Affaire de discrimination au ministère du Travail
Le blâme d'Henriette Henry dépend de Myriam El Khomry
La commission disciplinaire qui s'est réuni jeudi 20 avril après-midi à la direction des ressources humaines du ministère du Travail a finalement donné un avis pour un blâme dans le dossier qui oppose la contrôleuse du travail, Henriette Henry, et sa hiérarchie à la DIECCTE de Guyane.
"Nous exigeons toujours l'abandon de tout projet de sanction", martèle Thomas Dessalles de la CGT-TEFP. Reçue en compagnie de son avocat et de deux représentantes syndicales, Henriette Henry a passé quelque trois heures au ministère des Affaires sociales avant que ne tombe cet avis. Une mobilisation à l'appel de l'UTG devait avoir lieu au même moment au siège de la DIECCTE en Guyane, mais ses locaux ont été fermés, officiellement en raison des barrages...
On jugeait donc jeudi Henriette pour "avoir tenu des propos discriminatoires, porté atteinte à la dignité de ses fonctions, violé son devoir de réserve, son obligation de neutralité et son obligation déontologique de dignité", à la suite d’une altercation avec une collègue. Celle-ci, la vieille, avait adressé à Henriette un courriel extrêmement agressif se terminant par « t’es pas foutue de réussir le grade d’inspecteur, reste à ta place ». Entendant de la part de cette même collègue des propos se terminant par « négresse », Henriette, victime depuis des années d’agissement discriminatoires (propos vexatoires, courriels humiliants, placardisation) en raison notamment de ses engagements syndicaux, lui a alors rappelé qu'elle était « chez elle » en Guyane, avant d'éclater en sanglots. Pour la CGT, le dossier est vide, c'est une réaction de dignité contre l'insulte. "Il y a des problèmes structurels au-delà de ce dossier", explique Thomas Dessalles. Il rappelle le rapport Lorti de juillet dernier qui épingle le ministère du Travail au niveau des concours, mais surtout le rapport de la mission menée par l'IGAS en 2014 à la DIECCTE de Guyane qui pointait déjà le cas d'Henriette Henry. Ce rapport est désormais aux mains des syndicats...
Pas de rétrogradation
"La procédure elle-même est discriminatoire", regrette Thomas Dessalles. "C'est la victime qui est mise en cause et c'est cela qui choque", complète un collègue venu en soutien. Le syndicat n'explique l'attitude de la hiérarchie que par une volonté de "rester dans le huis-clos" : "C'est le ministère du Travail qui donne des leçons aux employeurs, comme il l'a fait en piégeant Accor et Courte-Paille en réalisant des testings, alors il faut qu'il soit exemplaire, d'où sa réaction de déni devant le cas d'Henriette." Farida, une collègue d'Henriette témoigne de ce que c'est que d'appartenir à une minorité visible dans cette administration : "Tant qu'on n'est qu'un agent de catégorie C, tout va bien, mais si l'on parvient à devenir agent de catégorie B, on devient la lie de la fonction publique."
La commission disciplinaire avait fait savoir avant la réunion qu'il n'y aurait pas de retrogradation ni de suspension, mais la défense d'Henriette refuse le blâme. Du reste, cet avis n'est que consultatif car il revient au final à la ministre du Travail, Myriam El Khomri, de trancher et clore le dossier, vite, avant qu'elle ne quitte son ministère.
FXG, à Paris
Le point de vue de l'administration
Le ministère du Travail, de l’Emploi, de la Formation professionnelle et du Dialogue social a fait savoir que suite à la réunion de la commission disciplinaire qui s'est réunie jeudi 20 avril, il a décidé de prendre une sanction à l’encontre non pas d'un, mais de deux de ses agents de la DIECCTE de Guyane pour ces faits remontant au mois d'octobre dernier. Il s'agit de l'inspectrice du travail stagiaire, Henriette Henry comme indiqué plus haut, mais également de sa collègue inspectrice du travail avec qui elle était en conflit.
L'administration estime que "le caractère raciste de l’agression verbale qu’aurait subie (Mme Henry) n’a pu être attesté par aucun témoignage ni aucune preuve." Elle estime en revanche que le comportement des deux agents est "fautif et ne peut demeurer sans suite". L'administration a donc accédé à la demande du directeur de la DIECCTE avec "un avis positif à la majorité des voix de la commission disciplinaire comprenant à parité l’administration et des représentants du personnel du ministère".