Di Falco au bal de la rue Blomet
Fabrice di Falco, contre-ténor, présentera lors de deux soirées au célèbre bal parisien de la rue Blomet, un concert classique le 3 novembre, un concert jazz le 7 décembre, avant de venir à l'Atrium et à l'Artchipel en 2018. Interview.
"Je veux partager la scène du bal nègre"
Pourquoi ce concert classique au Bal de la rue Blomet, temple du jazz ?
J'ai voulu faire ce concert classique au bal nègre, parce que la musique classique et l'opéra étaient la musique du peuple ! Et le bal nègre était en son temps le bal du peuple ! Faire de l'opéra dans un endroit où le peuple a sa place, ça me plaît !
Vous privilégiez la musique religieuse, pourquoi ?
Parce que l'opéra est né avec la musique classique religieuse. Vivaldi, le prêtre roux, a écrit le "Stabat mater" pour contre-ténor et ensemble baroque. Pergolese a écrit le "Salve regina" avant de mourir à 26 ans de la tuberculose. C'est un hommage aux castrats à la chapelle Sixtine...
Avant qu'ils ne viennent à l'opéra ?
Les castrats ont vu qu'ils ne gagnaient pas d'argent avec l'église, ils sont allés chanter la musique de Haendel, à l'opéra, là où on leur proposait de vrais cachets ! Ils sont d'ailleurs vite devenus les divas. Ma deuxième partie, ce sont les divas de l'opéra baroque au bal nègre ! Je suis accompagné de l'ensemble baroque Sine qua non de Julien Leleu avec lequel je vais réenregistrer l'année prochaine mon album "Les Sauvages", mais cette fois en classique...
Vous revenez au bal de la rue Blomet le 7 décembre, avec quel répertoire ?
Je vais reprendre exactement le même programme baroque mais en version jazz avec le Di Falco quartet, celui avec lequel j'ai enregistré pour Sony "Les sauvages" en version jazz.
Vous partez ensuite en tournée avec le chanteur Raphaël, racontez-nous cette rencontre...
L'an dernier Raphaël et Gaëtan Roussel m'ont demandé d'enregistrer avec eux un titre, "Quel genre d'ami ferait ça", parce qu'il voulait faire un clin d'oeil à Klaus Nomi un peu comme l'avaient fait Freddy Mercury et Montserrat Caballe. Depuis la sortie de son album, qui s'appelle "Anticyclone", notre titre fait un joli succès, et la production de Raphaël m'a proposé de faire la fin de sa tournée et celle de l'an prochain...
Et les Antilles, c'est pour bientôt ?
Je devrai venir en 2018 présenter aussi bien l'ensemble baroque "Les Sauvages" et le "Di Falco quartet" en jazz parce que le public martiniquais m'a créé, m'a carrément conçu ! Ma mère est martiniquaise et j'ai grandi au lycée de Bellevue. Gisèle Aubéry a été mon professeur de musique ! Chaque année, grâce à Gislaine Bellance, je retourne à mon lycée, mais également dans les écoles et collèges de Guadeloupe et Martinique donner des masterclass de chant pour amener l'opéra jusqu'à eux et trouver de nouveaux talents. J'ai envie de susciter des vocations et de ramener en métropole certains contre-ténors ou sopranistes.
Vous voulez les présenter lors de la résidence que vous ferez au bal de la rue Blomet l'an prochain ?
Je présenterai des concerts classiques et de jazz, mais je ne serai pas toujours en scène. Je mettrai des musiciens et des chanteurs en valeur, certains de mes élèves mais également pas que les miens. On m'a beaucoup aidé il y a vingt ans, maintenant que j'ai 43 ans, il me revient d'aider la nouvelle génération et je veux lui faire partager la scène du bal nègre !
Vous n'avez cessé de parler du bal nègre, mais son nom est le bal Blomet...
Je trouverai extraordinaire que le bal Blomet redevienne le bal nègre car "nègre" n'est pas une insulte, c'est même le grand hommage que l'on doit à la négritude ! Aimé Césaire s'est battu pour la négritude ! Jean Genêt a écrit "Les Nègres", Michaël Levinas a écrit l'opéra "Les nègres" et ça n'a posé aucun problème. On a appelé le Chevalier de Saint-George, le nègre des lumières... Alors moi, quand je joue au bal Blomet, je dis que je joue au bal nègre !
Propos recueillis par FXG, à Paris