500 kilos de shit en rip off
Deux Martiniquais victimes d'une opération d'infiltration foireuse
Incarcéré pendant neuf mois pour trafic de drogue, un couple de commerçants martiniquais a été victime de la technique du rip off, c'est-à-dire d'une opération d'infiltration.
Rod S et son associée, Olivia B, commerçante à Sainte-Marie, ont été libérés le 27 septembre de la prison de Lille où ils étaient détenus depuis neuf mois. Leurs avocats, dont Me Ursulet, ont convaincu le juge des libertés et de la détention (JLD) contre l'avis du parquet et celui du juge d'instruction. Mis en examen en février 2017 pour trafic de stupéfiants et association de malfaiteurs, Rod et Olivia n'ont cessé de clamer leur innocence. Pour leur défense, ils ont été victimes de la technique dite du « rip off », technique qui consiste à dissimuler des marchandises de fraude dans un flux commercial à l’insu de l’expéditeur et du destinataire durant l’une des phases de transport.
Lors de l'audience du 22 septembre, la défense a convaincu le JLD que de nombreux éléments du dossier accréditaient la thèse d'une opération d'infiltration ayant piteusement échoué, mais ayant abouti du fait de flottements entre les douanes et l'OCRTIS à l'incarcération de deux innocents !
Tout commence le 26 juillet 2016 à Rouen par un contrôle du container de vêtements destinées à être vendus dans le magasin d'Olivia à Sainte-Marie. A l'issue de ce contrôle, les douaniers délivrent un avis de contrôle conforme. Les gabelous reviennent le 29 juillet parce qu'ils affirment avoir constaté lors de leur première visite la présence de tee shirts Armani en vrac, d'un moteur usagé et de cartons non-étiquetés ne figurant pas sur le bordereau d'exportation. Pourtant, ce n'est que ce 29 juillet qu'ils disent avoir brisé les scellés commerciaux et qu'ils découvrent des cartons non étiquetés qui recèlent plus de 500 kilos de haschish !
Trop d'incohérences
A partir de là, la procédure est parsemée de tant d'incohérences que le JLD n'a pas hésité à remettre en liberté les deux dangereux trafiquants martiniquais.
La technique du « rip off » suppose que des individus aient infiltré ou soudoyés des agents participant à l’organisation du transport, afin d’avoir accès au conteneur après l’expéditeur et avant le destinataire. Or, c'est un salarié de son transitaire qui, chose tout à fait surprenante, a demandé à Rod de bien vouloir transporter le vieux moteur pour l’une de ses connaissances...
Rob et Olivia ont rempli eux-mêmes leur container et confié à un transporteur son acheminement au port. Le chauffeur à qui ils ont laissé le chargement n'est pas celui qui a signé le bon de livraison à Rouen, et il s'avère qu'il n'a même pas son permis. Ce même chauffeur s'était étonné du faible volume utilisé dans le container ; à l'arrivée, la lettre de voiture fait etat d'un chargement de 2 tonnes... Le trajet qui dure normalement une heure trente, a duré trois heures trente... Par ailleurs, les douaniers ont constaté la présence inhabituelle d'un cadenas en plus du plomb commercial pour fermer le container. Rod et Olivia ont pourtant vu leur chauffeur poser un plomb, pas un cadenas...
Enfin, alors que la découverte du cannabis remonte à la fin juillet, la police a attendu six mois pour entendre Rod. Ce dernier a anticipé son retour de Miami pour s'expliquer et s'est fait arrêter en sortant de l'avion, à l'aéroport Aimé-Césaire...
La défense pensait devoir attendre le 6 octobre pour faire libérer Rod et Olivia à l'occasion d'une audience consacrée aux nullités de la procédure. Une simple demande de mise en liberté aura suffi. Quant à l'audience du 6 octobre, elle a été reportée sine die...
FXG, à Paris