Le plan logement Outre-mer 2019 peine à démarrer
Le secteur du BTP redoute faillites et licenciements en septembre
Les acteurs du BTP et du logement social Outre-mer ont été auditionnés lundi 15 juin par la délégation Outre-mer de l’Assemblée nationale pour évoquer la nécessaire relance du plan logement Outre-mer qui, après l’échec du plan de 2015, est à la peine alors que quelque 3 milliards d’euros sont d’ores et déjà programmés et fléchés par CDC Habitat et Action logement.
La crise sanitaire a mis à l’arrêt quelque 90 % des chantiers de construction dans nos territoires. La crise a aussi généré des surcoûts de 4 à 15 %, parfois 25 %, que les maîtres d’Ouvrage et les collectivités d’Outre-mer ont du mal à négocier avec les constructeurs. Ces derniers se plaignent aussi de n’avoir aucune visibilité sur les chantiers à venir. Il y a bien eu une réunion avec le ministère des Outre-mer, mais si les acteurs du BTP ont bien été invités, ils n’ont pas eu droit à la parole, comme l’a fait remarquer le président de la fédération du BTP de la Guadeloupe, José Gaddarkhan. « Si d’ici septembre, a signalé ce dernier, nous n’avons pas plus de visibilité, il y aura beaucoup de dépôts de bilan et de chômage. » Ajouté à cela, les bailleurs sociaux ont dû faire face à de nouveaux types d’impayés, notamment chez les locataires salariés. Mais, même sans la crise sanitaire, depuis 2009 le BTP est en difficulté : « Il faut revoir la taille des marchés publics, a préconisé Hervé Etilé de la FRBTP Martinique, pour que les entreprises de moins de 20 salariés puissent candidater, et réduire le taux de TVA sur le logement social. » Franck Ho Wen Sze, président de la FRBT de Guyane a partagé les mêmes constats, tout en déplorant que l’Opération d’intérêt nationale (OIN) pour la Guyane peine elle aussi à démarrer, à débloquer le foncier pour construire des logements. « Nous n’avons pas besoin d’un plan de relance, a-t-il déclaré, nous avons signé l’accord de Guyane en 2017. Il suffit de respecter cet accord, de sanctuariser ses financements et de commencer les chantiers annoncés. »
Des fonds pour le plan de relance
André Yché, président de CDC-Habitat, a rappelé que son groupe allait acheter 10 000 logements intermédiaires en Outre-mer dont 2000 en Guyane, 4500 en Martinique et autant en Guadeloupe. La programmation prévoit une première tranche de 700 millions d’euros et 4200 logements en juin, 350 millions et 2000 logements en octobre et autant à la fin de l’année.
De son côté Nicolas Bonnet d’Action Logement a rappelé que son organisme était impliqué dans le plan logement outre-mer signé en novembre dernier à hauteur de 1,5 milliards pour éradiquer l’habitat indigne et développer une offre locative de qualité dans les centre-bourgs. « Ces 1,5 milliards, a-t-il assuré, auront un effet levier de 3 milliards qui vont irriguer l’Outre-mer. » Pour autant, les collectivités ont parfois du mal à mobiliser les 10 % du montant des projets pour prétendre à la ligne budgétaire unique (220 millions d’euros de fonds d’Etat qui ne sont jamais correctement consommés), certains maîtres d’ouvrage ont besoin de soutien en ingénierie pour monter les dossiers. Par ailleurs, si le crédit d’impôt réhabilitation ne concerne que les quartiers classés en « politique de la ville » (QPV), quand bien même si on appliquerait les critères retenus pour l’Hexagone, c’est tous les Outre-mer qui devraient être classées en QPV ! A cela s’ajoutent les charges sociales puisque le BTP n’est pas dans le secteur d’exonération de charges renforcée. Il a donc été question, encore, de moratoire. Une solution, celle défendue par CDC-Habitat et Action Logement consisterait à mettre en œuvre un « cluster » aménagement et habitat. « Les moyens sont là, a réaffirmé André Yché, la question est l’état de l’outil de production et la capacité de l’Etat et des collectivités à suivre le rythme et, notamment, la gestion administrative des chantiers en amont. Ce cluster reste à construire. » Il a toutefois débuté en Guyane avec l’établissement public foncier de la Guyane et la SIMKO. « Il faut l’élargir aux services de l’Etat et des collectivités et avoir une programmation effective et suivie tous les six mois », a indiqué André Yché, mais il n’est ni ministre du logement, ni des ministre des Outre-mer.
FXG