Le RSA plombe les finances du conseil départemental de la Réunion
Melchior plaide la recentralisation du RSA à Matignon
Fort de l'avis favorable du président de la République pour une recentralisation du RSA par les services de l'Etat comme cela se fait en Guyane et à Mayotte, Cyril Melchior a demandé à Edouard Philippe de ne pas attendre deux ou trois ans pour le rendre effectif.
Cyril Melchior, président du conseil départemental, avait rendez-vous lundi matin à Matignon avec le Premier ministre. "J'ai voulu lui expliquer, explique le président Melchior, les difficultés qui sont celles du département de la Réunion pour pouvoir maintenir à court terme son équilibre budgétaire en raison du poids du RSA. Environ 93 000 personnes sont allocataires du RSA, soit une charge de 650 millions d'euros dont environ 150 incombent au département. Vendredi, le chef de l'Etat avait indiqué être favorable à une recentralisation financière de cette charge plutôt qu'à l'instauration d'une taxe sur les casinos ainsi que l'avait suggérée son homologue de la Guadeloupe. "Si on veut, poursuit Cyril Melchior, maintenir un niveau d'intervention du département suffisamment fort, l'essentiel de nos marges de manoeuvre ne doit pas être consommé en finançant ce que doit faire l'Etat, c'est-à-dire le RSA." Alors, ok Emmanuel Macron s'est dit favorable, mais reste à concrétiser cela et c'est la qu'Edouard Philippe intervient puisqu'il faut aborder les modalités pratiques et le délai. "Il s'est montré non pas réservé, prévient, M. Melchior, mais prudent... Il veut bien qu'on envisage cette recentralisation, mais il dit avoir besoin de temps pour bien étudier notre dossier... Si le Premier ministre pense à un délai de deux ou trois ans, moi je voudrais que ce soit étudier cette année !"
Renforcer les missions premières du département
Depuis dix à douze ans, a plaidé le président Melchior, le département s'est désengagé de nombreux dossiers relatifs aux politiques de prévention pour compenser le manque à gagner de l'Etat sur le RSA. "Aujourd'hui, je dis halte, stop ! On ne peut plus continuer à financer à la place de l'Etat le RSA et parce qu'il y a une urgence sociale, nous voulons apporter notre contribution à la résolution de cette crise, mais pour ça il faut des moyens."
A l'origine, quand l'Etat a transféré le RSA au département, ce transfert devait s'accompagner de moyens équivalents. La dégradation progressive des indicateurs fait que la charge a augmenté sans que les recettes ne suivent. En tout, c'est plus de 1 milliard d'euro que le département a ponctionné depuis dix à douze ans sur son budget pour compenser le décalage au détriment des autres actions de prévention santé, de lutte contre les exclusions ou l'insertion des publics en difficulté qui lui incombent... Dans les faits, si l'Etat récupère les 650 millions de charges, il récupère aussi les 150 de reste à charge du département. "Ce sera une perte définitive du reste à charge, explique-t-il, mais comme on sait que la dépense augmente chaque année de 20 à 30 millions d'euros... Ca sera autant d'économie chaque année que nous pourrons utiliser pour nos missions premières."
Reste maintenant tout un travail technique à faire avant que Matignon mette son feu vert et transforme l'avis favorable du président de la République en réalité budgétaire palpable dans une loi de finance. Et laquelle ?
FXG, à Paris
Plan pauvreté
Le département travaille actuellement avec le délégué interministériel au plan de lutte contre la pauvreté. 42 % des familles réunionnaises sont en-dessous du seuil de pauvreté. Ce taux était de 52 % il y a dix ans et il est de 14 % dans l'Hexagone... "J'ai expliqué au Premier ministre ce que nous attendions de ce plan, détaille M. Melchior. Car deux sujets nous préoccupent : le décrochage scolaire et l'accompagnement social des familles."
Avec l'Etat, le département, l'Education nationale et également les mairies, il pense que nous pouvons mieux accompagner les enfants en situation d'échec. "Ils sont repérés, nous pouvons donc les aider à s'en sortir !" En deuxième, lieu, le département veut venir en aide aux familles qui, à partir du 20 du mois, n'arrivent plus à subvenir à leurs besoins. "J'ai envie de les accompagner avec des opérateurs locaux comme la Croix Rouge, les CCAS, mais en même temps, il faut travaille sur une aide à la maîtrise budgétaire." Cet accompagnement des familles et la lutte contre le décrochage scolaire, c'est, en deça de ce que propose le plan national de lutte contre la pauvreté, ce que le président Melchior a proposé au Premier ministre pour mieux adapter ce plan à nos réalités.