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Publié par fxg

Les députés ultramarins unis contre le projet de loi de finances 2019

Entre l'examen du PLF et celui du PLFSS, les parlementaires essaient de décrypter les trompe-l'oeil qui pourraient bien avoir pour conséquence une perte du pouvoir d'achat en outre-mer et une hausse du coût du travail.

La semaine du 17 octobre, les députés ont examiné le projet de loi de finances 2019 (PLF). "Jamais un PLF n'a eu autant d'impact sur le budget de la mission Outre-mer", observe le Réunionnais LR David Lorion. Et alors qu'habituellement, les députés d'Outre-mer ne montent au créneau que lors de l'examen du budget de la mission outre-mer, ils sont tous sur le pont depuis le début de l'examen du PLF.

Fin septembre, Annick Girardin a annoncé son budget en hausse de plus de 20 %, et  tous les parlementaires, que ce soit le Guyanais Gabriel Serville (GDR), l'ancienne ministre PS Ericka Bareigts ou les députés Nouvelle gauche de Martinique et de Guadeloupe, sont tous mécontents et dénoncent un budget en trompe-l'oeil. Les huit premiers articles du PLF détaillent en effet les transferts qui ont permis cette très significative augmentation de l'enveloppe du ministère des Outre-mer, de 2,18 milliards en 2018 à 2,439 milliards en 2019. "Cette hausse est financée par des fonds ultramarins avec un nouveau logiciel, analyse David Lorion, qui fait que l'Outre-mer n'est plus financé par la solidarité nationale ! On prend dans la poche des familles et des entreprises ultramarines pour redistribuer aux plus pauvres." Ainsi, les ménages les plus riches, comme les collectivités les plus riches (Réunion, Martinique et Guadeloupe), alimentent les ménages et les collectivités les plus pauvres (Mayotte et Guyane)...

L'oeuvre de Bercy

Cette semaine, pendant l'examen des dix premiers articles du PLF, nos députés, sur tous les bancs, vont défendre une série d'amendements visant à contrer l'orientation nouvelle prise par le gouvernement en matière de budget.

Mais comme une difficulté ne vient jamais seule, les députés sont confrontés dans le même temps à l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui intéresse au premier chef  l'Outre-mer avec la suppression du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) et son report dans des allègements de charge. Là encore, les députés constatent une perte de 7 à 12 %, soit un renchérissement du coût du travail d'autant pour les employeurs. Alors qu'avant, les exonérations concernaient les salaires allant jusqu'à 4 SMIC, elles sont désormais limitées à 2,4 SMIC...

Tout ça laisse dire à nos parlementaires  de droite comme de gauche que ce n'est pas la ministre des Outre-mer, mais Bercy qui a la main sur ce budget. Il ne s'agit plus de la seule mission Outre-mer (qui sera examinée le 31 octobre), mais du PLF dans son ensemble, et celui-ci est bien l'oeuvre de Bercy. Ce qui fait dire au député Lorion alors qu'Annick Girardin vient d'être reconduite : "C'est une femme courageuse, mais sans moyen ni pouvoir."

FXG, à Paris

Impôt à la source

La bataille a démarré avec l'article 3 qui prévoit avec la perception de l'impôt à la source de défalquer 60 % des investissements défiscalisés, à l'exception regrettable des investissements outre-mer qu'il s'agisse du logement social ou de l'investissement productif... Résultat, les citoyens qui défiscaliseront en investissant en outre-mer n'en sentiraient pas les effets avant deux ans ! Le risque, déjà souligné par la FEDOM, est l'assèchement de la collecte alors que le gouvernement se targue d'avoir prolongé le dispositif jusqu'en 2025...

Abattement fiscal

L'article 4 a déjà fait l'objet d'une âpre bataille en commission qui n'a rien pu modifier. Cet article 4, c'est l'abattement sur le montant de l'impôt de 30 % (Réunion, Guadeloupe et Martinique) et 40 % (Guyane, Mayotte)... Les nouveaux plafonnements à 2450 euros (contre 5100) et 4050 euros (contre 6700) vont avoir, a expliqué la ministre, un impact sur 4 % des foyers les plus riches tout en rapportant 70 millions au budget de l'Outre-mer. "Argument statistique", balayent les députés qui, sur ce point, sont tous résolument opposés à cet article ! Dans les faits, un couple avec un enfant déclarant 50 000 euros de revenus ou un couple sans enfant déclarant 35 000 euros sera concerné par cette réforme. Là encore, la Réunion et les départements des Antilles seront les plus concernés. La question ne se pose pas à Saint-Pierre et Miquelon qui a un statut d'autonomie fiscale...

TVA NPR

L'article 5 consacre la fin de la TVA non perçue récupérable. C'est une aide à l'investissement qui permet à une entreprise d'économiser 10 % de son  investissement. L'Etat récupère ainsi 100 millions dont il réaffecte 40 dans le fonds exceptionnel d'investissement, 23 dans les contrats de convergence (tandis que 23 millions disparaissent dans le chapitre aide aux collectivités de la mission outre-mer), 15 dans le fonds vert (rétabli par les députés contre l'avis de la ministre malgré l'absence de financement...)... Pour les députés, l'exercice de l'amendement sur cet article est difficile car sa suppression implique de fait la destruction du budget de l'Outre-mer tel qu'il a été bâti... Certains proposent une fin progressive de la TVA NPR ou de retarder la mesure d'un an le temps de mettre un cadre d'accompagnement socio-économique...

Zones franches

L'article 6 supprime toutes les zones franches pour créer la zone franche d'activité nouvelle génération (ZFANG). Les entreprises qui s'y trouvent bénéficient d'un régime d'exonération fiscale majoré, mais, les industries en sont exclues... Un  oubli sans doute !

Taxes sur les ordures et les activités polluantes

L'article 7 laisse les coudées franches aux collectivités locales pour augmenter significativement et sans limite la partie frais de gestion de la taxe de traitement des ordures ménagère. Actuellement cette part prélevée par l'Etat est de 8 % et atteint 550 millions. En permettant aux collectivités d'augmenter cette part, l'Etat leur permet de rééquilibrer leurs comptes dans la mesure où dans son article 8 du PLF, l'Etat choisit d'augmenter du simple au double, voire au quadruple, la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP). Cet article 8 est problématique en outre-mer car il n'existe pas, pour des raisons structurelles et d'échelle, de filière de recyclage des déchets... C'est ce qui s'appelle faire payer au contribuable la transition écologique.

Accession logement

Depuis un an, l'accession sociale a pris fin en outre-mer, une décision de Julien de Normandie qui a laissé un buisson dans le pied de la ministre des Outre-mer. Or, la loi de simplification administrative de juin dernier a accouché d'un décret permettant de déplafonner les aides par subvention et la ligne budgétaire unique. Pour l'heure, on ne s'en sert que pour l'amélioration de l'habitat et non pour l'accession sociale alors que c'est normalement possible. Au lieu de quoi, la LBU est gelée quand ses crédits ne sont tout simplement pas rayés d'un trait de plume.

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