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Publié par fxg

Larry Benzakem, humoriste littéraire

Larry Benzaken, 28 ans, humoriste français aux origines guadeloupéennes et ivoiriennes, était l'invité du Martinique Comedy club du 6 au 12 mars où il donnait son spectacle seul en scène, Journal d'une banalité extraordinaire. Interview.

"Je cherche un rire plus intérieur, plus concerné"

Après un spectacle d'humour noir, vous revenez avec un spectacle que vous qualifiez d'humour littéraire. Qu'est-ce que c'est ?

L'univers du spectacle c'est beaucoup de jeux de mots, de poésie, avec des parties en alexandrins... C'est un spectacle qui met en scène un jeune écrivain qui raconte d'où lui viennent ses inspirations et ses difficultés pour écrire dans un monde enclavé dans la téléréalité et la culture de masse. Mon inspiration littéraire, c'est Charles Bukowski et mon titre fait référence à son Journal d'un vieux dégueulasse où il raconte ses pérégrinations, ses aventures, tout ce qui se passait quand il était assis à la terrasse d'un café. C'est dans cette lignée là que je m'inscris. Après, dans les jeux de mots, je vais être plus près du slam et du hip hop, dans l'idée de la punchline. Je suis proche de cela que de certains auteurs comme Raymond Devos qui a pratiqué aussi le jeu de mots.

Comment avez-vous écrit ce spectacle ?

Je pratique un jeu auquel beaucoup de personnes s'adonnent quand on s'imagine la vie, le métier des gens qu'on croise dans la rue, dans les transports en fonction de ses vêtements. Dans mon spectacle, je croise des personnages et je m'amuse à fantasmer leur vie en tant qu'écrivain...

Quels archétypes de personnages avez-vous choisi de fantasmer ?

A priori, ce sont des personnes banales et à travers mon prisme, elles changent de statut et passent de n'importe qui à héros d'un roman. Je pense d'une lanière générale que toutes les vies pourraient bâtir un excellent roman. Tout dépend de l'écrivain qui s'en empare !

Et comment trouvez-vous les ressorts humoristiques ?

En racontant la vie quotidienne des personnages que je vais croiser, le spectateur va pouvoir se reconnaître dans une série de détails dans les portraits que je dresse. Le ressort comique se crée à partir de là. On ne va pas avoir des rires chronométrés toutes les 5 secondes comme dans les one man show, mais des rires plus discrets, éparpillés dans le public au gré des détails et éléments du récit. C'est ce rire que je cherche, un rire plus intérieur et peut-être plus concerné.

Comment êtes-vous tombé dans l'écriture ?

Quand j'avais 13 ans, j'ai vu la pièce de théâtre, Antigone, de Jean Anouilh, et j'ai commencé à écrire des pièces. J'ai forgé mon écriture par ce biais et je suis arrivé à l'humour très tard. L'humour n'était pas mon premier moteur et je n'ai pas une grosse connaissance des humoristes américains actuels. L'humour, je l'ai découvert dans des livres comme chez Marcel Proust, un humour plus discret... Je trouve que l'humour qui n'est pas recherché est plus intéressant...

Quand on vous voit sur scène, on pourrait penser à Devos...

C'est souvent l'idée qui vient aux gens qui me découvrent. Mais c'est un artiste que j'ai découvert vers 20 ans et j'écrivais déjà depuis longtemps. Ce n'est pas Devos qui m'a lancé vers ce style d'écriture. Serge Gainsbourg, en revanche, m'a énormément marqué avec son humour fin qu'on appelle de l'humour anglais... Quand on lui a demandé pourquoi il était passé par l'étape yéyé, il a répondu qu'il avait retourné sa veste lorsqu'il s'est rendu compte que la doublure était en nylon... C'est ce genre d'humour fin que j'apprécie.

Et qu'est-ce que votre créolité vous a apporté dans votre travail d'auteur ?

Quand j'étais enfant, j'allais très souvent aux Antilles et j'allais avec ma mère et ma grand-mère écouter les conteurs. Yé Krik, yé krak ! Yé mistikri, yé mistikrak... Cette manière de transmettre une histoire, des émotions par l'oralité m'a beaucoup marqué.

Avez-vous connu les affres de la création ?

Oh oui ! Dans un premier temps, j'écrivais tout et n'importe quoi. Et les affres que j'ai connues, c'était plutôt : est-ce que ce que j'écris est intéressant ? Et j'ai lu des écrivains qui refusaient cette crainte. Le seul remède à ces affres qui peuvent tout pourrir, c'est écrire, écrire, écrire... L'écriture, c'est un travail d'artisan. J'ai visite l maison de Zola et sur la cheminée, il avait gravé : "pas un jour sans une ligne." Je me suis efforcé d'en faire autant et comme j'ai toujours été fasciné par les précoces comme Arthur Rimbaud, Mickaël Jackson, Mozart, je m'y suis mis très tôt parce qu'à 13 ans, je pensais que j'étais déjà à la ramasse !

Vous vous êtes rattrapé...

Depuis une douzaine d'années, j'écris une pièce par an !

Propos recueillis par FXG, à Paris

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