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Publié par fxg

Un rhum averti en vaut deux, chez Larousse

Christian de Montaguère et Jerry Gitany, auteurs de "Un rhum averti en vaut deux", qui sort  chez Larousse le 17 octobre, reçoivent France-Antilles dans la boutique qu'ils exploitent rue de l'Abbé-Grégoire à Paris, une enseigne qui dispose de 1200 références en matière de rhum. Le grand-père de Jerry était le directeur de la distillerie Saint-James, quant à Christian, il a vécu près de 20 ans à quelques encâblures de la distillerie Bologne. Entretien avec deux amateurs passionnés.

"Le rhum est en train de rattraper son retard !"

Comment avez-vous eu l'idée de ce livre ?

Jerry Gitany : En fait, c'est un éditeur qui est passé à la boutique qui nous a fait la demande...

Christian de Montaguère : On n'a pas pu dire non ! Le hasard a bien fait les choses puisqu'on avait ça en tête depuis un moment. Ils avaient une idée qui correspondait pile poil à notre approche...

Quelle a été la demande de Larousse ?

Jerry : Ils sont venus parce que la boutique existe et que ça leur a donné envie de faire quelque chose avec nous. On leur a dit : "Nous voulons bien parler du rhum mais comme on l'aime et comme on aime le partager !"

Christian : Le rhum est un produit né pour le partage et la convivialité, tel qu'on le vit quand on est aux Antilles. C'est ce qu'on a essayé de retranscrire.

Quelle a été votre approche ?

Jerry : Nous avons d'abord voulu mettre en avant les rhums agricoles et les rhums de chez nous, mais bien sur parler aussi de tout ce qui se fait comme rhum à travers le monde. Il y a des marques qui ont permis au consommateur français d'accéder au rhum... Mais on ne s'est pas limité au rhum puisqu'on a fait des thématiques accords mets-rhum, chocolat-rhum, cigare-rhum...

Christian : On a voulu parler de la manière de cuisiner au rhum, on y a mis des recettes personnelles, recettes de cuisine comme de cocktails ou de punch aux fruits...

Comment se présente l'ouvrage ?

Jerry : Il y a un petit résumé historique de la canne au rhum, sur la technique de fabrication, de fermentation, de distillation, de maturation, de vieillissement et puis, nous avons fait 200 fiches descriptives de rhum.

Que vais-je trouver à l'occurrence Bally par exemple ?

Jerry : On a présenté certaines cuvées, un historique rapide de la distillerie, l'histoire de Jacques Bally et puis on présente deux ou trois rhums de la marque...

Comment avez-vous sélectionné ces rhums ?

Christian : Des valeurs sûres, des rhums dont tout le monde a entendu ou devrait avoir entendu parler ! A quoi, nous avons ajouté les rhums qui sont aujourd'hui incontournables, pas forcément ceux que nous consommons nous au quotidien, mais des rhums qui sont connus, et encore les rhums que nous aimons bien ! Il y a plusieurs entrées dans ce livre !

Jerry : Dans chaque fiche descriptive, on décrit le rhum et on donne aussi une note de dégustation...

Christian : La façon de l'apprécier, de le consommer... C'est notre approche sensorielle.

Que note-t-on dans un rhum ?

Jerry : C'est le VOG : la vue, l'odorat et le goût ! Ce qui est intéressant, c'est que la plupart des livres sur le rhum sont écrits par des métropolitains. C'est la première fois qu'un livre sur les rhums du monde est écrit par deux Antillais. Notre approche en termes de goût et d'odorat va faire référence à des fruits de chez nous...

Christian : Ca nous a permis de tenir compte à la fois de l'expérience des gens d'ici et de celle des gens de là-bas...

Le rhum agricole est-il une exception française ?

Jerry : Nous avons consacré un chapitre sur ce sujet car historiquement le rhum agricole est effectivement une exception française. Dans les années 1840, il y a eu la naissance du sucre de betterave en France, la crise sucrière mondiale et il y a eu beaucoup de faillites dans les petites sucreries aux Antilles. On a restructuré tout ça avec des usines centrales et les petits planteurs qui ne gagnaient plus leur vie en vendant leurs cannes, ont décidé de faire leur rhum avec le jus de canne... Dans les îles anglaises, ils ont préféré importer de la mélasse...

Christian : C'est par la suite que cette différence qui finalement a été symptomatique d'une grosse catastrophe industrielle s'est révélée une différence qu'on pouvait mettre en avant !

Dans les rhums de mélasse, comment distingue-t-on ceux de tradition latine de ceux de tradition anglo-saxonne ?

Jerry : Les rhums de tradition latine ont un vieillissement un peu particulier avec la méthode solera qui vient du Xeres pour assembler des âges différents, avec aussi des ajouts de sirop. Il y a aussi des rhums de sirop, à partir de jus de canne cuit, ce que les Espagnols vont appeler miel de canne... Les rhums de tradition anglo-saxonne, comme ceux de Jamaïque, de la Barbade ou de Trinidad sont de purs rhums de mélasse, sans ajout, avec une distillation en alambic à repasse...

Christian : Aujourd'hui, la notion de tradition est de plus en plus compliquée à utiliser pour classer les rhums puisqu'avec la mondialisation, en Thaïlande ou au Japon, on peut faire aujourd'hui un rhum de tradition française avec un alambic à repasse... Ca brouille un peu les pistes, mais nous donnons quand même les clés pour s'y retrouver...

Comment expliquez-vous le goût si différent d'un bacardi ou d'un havana club ?

Christian : C'est une autre conception. Ces produits là sont pensés avec l'idée de la mixologie des cocktails. Il s'agit de ne pas avoir des alcools trop marqués en saveur...

Jerry : Ils utilisent des colonnes de distillation très hautes qui vont sortir un rhum autour de 90 °. C'est sûr que là, on perd des arômes mais on produit beaucoup plus et après quand vous ajoutez l'eau, vous avez encore plus de volumes !

Aujourd'hui, la Martinique a huit distilleries agricoles, la Guadeloupe en a neuf. Qu'est-ce qui différencie ces deux types de rhum agricole ?

Jerry : C'est encore l'histoire ! Faut pas oublier que Saint-Pierre était la capitale du rhum avant l'éruption de la montagne pelée. Toutes les îles envoyaient leur mélasse...

Christian : Y compris la Guadeloupe !

Jerry : Il faut imaginer qu'à Saint-Pierre, il y avait 28 distilleries ! Il y avait donc une tradition de rhum, mais surtout de vieillissement du rhum qui n'existait pas encore en Guadeloupe où l'on produisait beaucoup de rhum blanc et du rhum de sucrerie...

Christian : Faut se rappeler aussi qu'il y avait cette structure de la société martiniquaise qui concentrait tous les intérêts métropolitains. Donc même en Guadeloupe, tout était géré depuis la Martinique...

Jerry : Aujourd'hui, la grosse différence entre les deux îles, c'est l'AOC que les Guadeloupéens n'ont pas voulu en 1996 parce que c'est très contraignant, très coûteux, mais ça a contribué à amener le rhum martiniquais vers le haut du panier !

A combien sort un rhum AOC de la colonne de distillation ?

Jerry : Il est interdit de distiller un AOC Martinique au-dessus de 75 ° parce qu'on perd des arômes.

Christian : A part damoiseau qui sort à 86 °, tous les rhums antillais sortent à 75 °.

Jerry : Neisson a sorti un "brut de colonne" à 70 °, c'est l'esprit... Un rhum très aromatique que les puristes adorent ! Mais c'est un rhum de dégustation, pas un rhum à ti punch !

Le rhum agricole n'est-il pas aujourd'hui en train de regagner du terrain ?

Jerry : On se rend compte qu'aujourd'hui de nombreux pays se mettent à faire du rhum "pur jus de canne" puisque l'appellation agricole est réservée aux rhums français et à Madère. La Thaïlande en produit, Tahiti a recommencé d'en produire... Aux Etats-Unis, j'ai dégusté un rhum de Louisiane qui est un "pur jus de canne". Ce sont de petites productions, mais ils s'y mettent parce qu'ils ont redécouvert la fraîcheur du rhum agricole. Et les Réunionnais s'y mettent aussi ! Isautier s'y est mis le premier mais il s'est fait dépasser par Savanna et Rivière du Mât.

Vous ouvrez vos pages à des produits comme le Dom Papa ou le Diplomatico. Méritent-il pour autant l'appellation de rhum ?

Jerry : Le Dom Papa ne devrait pas être classés dans les rhums, mais dans les rhums épicés, d'ailleurs quand on regarde la contre-étiquette qu'ont su imposer les rhumiers, on voit tous les ajouts... Le Diplomatico, c'est du rhum du Venezuela avec beaucoup d'ajout de sucre, mais pas d'additions supplémentaires... Ce sont des produits d'appel ! Les clients commencent par ces rhums là et peu à peu —on les éduque aussi ! — ils vont vers les rhums sans ajout et vers les rhums agricoles qui sont en plein développement !

La cachaça du Brésil est-elle du rhum ?

Jerry : Oui, c'est du rhum. C'est le même process de fabrication, à partir du pur jus de la canne à sucre, mais c'est distillé à un degré plus bas, autour de 40 °.

Et même les Japonais font du rhum ?

Jerry : Ils s'y sont mis et c'est même un rhum agricole avec la cane à sucre qui pousse sur l'île d'Okinawa. Ils font aussi des rhums à partir de sirop et de mélasse...

Christian : Ils sont moins connus pour les rhums que pour les whiskeys, mais ça fait un certain temps qu'ils en font.

Quelle est la place du rhum par rapport aux cognacs et aux whiskys ?

Christian : Actuellement, la consommation de whisky est encore loin devant celle du rhum. En revanche, on constate un ralentissement dans la progression des volumes de whisky...

Jerry : Et une progression réelle, très nette et beaucoup plus rapide des volumes de rhum. Le rhum est en train de rattraper son retard !

Propos recueillis par FXG, à Paris

Le Bordeaux rhum festival

Si Bordeaux est la capitale du vin en France, et elle le prouve avec le salon international Vinexpo, elle a été aussi la capitale du rhumau XIXe siècle. C'est dans cet esprit et pour rendre hommage à ce passé rhumier de Bordeaux que Jerry Gitany lance le premier salon du rhum les 1er et 2 décembre prochains à la Grande Poste, rue du palais Gallien, le Bordeaux rhum festival. Une goélette est même attendue la veille, chargée de fûts de rhum  destinés à la dégustation et à la vente ! Si tous les rhums du monde seront représentés, la totalité des enseignes de Guadeloupe, de Martinique et de la Réunion ont répondu présent !

Présentation de l'éditeur

Plongez-vous dans ce répertoire de 200 rhums d’exception, venus des Caraïbes, d’Amérique du Sud, d’Europe et même d’Asie. Chaque référence est illustrée d’une photographie et accompagnée d’informations techniques et d’anecdotes insolites. Apprenez comment se fabrique le rhum selon sa provenance et comment il se déguste selon sa typologie, initiez-vous à la cuisine au rhum et découvrez des recettes de cocktails gourmands pour varier les plaisirs. De même vous y découvrirez comment associer rhum et cigare ou encore rhum et chocolat !

Une chose est sûre : le rhum n’aura plus aucun secret pour vous !

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