Le tri sélectif et le recyclage en Outre-mer
Collecte des déchets et tri sélectif à la peine dans les Outre-mer
La délégation outre-mer de l'Assemblée nationale a adopté jeudi une résolution visant à améliorer les conditions de la collecte et du tri sélectif dans les territoires d'Outre-mer en attendant la loi économie circulaire.
Les députés ont auditionné des représentants ultra-marins de l’AMORCE, l'association des collectivités territoriales et des professionnels pour la gestion des déchets, de l’énergie et des réseaux. C'est un réseau qui regroupe entre autres 15 collectivités d'outre-mer et 1,8 millions d'ultramarins et qui a été missionné pour négocier avec Citéo, l'ex-Eco-emballage, organisme agréé pour assurer la collecte et la valorisation des emballages ménagers selon le principe pollueur-payeur. A quelques mois de l'examen de la future loi économie circulaire, la délégation outre-mer a réuni ses représentants de Guadeloupe, Martinique et Guyane et ensemble, ils ont élaboré une motion qui vise à réviser le cahier des charges, des techniques, des moyens à mettre en oeuvre par Citéo et les établissements publics de coopération intercommunale sur chaque territoire.
Si la collecte sélective a démarré dans l'Hexagone dès 1993, le démarrage a été bien plus tardif Outre-mer, entre 2002 et 2015 ! En 2016, l'agrément de Citéo a été reconduit pour la période 2017-2022 mais dans des conditions qui ne permettent pas du tout d'atteindre les objectifs, à savoir 100 % de déchets recyclables d'ici 2025 et zéro déchets en 2035. "Comme il n'y a pas de recyclage en aval, observe Olivier Castagno, responsable pôle déchets AMORCE, il n'y a pas de recettes." AMORCE a fait une analyse du coût de gestion des déchets : c'est 33 euros par habitant et par an dans l'Hexagone contre 46 euros Outre-mer. Dans l'Hexagone, les recettes additionnent 10 euros la tonne pour le soutien apporté par l'éco-organisme et 5 euros pour la valorisation. Outre-mer, l'éco-organisme apporte 4 euros en soutien mais le recyclage n'est valorisé qu'à hauteur de 6 centimes car la valeur ajoutée se fabrique ailleurs, en métropole généralement.
Tous les citoyens cotisent depuis 1992
"Nous faisons le travail qui est pourtant de la responsabilité des emballeurs et Citéo se dit victime du cahier des charges, déplore Pierre Porlon, vice-président de la communauté d'agglomération du Nord Grande-Terre en Guadeloupe. Il faut donc le changer, avec ou sans barême, pour continuer à sauver nos pays. Nous faisons une révolution mais sans moyen !" Même son de cloche chez Yvon Pacquit, vice-président de la Communauté d'Agglomération du Centre de la Martinique : "On s'inscrit dans les objectifs nationaux de collecte, mais la méthode n'est pas adaptée à nos territoires. Nos coût supérieurs de 50 % et les aides autant de fois inférieures... Nous avons dix ans de retard et pas d'aide de lancement. Il faut un modèle par territoire."
Pour l'heure, seule la Réunion (avec ses 800 000 habitants) est parvenue à élaborer une vraie filière de recyclage tant de pneus (8000 tonnes par an et 300 points de collecte) que de palettes. Aux Antilles, 70 % des déchets sont enfouis et seulement 10 % recyclés. En Guyane, il n'existe aucune filière sur place de recyclage à l'exception de celle des déchets verts.
Au final, la résolution élaborée consiste à améliorer la rémunération des collectivités en matière de collecte, les aides dédiées à la collecte sélective (comme pour les véhicules hors d'usage). La résolution sera présentée au gouvernement dans le cadre de la préparation de la future loi sur l'économie circulaire... Jérome Dancoisne, responsable environnement et déchets à la Région Guadeloupe, a fait savoir que sa collectivité aspirait à décrocher une habilitation
législative en matière de filière de responsabilité élargie des producteurs pour la collecte des emballages ménagers. "Ca permettra de peser sur le montant de l'éco-contribution car tous les citoyens cotisent depuis 1992."
FXG, à Paris
Le coût faramineux de la collecte en Guyane
Sophie Charles, présidente de la communauté des communes de l'ouest Guyanais, représentait l'ensemble des EPCI de Guyane. La CACL et la CCDS sont en contrat avec Citéo et un pourvoi est en cours avec les CCEG et CCOG pour ouvrir la partie collecte et tri sélectif. "On est à des années lumières du zéro déchet, regrette le maire de Saint-Laurent. A la CACL, on ne collecte aujourd'hui que sur le littoral et pas sur les communes de l'intérieur car Citéo n'y arrive pas !" A la CCOG, le traitement et la collecte sur le littoral occasionnent une dépense de 60 % de son budget de fonctionnement. "Si on récolte tout, observe Sophie Charles, le prix sera multiplié par deux !" Le tri sélectif effectué par Citéo l'an dernier pour la CCOG a représenté 184 tonnes pour 2 millions d'euros, soit 10 883 euros la tonne, alors que sur la même zone, le coût du traitement des ordures ménagères revient à 257 euros la tonne...