Guerre de vétérinaires en Martinique
Deux réprimandes et une relaxe à l'encontre de trois vétérinaires
Saisi par le Dr Gaube, le conseil régional de l'ordre des vétérinaires d'Ile de France et des départements d'Outre-mer a déclaré les Drs Sottovia et Plisnier coupables d'avoir dénigré leur confrère, d'avoir manqué à la déontologie à l'occasion d'un reportage de Martinique La 1ère et les a condamnés à la sanction de réprimande.
La décision du conseil régional de l'ordre des vétérinaires rendue le 15 novembre fait suite à l'audience de sa chambre disciplinaire qui s'est tenue à Paris le 18 octobre dernier. S'estimant dénigré par l'intervention dans un reportage télévisé critique sur sa clinique, par deux de ses confrères, les Drs Sottovia et Plisnier, président et membre de l'association des vétérinaires de Martinique, auteur d'une plainte devant le conseil de l'ordre contre le Dr Gaube et sa clinique Selvetga, Gérard Gaube s'est pourvu devant le conseil régional de l'ordre des vétérinaires. "Ce reportage, expliquait le Dr Gaube à l'audience, a fait fuir des associés, des salariés, des clients et j'ai du placer ma société sous procédure de sauvegarde en juin dernier." Le président du conseil de l'ordre estimait alors que le Dr Jean-Luc Sottavia avait manqué de confraternité et dénigré le Dr Gaube. De même, il estimait que le Dr Marcel Plisnier qui "invoque la maltraitance des animaux reçus par la clinique du Dr Gaube, a manqué aussi à ses devoirs". Il demandait contre chacun d'eux une peine de réprimande. Mes Ursulet et Charrière-Bournazel, conseils du Dr Gaube, demandaient quant à eux à la présidente de la chambre disciplinaire de retarder sa décision jusqu'au jugement de la plainte du Dr Sottavia, via l'association des vétérinaires de Martinique, contre le Dr Gaube. Ils demandaient également une sanction disciplinaire tenant compte de l'impact qu'avait eu le reportage de Martinique La 1ère sur le chiffre d'affaires de la clinique de leur client.
L'intervention du Dr Sottavia s'insérait en illustration des reproches faits à la clinique Selvetga par l'auteur du reportage. "Le Dr Sottavia, précise le jugement, ne pouvait que connaître l'orientation du reportage (...) et ne pouvait ignorer que les pratiques générales qu'il décrit comme étant la norme n'étaient pas celles reprochées à la clinique Selvetga, non seulement par la journaliste mais également par l'association des vétérinaires de Martinique qu'il dirigeait et avait précisément porté plainte sur ces points..." Quant au Dr Marcel Plisnier, celui-ci insiste dans sa très courte intervention sur la maltraitance des animaux. "Lui non plus, indique le jugement dans ses motifs, ne pouvait ignorer que le reportage portait sur les pratiques du Dr Gaube." En revanche, le Dr Patrick Arien a été relaxé. Ce dernier n'intervient qu'indirectement dans le reportage via deux photos de lui glanées sur internet et un commentaire qui indique qu'il a très brièvement travaillé avec le Dr Gaube avec lequel il a, depuis, un litige aux prudhommes...
FXG, à Paris
https://la1ere.francetvinfo.fr/martinique/y-t-il-scandale-veterinaires-martinique-506023.html
Le compte rendu de l'audience du 18 octobre 2018
Des vétérinaires comme chiens et chats devant le conseil de l'ordre
A la suite d'un reportage diffusé sur Martinique la 1ère, la chambre disciplinaire des vétérinaires saisie de plusieurs plaintes par des vétérinaires de l'île.
La chambre disciplinaire du conseil régional de l'ordre des vétérinaires (Île de France et DOM) s'est réunie à Paris jeudi 18 octobre pour examiner une plainte du docteur vétérinaire Gérard Gaube contre ses confrères Jean-Luc Sottovia, Marcel Plisnier (absent), Virginie Da Costa (en visio-conférence depuis la Guyane) et Patrick Arien. Ces derniers ont en commun d'être intervenu dans un reportage diffusé par Martinique la 1ère le 28 juillet 2017. Le Dr Gaube attaque ses confrères pour dénigrement et manquement à la déontologie. La chambre était aussi saisie d'une plainte, plus ancienne, de l'association des vétérinaires de Martinique (AVM) contre le Dr Gaube pour pratiques chirurgicales abusives. Mais la présidente a choisi de disjoindre les deux dossiers pour ne retenir que la plainte pour dénigrement. "Ce reportage, explique le Dr Gaube, a fait fuir des associés, des salariés, des clients et j'ai du placer ma société sous procédure de sauvegarde en juin dernier." Le Dr Da Costa qui n'apparaît qu'en voix off dans le reportage, témoigne : "Je ne suis pas à l'origine de ce reportage et j'ignorais que mes propos étaient enregistrés. La journaliste s'est acharnée sur un vétérinaire et une structure avec un titre genre scoop de l'année !" Aussitôt, le Dr Gaube retire sa plainte contre le Dr Da Costa. C'est au tour du Dr Sottovia d'intervenir : "En tant que président de l'AVM, j'ai voulu représenter la profession et situer le débat sur ce qu'on a le droit de faire ou de ne pas faire." Il admet que le reportage n'est nourri que par deux témoignages et que les images présentées comme celles de la clinique du Dr Gaube sont en fait des images de la SPA... Il évoque la plainte que son association, l'AVM, a déposé contre le Dr Gaube devant le conseil de l'ordre, dix-huit mois avant le reportage, et dont la journaliste a pris connaissance : "Elle m'a dit qu'elle allait faire un reportage sur le Dr Gaube, mais j'ai pris garde de ne pas pas citer son nom. Je ne voulais pas servir l'acharnement contre un confrère." "Vous avez eu l'impression d'une collusion, d'un montage ?", demande la présidente. "Je pense qu'elle en voulait au Dr Gaube. C'est une personne sensible à la cause animale qui a assimilé des opérations chirurgicales à répétition à de la maltraitance."
"C'est une affaire symptomatique d'un climat de plus en plus délétère", déclare le bâtonnier Charrière-Bournazel, conseil du Dr Gaube. Il oppose la liberté d'informer à l'instrumentalisation de la presse : "Dans le microcosme martiniquais, la concurrence fait qu'une association qui n'a pas de qualité pour agir, manipule la presse et coule ainsi le Dr Gaube. C'est un manquement aux règles, à l'éthique et à la présomption d'innocence." Me Ursulet, lui aussi conseil du Dr Gaube, enchaîne : "Le Dr Da Costa a reconnu qu'il s'agissait d'un acharnement ! Voilà pourquoi il ne fallait pas disjoindre les deux affaires. Ce reportage est l'expression d'une campagne de dénigrement qui commence avec la plainte de l'AVM qu'on fait passer pour une enquête de l'ordre ! C'est une manipulation pour détruire le Dr Gaube." Il conclut en demandant à la présidente de ne rendre son délibéré qu'en même temps qu'elle rendra son jugement sur la plainte de l'AVM...
Bruno Teissier, président de l'ordre, requiert à l'encontre des Drs Sottovia et Plisnier une peine de réprimande : "Moi aussi, j'aurais aimé que les deux affaires soient jointes car votre décision va être interprétée sans tenir compte du contexte de l'autre affaire." Il justifie ses réquisitions en évoquant "un dénigrement et un manquement passif à la confraternité". Il rappelle que si la plainte de l'AVM a fuité dans la presse, le Dr Sottovia qui est président de l'AVM, est seul responsable. Quant au Dr Plisnier qui n'a pas daigné venir, "il alimente une polémique avec un reportage délétère clairement dirigé contre Gaube". Me Fabrina Alexandrine, défenseur du Dr Sottavia, plaide la relaxe : "Ses propos sont neutres ! La journaliste a avoué qu'un de ses amis a été confronté au Dr Gaube et qu'elle s'est tournée vers le Dr Sottavia pour avoir des informations sur des pratiques chirurgicales abusives. Le Dr Gaube se plaint de dénigrement, mais lui aussi qualifie ses confrères d'incompétents !" Elle achève sa plaidoirie : "C'est la journaliste qui aurait dû être attaquée !" Délibéré au 15 novembre.
FXG, à Paris
L'ancien collaborateur du Dr Gaube
Patrick Arien, vétérinaire à Saint-Pierre, était lui aussi poursuivi pour non respect du code de déontologie. Dans le même reportage, on voit deux photos de lui tandis qu'on apprend qu'il est en conflit prudhommal avec le Dr Gaube. "J'ai rencontré la journaliste, témoigne-t-il à l'audience, lors d'une intervention d'urgence sur son chien qui était passé par le cabinet du Dr Gaube. Je lui ai dit que je m'étais éloigné à Saint-Pierre en raison de notre conflit et, à ce titre, que je ne voulais parler dans son reportage. J'ai été choqué de découvrir mon visage ; elle ne m'avait pas prévenu." "Elle dit qu'elle est une cliente du Dr Sottavia et qu'elle a un problème avec le Dr Gaube, s'étonne Me Ursulet, et vous lui parlez des 100 000 euros que vous lui réclamez aux prud'hommes... C'est la poule aux oeufs d'or et on dit au passage aux prud'hommes que le conseil de l'ordre le poursuit..." Me Charrière ironise sur "les avocats à la cour, les avocats de cour et les avocats sur cour" pour s'en prendre aux "vétérinaires sur cour, haineux et lâches". Le président Teissier ne requiert pas de peine : "Ce qui lui est reproché est une discussions privée avec une journaliste qui ne s'est pas identifiée en tant que telle. Il n'y a pas de manque de confraternité actif, ni de dénigrement actif. On soupçonne la journaliste d'avoir utilisé ses propos pour nourrir son reportage." Me Staedlin, défenseur du Dr Arien plaide la relaxe : "C'est une pièce rapportée dans ce dossier ! Il aurait instrumentalisé l'affaire parce qu'il a un prud'homme ? On peut retourner la question. Il n'y a aucune preuve d'un manque de confraternité." Et à l'instar de Me Alexandrine, il conclut : "C'est un reportage qui dépasse l'entendement en termes de diffamation." Délibéré au 15 novembre.