L'or rouge, d'Isabelle Richard
Un conte fantastique sur l’esclavage et l’amour
L’Or rouge est le premier opus d’une trilogie signée Isabelle Richard (photo) et publiée chez Maïa éditions. Ce roman, à cheval entre histoire et fantastique, nous transporte sur les traces d’Adam, fils d’esclave, né à Trinité en Martinique. Son enfance est rythmée des lentes agonies des martyrs de ceux que l’on traite comme des bêtes, mais aussi bercée par l’amour de sa mère et son amitié interdite avec Hélène, la fille du maître de l’habitation. Cet homme tourmenté porte en lui les prémices de l’abolitionnisme. Et alors que l’on s’attend à tomber dans la mièvrerie d’un amour que l’époque condamne, l’auteur nous emmène sur la piste d’un Nosferatu tropical… Adam est devenu un vampire en errance, de siècle en siècle, pour un long apprentissage de sa qualité nouvelle de monstre. Sa rencontre avec Guillaume, médecin, frappé du même mal, et qui a appris à dominer ses pulsions, va le pousser à retrouver sa condition humaine. Mais la quête du vampire n’est-elle pas toujours l’Amour ? « Le mythe du vampire, explique Isabelle Richard, n'est pas seulement une métaphore de l'amour, le vampire est un être monstrueux qui vide l'autre de sa substance vitale, le déshumanise, en fait sa proie, son jouet, sa chose avec cruauté et perversité, à l'image des esclavagistes et de la plupart des blancs d'alors. »
Le lecteur, comme l’auteur, pensent bien évidemment au zonbi qui a perdu toute forme d'humanité, comme une projection de l’esclavagiste. « Là où certains sont mués par l'amour et la bienveillance, poursuit Isabelle Richard, d'autres le sont par leurs propres intérêts, le mal. Que leur importe alors de détruire ceux qu'ils croisent, et ce qu'ils leur infligent, ils prennent jusqu'à la vie pour servir leurs vils instincts. » Au fil des pages, ses vampires se révèlent pour la plupart des êtres bienveillants, et les vrais monstres sont les hommes. Isabelle Richard a vu « Racines » d'après le livre de Alex Haley, elle a souffert avec Kounta Kinté, le héros, et puis elle a eu un aïeul que l'on surnommait le « sauvage », et qui était probablement noir... « D'où venait-il ? Qui était-il ? Je n'en sais rien, avoue Isabelle Richard. J'ai imaginé plein de choses sur lui et ça m'a surtout donné la certitude que le racisme n'est pas quelque chose de rationnel car on est un mélange de plein de pays, d'histoires, de cultures. »
« L’Or rouge » n’est pourtant pas un roman contre l'esclavage, c'est un roman fantastique, une histoire d'amour qui défie l'Histoire et le temps, une histoire d'amour compliquée voire impossible pour dire que les sentiments ne meurent jamais vraiment lorsque l'on a aimé éperdument. Même la mort ne peut anéantir l'amour, c’est le message subliminal de ce premier roman.
FXG, à Paris