Adoption du budget des Outre-mer en commission des lois
Le débat budgétaire a débuté
La commission des lois de l’Assemblée nationale a adopté jeudi dernier le budget de la mission Outre-mer.
C’est en visio-conférence depuis la Nouvelle-Calédonie où il s’est rendu au lendemain du deuxième référendum sur l’avenir de ce territoire du Pacifique Sud que le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, a défendu son budget. Pour faire bonne mesure, il a d’abord rappelé que l’ensemble des fonds d’Etat dévolus aux territoires dépendant de son ministère sont répartis en sus de la mission Outre-mer et de ses deux programmes (« Emploi » et « Conditions de vie ») sur 31 missions et 94 programmes pour un montant global de quelque 19 milliards. Ainsi le budget de la Cohésion des territoires va réévaluer de 17 millions d’euros le rattrapage de la dotation d’aménagement des communes et des circonscriptions territoriales d’outre-mer (Dacom), le ministère de l’Education nationale va prendre à sa charge pour la Guyane et Mayotte 42 millions pour son programme « Enseignants » et 37 pour son programme « Elèves ». A cela, il a ajouté les dispositions spécifiques aux Outre-mer du plan de relance : 50 millions pour l’eau et l’assainissement en Guadeloupe et à Mayotte, 50 millions pour le plan Séisme Antilles, 80 millions pour la relance agricole (notamment les abattoirs à la Réunion), 60 millions pour garantir les pertes de recettes fiscales des collectivités, sans oublier des fonds pour la route en Guyane et à la Réunion.
Pour le budget proprement dit de la mission Outre-mer, il est en hausse de 6 % en autorisation d’engagement à 2,79 milliards et de 2,5 % en crédit de paiement à 2,43 milliards. Le programme « Emploi » progresse de 107 millions avec la compensation des charges sociales patronales en hausse de 6,6 % et la hausse de la contribution au SMA qui ouvre un nouvel établissement à Bourail en Nouvelle-Calédonie.
Le programme « Conditions de vie » augmente de 55 millions d’euros pour financer la ligne budgétaire unique (logement social) de 8,7 % à 224 millions d’euros, les établissements publics fonciers de Mayotte et de Guyane (18 millions), la construction d’écoles à Mayotte et en Guyane (13,4 millions) ou le lycée de Wallis-et-Futuna (17 millions). Enfin pour le soutien aux investissements des collectivités, le fonds exceptionnel d’investissement est maintenu à 110 millions au moment où les contrats de plan Etat-Région vont être relayés par les contrats de convergence et de transformation.
200 millions de crédits de paiement non consommés
Rapporteure pour la commission des lois, l’ancienne ministre des Outre-mer et députée PS de Paris, George Pau-Langevin (GPL) a regretté la sous-consommation des crédits de paiement (200 millions d’euros), mais surtout la faiblesse de ce budget d’un point de vue culturel en baisse depuis 2020 (lire encadré). Le député app. PS de la Martinique Serge Létchimy a proposé une réflexion pour « reformater le périmètre d’action du ministère des Outre-mer » et surtout s’ériger en faux contre ceux qui font porter le poids de la sous-consommation des crédits de paiements aux responsables politiques des territoires : « Il y a un problème structurel d’adaptation locale. Il faut donner aux collectivités un pouvoir d’adaptation directe. » Puis il a martelé une série de questions laissées selon lui sans réponse par le ministère : « Quel est votre projet pour lutter contre la crise démographique aux Antilles ? Quelle solution pour une diplomatie territoriale ? Que faites-vous pour le chlordécone ? Il faut une loi-cadre sur vingt ans pour sortir pour sortir de cet empoisonnement… Quelles sont vos propositions pour la réhabilitation des logements et cesser de détruire des terres agricoles ? » Il a « quand même » salué à la fin de son intervention « un budget qui progresse». « La réalité est moins joyeuse qu’on a l’impression de l’entendre dans les discours », a déclaré le député de la Réunion David Lorion au nom du groupe LR. En conclusion la rapporteure PS a déclaré : « C’est un budget en reconduction qui ne suscite pas l’enthousiasme, mais mon abstention négative. » Sans surprise, les groupes LREM, Modem, Agir ensemble, majoritaires ont permis son adoption. Le budget de la mission Outre-mer reviendra en séance plénière à partir du 4 novembre et se conclura par un vote solennel sur l'ensemble du texte le 17 novembre après les questions au Gouvernement.
FXG
Réforme statutaire et projet de loi 3D
Répondant à GPL sur le débat autour de la différenciation alors que « la réforme constitutionnelle est au point mort », Sébastien Lecornu a indiqué que « l’enjeu important pour la Réunion et la Guadeloupe est de clarification et de lisibilité de qui fait quoi entre Région et Département ». Ajoutant : « Je suis prêt à regarder ça dans le cadre du projet de loi 3D à la condition que ce soit les territoires concernés qui portent la question, au-delà du débat 73-74 et de la réforme constitutionnelle ».
Le projet de loi 3D, pour « décentralisation, différenciation et déconcentration », a pour ambition, selon le ministère de la cohésion des territoires, de transformer les relations entre l’État et les collectivités territoriales sans constituer pour autant un nouveau big bang territorial. Il devrait être présenté au Parlement dès cet automne.
Le retour d’une arlésienne : la Cité des Outre-mer
Mme Pau-Langevin a déploré l’abandon du projet de cité des Outre-mer et la fermeture de la chaîne France Ô « alors que la loi sur l’audiovisuel n’a pas été votée » et que « il n’est pas établi que les autres chaînes prennent le relais ». Elle s’est appuyée pour dire cela sur le dernier rapport du CSA qui montre un recul de la diversité depuis la fin de France Ô. Eludant la question de la télévision comme il le fait prudemment depuis son arrivée rue Oudinot, Sébastien Lecornu a indiqué être en contact avec la maire de Paris, Anne Hidalgo, pour échanger avec elle sur la cité des Outre-mer et envisager le projet infrastructurel qui reviendrait à la ville de Paris et celui de son fonctionnement à son ministère. Resterait ensuite la capacité à créer le réseau et le dynamisme... « Soit on le fait, a affirmé le ministre, mais on le fait bien, sinon on a le courage de dire qu’on ne le fait pas et on arrête d’agiter l’arlésienne... Mais je suis plutôt volontaire pour faire quelque chose puisque le besoin est là. »