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Publié par fxg

Suzanne Roussi au centre de l'écocritique coloniale

Suzanne Césaire, une mémoire empêchée

Le nom de Suzanne Roussi (1915-1966) est connu pour être celui de l’épouse d’Aimé Césaire, mais peu de gens savent qu’elle est « l’auteure d’une œuvre trop longtemps méconnue mais essentielle pour l’histoire littéraire antillaise et l’écocritique postcoloniale ». Ainsi s’exprime à son sujet la Martiniquaise Anny-Dominique Curtius, enseignante-chercheure en études francophones et en théorie culturelle à l’Université d’Iowa aux États-Unis. Alors que ses recherches sur le traumatisme, les nœuds et les lieux de mémoire l’ont portée à écrire sur la muséologie et la statuaire postcoloniales ainsi que sur la patrimonialisation de l’esclavage (elle a notamment écrit Symbioses d’une mémoire. Manifestations religieuses et littératures de la Caraïbe, L’Harmattan 2006), voilà qu’elle rencontre la cofondatrice et « pilier théorique » de la revue Tropiques (1941-1945). Suzanne Césaire y a publié plusieurs articles, mais elle est aussi l’auteure d’une pièce de théâtre (hélas perdue). Elle a également entretenu une correspondance littéraire avec nombre d’intellectuels de son temps. Suzanne Césaire. Archéologie littéraire et artistique d'une mémoire empêchée, l’ouvrage que publie chez Karthala Anny-Dominique Curtius, analyse la pensée de cette « théoricienne martiniquaise des cultures caribéennes » à travers ses écrits. Elle décrypte les marques de sa présence dans les œuvres d’André Breton, Aimé Césaire, René Étiemble et Michel Leiris, et les résonances de sa grammaire émancipatrice et humaniste chez Kamau Brathwaite, Ina Césaire, Édouard Duval Carrié, Fabienne Kanor, Léna Blou et Daniel Maximin. Anny-Dominique Curtius élabore ainsi une méthode d’archéologie littéraire et artistique pour comprendre les raisons du si long silence qui a pesé sur l’œuvre de Suzanne Césaire. Elle explore ainsi l’originalité et la modernité de sa pensée critique. L’approche comparatiste, interdisciplinaire et genrée de cet ouvrage puise dans l’esthétique qu’a privilégiée Suzanne Césaire elle-même pour façonner ses grilles conceptuelles et épistémologiques. Sa « réflexion cannibale, audacieuse et libre » s’inscrit dans ce qu’elle appelle une « lucidité totale » sur la Caraïbe.

FXG

Suzanne Césaire. Archéologie littéraire et artistique d'une mémoire empêchée. Karthala 2021, 396 pages, 30 euros.

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