?

Le film doit sortir aux Antilles et s'il sort, ça veut dire que les conditions auront été réunies. Martinique, Guadeloupe et Guyane sont trois départements français. Quand un film rentre en exploitation dans les départements français quels qu'ils soient, les patrons de salles partagent les recettes avec les distributeurs, 50-50. Sur ces sommes est reversée la taxe spéciale audiovisuelle (TSA) qui sert à financer le cinéma, tous les films. A ce jour aux Antilles, on applique une législation internationale, la vente à l'étranger. Pourquoi ? Avant, il n'y avait quasiment pas de salles de cinéma aux Antilles et on vendait les films à un prix forfaitaire ; l'exploitant n'avait aucune obligation légale de donner le nombre d'entrées. Il était dispensé d'avoir une "billetterie CNC" et faisait ce qu'il voulait. Depuis, des multiplex ont été construits et aujourd'hui les Antillais et les Guyanais sont des consommateurs de cinéma supérieurs à la moyenne nationale. Mais les exploitants antillais ont continué à acheter les films pour une poignée de pain sans divulguer leurs recettes. Ca veut dire que les entrées réalisées aux Antilles n'alimentent pas le fonds de soutien à la création, l'avance sur recettes...

De quelle manière êtes-vous impacté par ce système ?

Quand Dany Boon qui est Ch'ti fait un film, il sait qu'il va mieux marcher dans sa région natale. Quand je dis à un producteur que je veux faire un film antillais, il se demande ce que lui rapportent les Antilles. Un forfait, un forfait ridicule... Donc, ils n'ont rien à faire sur ces territoires. Si simplement la loi française s'appliquait aux Antilles et en Guyane, les producteurs seraient ravis de faire des films antillais et ça donnerait l'opportunité à de jeunes réalisateurs de l'outre-mer de présenter des projets à des producteurs qui auraient déjà une garantie de faire des entrées en outre-mer.

L'enjeu, c'est de créer une filière de création antillaise, guyanaise ?

Marcel Pagnol a réussi à créer un cinéma marseillais qui devienne universel ! C'est mon rêve aussi ! Mais si je veux faire un tel cinéma, si les Antillais me suivent et que les entrées ne sont pas comptabilisées, aucun producteur ne me suivra ! C'est à cause d'un tel système que nos réalisateurs Euzhan Palcy, Guy Deslauriers n'ont pu avoir la carrière qu'ils méritaient !

Pourtant depuis janvier 2016, la loi impose aux exploitants de salle dans les DOM d'appliquer la TSA...

Pour avoir une billetterie CNC, il faut juste acheter un logiciel. Le groupe Elisé a déclaré qu'il n'avait pas pu se procurer ce logiciel... Aujourd'hui, je suis incapable de vous dire combien j'ai fait d'entrées avec tous mes films. "La première étoile" a fait 2 millions d'entrées en France et a été vendue 25 000 euros", "30° couleur" qui a fait 140 000 entrées, 80 000 euros et "Dieu merci", 135 000 entrées, 30 000 euros. Il est hors de question qu'avec "Il a déjà tes yeux", je ne sache rien une fois de plus ! Je veux que les spectateurs antillais comptent en France ! L'argent que nous mettons dans le ticket de cinéma doit compter ! Si aujourd'hui, certains disent qu'il y a trop de Noirs dont des Antillais dans le football, j'aimerais que demain on puisse dire qu'il y a trop d'acteurs antillais ! Mais ça passe par l'application de la TSA.

Alors projection ou pas ?

Au moment où je vous parle, je ne sais pas. C'est un bras de fer... La négociation est en cours. Le CNC, les ministères de la Culture et des Outre-mer sont montés au créneau. Mes producteurs ont mis 5 millions sur mon film et ils veulent connaître les remontées réelles aux Antilles. Si nous n'arrivons pas à trouver une solution, je me débrouillerai pour que les Martiniquais, les Guadeloupéens et les Guyanais voient mon film gratuitement ! Je m'y engage.

propos recueillis par FXG, à Paris

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