Marc Rochet, président d'Air Caraïbes Atlantique
"Sur les Antilles, nous allons mettre de gros avions"
Alors que Jean-Paul Dubreuil et Marc Rochet, les fondateurs d'Air Caraïbes préparent leur relève, ils poursuivent le remplacement progressif des A 330 par des A 350, des avions plus vertueux d'un point de vue écologique. Le dernier a été livré par Airbus le 25 juillet dernier.
La transformation de la flotte d'Air Caraïbes correspond-elle à la croissance du trafic ?
La compagnie continue sa croissance, mais elle souhaite aussi insister sur la modernisation des outils — et les avions sont des outils — que nous mettons à la disposition de nos clients. L'A 350, c'est un gain de confort évident, c'est un gain de modernité et de connectivité, c'est aussi un avion écologique au sens de la consommation de carburant dans un monde qui devient problématique de ce côté-là. Oui, c'est un avion pour la croissance, mais c'est aussi un avion de modernisation pour notre façon de travailler et pour le produit que nous offrons aux clients d'Air Caraïbes.
Le nouvel appareil est-il différents des deux autres A 350 que vous exploitez depuis 2017 ?
Ce troisième avion est conforme à ceux que nous avons déjà en service sauf que comme il y a presque trois ans entre le premier reçu et ce dernier exemplaire, des améliorations ont été apportées par Airbus, notamment des programmes très focalisés sur la consommation de carburant. Il va consommer un peu moins que les autres parce que ses winglets sont plus grands, parce que son avionique a été modernisée et ça, c'est la vie d'un avion, au fur et à mesure de l'expérience, de l'usage qui en est fait, Airbus continue à améliorer ses produits et nous, mais surtout nos passagers, en bénéficions !
Qu'en est-il de la nouvelle cabine ?
On est sur un aménagement tri-classe, produit qui a fait le succès d'Air Caraïbes. A l'avant une classe Madras extrêmement confortable avec des sièges couchettes, un système de divertissement en vol et d'information Thalès, un des meilleurs produits disponibles dans le marché. A l'autre bout de la cabine, une classe économique qui n'offre certes pas les mêmes volumes d'espace, les mêmes qualités de siège parce que là on ne cherche pas que le confort et la distraction en vol, mais le prix de production pour pouvoir offrir aux clients, ceux qui voyagent en groupe, en famille, un prix qui soit très compétitif, ce qui permet à Air Caraïbes d'être très présent sur l'arc antillais et d'être maintenant partout quasiment à part égale avec notre principal concurrent, la compagnie nationale. Nous avons une cabine qui a été conçue pour que les passagers voyagent dans de bonnes conditions, mais fondamentalement, on recherche l'économie sur le produit en termes de densité cabine. Entre les deux, il y a ce que nous appelons la classe Caraïbe, c'est un produit prémium. Ce n'est pas la classe affaire, ce n'est pas la classe économique... Il y a un siège de moins en largeur ; il y a un peu plus d'espace avec le siège de devant. C'est pour ceux qui voyagent par exemple en couple, plutôt le troisième âge, ceux qui sont prêts à payer un peu plus pour avoir un peu plus de confort.
L'A 350 est 30 ou 40 % plus cher que l'A 330...
L'aérien est un secteur qui est très concurrentiel. Il n'y a qu'à voir le nombre de compagnies qui opèrent sur les Antilles et tant mieux pour l'arc caraïbe dans son ensemble, parce qu'il n'y a pas que les Antilles, ça concerne la République dominicaine, Cuba ou la Guyane qui est au coeur de nos préoccupations puisque cet avion va spécifiquement desservir la Guyane. Les passagers regardent le prix et ils regardent aussi si le voyage leur a donné satisfaction pour pouvoir réutiliser la même compagnie. L'A 350 a un vrai succès auprès de nos clients puisque quand les passagers descendent de cet avion, ils sont moins fatigués que quand ils prennent un autre appareil, y compris chez nous ! C'est pourquoi nous allons progressivement remplacer les plus anciens A 330 comme on le fait depuis quatre ans. Les retours que nous avons, c'est : "J'ai voyagé dans de meilleures conditions ; je suis moins fatigué ; l'avion fait moins de bruit ; il y a moins de vibration..." On en a besoin, mais le secteur clé, le secteur qui attire notre attention, c'est au-delà du service — et nos personnels font le maximum pour cela — offrir des prix compétitifs parce que les gens veulent voyager en fonction de leurs besoins, mais avec des prix qui restent accessibles.
Comment la compagnie a-t-elle fait le choix de l'A 350 ?
En choisissant il y a quelques années l'A 350, nous avons fait un bond technologique. Nous aurions pu choisir un avion intermédiaire entre l'A 330 et l'A 350, l'A 330 néo, on a préféré faire un saut dans la modernité. Nous sommes aujourd'hui encore la seule compagnie française qui exploite cet avion au côté des grands de ce monde (British Airways, Qatar, Etihad...). On est fier que notre actionnaire, nos personnels et nos clients nous aient permis d'être dans ce groupe là. Je crois que le succès que nous rencontrons, avec beaucoup de modestie et beaucoup d'humilité, va confirmer le fait que petit à petit non seulement on veut faire de la croissance, mais aussi de la modernisation de flotte ! Oui, il y aura plus de 350 puisque nous recevrons un autre à la fin de l'année, l'A 350-1000, encore un nouvel avion ! Et on va continuer comme ça. Le transport aérien est une activité en croissance continue. Il correspond à des besoins de voyages, des besoins de rapprochement familiaux, des besoins d'échanges culturels dans le monde entier et la croissance du trafic est là ! Notre responsabilité, c'est de s'assurer qu'elle se fasse dans des conditions économiques accessibles et aussi dans des conditions écologiques qui sont destinées évidemment à préserver la planète. L'A 350, ramené au siège, consomme 25 % de carburant en moins que les avions de la génération précédente. Il faut aller dans ce sens et il faudra continuer à aller dans ce sens.
Pourquoi n'êtes-vous pas passé directement à l'A350-1000 ?
Initialement, notre préférence allait au 350-1000 parce que c'est un avion encore plus performant en termes économiques : il est plus gros que le 350-900, avec quelque 430 places, mais c'est le même avion, donc on a des gains d'échelle. Mais le 350-1000 n'était pas encore disponible et on a pris des 900. On s'aperçoit que ça a été bon choix pour nous dans notre phase de développement. Le premier A 350-1000 qui arrive à la fin de l'année ira sur la route de Pointe-à-Pitre. Il sera rejoint par un second appareil pour la route de Fort-de-France. Donc sur les grosses routes, on va mettre de gros avions et puis on va irriguer le réseau, Cayenne et la République dominicaine avec le 900.
Un nouvel organigramme se dessine peu à peu avec la promotion de jeunes en interne. Pourquoi ce choix ?
On a essayé différentes formules ; certaines n'ont pas été couronnées du succès que nous attendions... La dernière décision prise est de promouvoir des gens de l'intérieur. Chez Air Caraïbes Atlantique, l'opérateur qui fait voler l'A 350, c'est Mathieu Munos, 37 ans, qui en devient le DG. Il est d'origine martiniquaise Chez Air Caraïbes, on a promu des gens à la fois des Antilles comme Yoann Paulin, le patron de nos systèmes d'information et de toute notre base digitale qui est un secteur clé de l'entreprise. C'est un jeune Guadeloupéen. Et puis il y a des gens qui ont un peu plus d'expérience comme Olivier Besnard qui était jusqu'à présent directeur général pour la partie antillaise devient directeur général d'Air Caraïbes sous l'autorité de Jean-Paul Dubreuil et la mienne, mais on leur fait confiance pour leur passer le relais.
Propos recueillis par FXG, à Toulouse