Macron au Panthéon
Le chef de l'Etat commémore l'abolition de l'esclavage
Emmanuel Macron a confirmé la création de la fondation pour la mémoire de l'esclavage qui siègera à l'hôtel de la Marine, le mur des noms au tuilerie et le renforcement du MACTe.
Emmanuel Macron ne s'est pas exprimé au Panthéon, vendredi après-midi lors de la cérémonie qu'il a présidée pour commémorer l'abolition de l'esclavage 170 jour pour jour après le 27 avril 1848, mais il a adressé quelques mots à la presse à l'issue pour commenter la tribune qu'il a publié dès vendredi matin pour "clarifier plusieurs annonces et passer aux actes, à la fois sur la mise en place de la fondation, qui était très attendue et une nécessité". La fondation pour la mémoire de l'esclavage annoncée l'an dernier par François Hollande et dont le groupement d'intérêt public présidé par l'ancien Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, est en charge de la préfiguration, s'installera donc à l'hôtel de la Marine, place de la Concorde. "Ca va permettre, a ajouté le président de la République, de consolider tout ce travail sur la mémoire." Il a encore confirmé la création du mur des noms qui trouvera sa place au jardin des Tuileries. "C'est une manière de montrer, a-t-il encore déclaré, qu'il y a des vies, il y a des biographies, des personnes derrière cette réalité, ces chiffres et ces notions... Et les faire vivre ainsi dans ces lieux en miroir que sont l'hôtel de la marine et les Tuileries, lieux où Schoelcher a réussi à faire passer cette décision, a beaucoup de sens." Enfin, le président de la République a confirmé "la consolidation du Mémorial ACTe, un grand musée de l'esclavage qui a été ouvert en 2016, un lieu qui est exemplaire et absolument sublime qu'il m'a été donné de voir". Le chef de l'Etat souhaite que l'on puisse mettre en réseau toutes les archives et tous les différents lieux qu'il y a sur le territoire national et qui touchent à cette histoire. "Je veux qu'on puisse accompagner le rayonnement du Mémorial ACTe, à la fois dans toute la zone caribéenne, mais aussi avec les Amériques, l'Afrique et tout ce qui constitue la mémoire de l'esclavage sur le plan international."
FXG, à Paris
"Cette histoire n'est pas périphérique"
Emmanuel Macron a été accueilli par trois élèves du collège Galilée d'Evry et le président du centre des monuments historiques, Philippe Bellaval.
Devant le monument de la Convention où 111 enfants (élèves, collégiens et lycéens qui ont tous participé au concours de la Flamme de l'égalité) attendaient Emmanuel Macron. La comédienne Sourya Adèle a lu un témoignage de l'esclave Lucille, puis un collégien a lu le décret d'abolition avant qu'un autre comédien, Christian Julien lise un texte de Gaston Monnerville.
Emmanuel Macron s'est ensuite rendu dans la crypte, accompagné de Frédéric Régent. Première halte devant les tombeaux de Condorcet et l'abbé Grégoire, puis devant les plaques commémoratives de Toussaint Louverture et Louis Delgrès. Ils se sont ensuite rendus devant le caveau de Victor Schoelcher où le président a déposé une fleur. Frédéric Régent l'a rejoint et évoqué Félix Eboué. Le président d'est ensuite arrêté devant la plaque dédiée à Aimé Césaire et Jacques Martial a dit un extrait du "Cahier du retour au pays natal" qui a "bouleversé" le président de son propre aveu : "C'est un texte d'une violence, d'une humanité et d'une douceur extraordinaire... Le flow du texte le montre et ça rend formidablement compte de ce qu'est la complexité de cette histoire." Le président estime que la réconciliation des mémoires, c'est "ne jamais les négliger en voulant cacher la vérité, mais sans rester dans une culpabilité irréparable... Il y a cette violence et cette humanité douce, c'est ça une nation."
"Une histoire très française de ce rapport à l'esclavage"
Le président a expliqué aux enfants présents qu'il y avait de grands héros de l'émancipation et des droits humains, "en particulier ceux qui ont lutté contre l'esclavage dont tout ceux que nous venons de parcourir. Et je pense que montrer cette chronologie, montrer que dans ce lieu, on a aussi cette histoire là qui regarde la vérité en face, notre passé avec ses pages sombres, mais aussi avec des actes de Françaises et de Français qui ont voulu cette émancipation... Il y a une histoire très française de ce rapport à l'esclavage avec ses pardons, sa part de culpabilité, mais aussi avec des Françaises et des Français qui ont voulu tourner cette page..." Le président a eu encore un mot pour "les Noirs, françaises et français, qui ont endossé cette histoire très différemment de ce qu'on a connu dans les sociétés anglo-saxones". Emmanuel Macron a fait une référence aux Etats-Unis où il était en déplacement officiel il y a quelques jours et où la ségrégation était encore en vigueur il y a quelques décennies. "Ce n'était pas le cas en France", s'est-il réjoui. Emmanuel Macron a voulu par cette cérémonie nouvelle dans son genre (le chef de l'Etat ne sera pas au Luxembourg le 10 mai prochain, où seul sera le Premier ministre, puisqu'il sera à l'étranger pour recevoir le prix Charlemagne) que "les gens se remémorent ce qu'a été l'histoire française avec toute sa complexité, tous ses aspects". C'était d'autant plus important dans ce lieu qu'il a qualifié de "temple de la reconnaissance de la nation" : "Cette histoire-là n'est pas périphérique", a-t-il conclu.
Le décret d'abolition de l'esclavage dans les colonies fut signé à l'hôtel de la marine le 27 avril 1848 par les membres du gouvernement provisoire de la 2e République avant d'être mis en application le 22 mai en Martinique, le 27 mai à la Guadeloupe, le 10 juin en Guyane et le 20 décembre à la Réunion.
Pas de foule et des personnalités
La cérémonie en elle-même a été d'une grande sobriété et presque intime. D'abord, dès 14 heures, les forces de l'ordre avaient fait dégager la foule de la place du Panthéon. A l'intérieur, mis à part quelques personnalités invitées parmi lesquelles le président de la délégation outre-mer de l'Assemblée nationale, le Guadeloupéen Olivier Serva, le président de la délégation outre-mer du Sénat, Michel Magras, l'ancienne ministre Christiane Taubira, le président de la fondation, Jean-Marc Ayrault, l'ancien premier ministre du Bénin et auteur du premier rapport sur la fondation, Lionel Zinsou, le conseiller Outre-mer du président Stanislas Cazelles, le président du Comité national pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage, Frédéric Régent, la ministre des Outre-mer, Annick Girardin, et encore le doyen de l'université Cheikh Anta Diop, Brahima Thioub.