Prorogation de l'état d'urgence sanitaire en Outre-mer
La prorogation de l’état d’urgence sanitaire restreinte à un seul article technique
La délégation outre-mer de l’Assemblée nationale a procédé jeudi à un échange sur le projet de loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire dans les outre-mer jusqu’au 15 novembre. Ce projet de loi doit être discuté dès mardi 7 septembre en séance publique dans le cadre d’une session extraordinaire ad hoc.
Selon le président de la délégation outre-mer, le député LREM Olivier Serva , la loi ne sera faite que d’un article unique alors que de nombreuses questions se posent aux députés d’Outre-mer : L’applicabilité du pass sanitaire en Outre-mer peut-elle être la même que dans l’Hexagone tant la couverture vaccinale est très en retard chez nous ? Economiquement, il y a des insuffisances de réponses sur le fonds de solidarité, sur l’accessibilité de certaines activités aux aides d’Etat… Les termes du débat proposé par le président Serva ne seront pourtant pas abordé le 7 septembre prochain. Manuela Kéclard-Mondésir (GDR) regrette justement que ce ne soit qu’un projet de loi technique qui « ne propose que de changer des dates au lieu de se pencher sur l’application du pass sanitaire par exemple ». Economiquement, elle aussi constate que les autoentrepreneurs que sont les marchands ambulants par exemple ont des difficultés à mobiliser les aides de l’Etat. « Je regrette que ce projet de loi ne soit qu’une régularisation technique et ne permette pas de trouver des solutions à des situations que nous vivons. »
Max Mathiasin (Modem) est revenu sur « les réticences de la population, mais aussi sur une absence d’anticipation et une imprévoyance du gouvernement sur l’ampleur de cette épidémie. » Mieux, il a dénoncé « une forme d’opacité » : « On a fait des choix, pour ne pas dire du tri. On a demandé à des infirmières de débrancher au mépris de toute éthique certains patients plus âgés pour brancher certains plus jeunes. Des personnes qui n’ont pu être acheminées par le SAMU sont décédées. Comment se fait-il que nous ayons manqué d’oxygène et que c’est seulement il y a trois jours que 300 appareils d’oxygène soient arrivé ? » Le député Mathiasin a souhaité pouvoir introduire dans ce texte un article 2 qui introduise un comité d’éthique et de suivi. « A quoi servons-nous, a-t-il demandé, quand nous n’anticipons pas, que le préfet et Mme Denux ne tiennent pas compte de nos propositions ? Nous découvrons seulement maintenant qu’une centaine de patients guadeloupéens ont expérimenté le traitement par anticorps monoclonaux depuis mars, avril avec un taux de succès de 96 %. Qui peut y avoir accès ? Comment faire ? Si nous découvrons qu’il y a de telles expérimentations, que nous, élus, ne sachions rien, comment voulez-vous que les Guadeloupéens nous fassent confiance ? »
Comorbidités et insuffisances structurelles de nos hôpitaux
Jean-Philippe Nilor (GDR)a dénoncé « le piège qui consiste à établir un lien direct entre les taux de contamination, taux de vaccination et taux de décès (…) Précisément, c’est ce qui a été recherché pour qu’on serve d’exemple de population réfractaire à la vaccination et que les chiffres démontrent qu’on le paye cash. Ceci pour assoir la pédagogie et le discours de nos gouvernants. Je ne suis ni pour ni contre ma vaccination, mais en étant honnête et n’étant pas vacciné, je ne peux pas décemment appeler à la vaccination et je ne peux pas non plus appeler décemment à la non-vaccination. » A l’unisson de la député Hélène Vainqueur-Christophe (PS) ou de Justine bénin (Modem), le Martiniquais a dénoncé « des insuffisances structurelles dans nos hôpitaux, réalité que nous dénonçons nous parlementaires depuis des décennies, et ces dénonciations n’ont été accueillies par la cécité, la surdité des gouvernements successifs de quelque bord qui soit. » Nilor a dénoncé le refus de soin avec des traitements alternatifs au profit d’un « exclusif vaccinal », la non-anticipation des besoins d’oxygène et l’ouverture « inconsidérée » du ciel, « jusqu’à neuf gros porteurs par jour » ! Le Martiniquais a alors passé en revue la question du taux de sucre (soulevée par le Canard enchaîné malgré la loi sucre de Victorin Lurel de 2014) avec ses corollaires que sont les comorbidités diabète, obésité et hypertension, celle du chlordécone et du cancer qui viennent s’ajouter au vieillissement de la population. La conséquence a été la perte de confiance dans la parole de l’Etat et l’accroissement des formes graves de la maladie… Justine Bénin (Modem) a regretté « l’élu-bashing » et la crise sanitaire (100 morts du covid la semaine passée – « notre culture du deuil est mise à mal ») qui a ébranlé la confiance de nos populations.
La députée Vainqueur est revenue sur la réponse du ministre des Outre-mer qui proposait la vaccination pour unique viatique quant aux demandes d’adaptation des aides économiques pour demander jusqu’où elle pourrait amender le projet de loi. « Je crains que ce texte, avec son article unique, en reste ainsi. », a dû concéder Olivier Serva. Il a toutefois indiqué qu’un dialogue interministériel allait s’ouvrir « dans les prochaines semaines » pour « une réétudes des conditions et des conséquences économiques de l’état d’urgence et du pass sanitaire pour les Outre-mer (…) avec une traduction budgétaire en loi de finances ou de Sécurité sociale selon nos spécificités ». Mathiasin lui a reposé la question et Serva n’a pu que renvoyer ce débat au calendrier budgétaire.
FXG
Le gouvernement est pris par l’urgence
Les taux d’incidence (nombre de cas pour 100 000 habitants) sont de 1077 en Guadeloupe, 645 en Martinique contre 180 dans l’Hexagone. Les taux d’occupation des services de réanimation sont de 577 % en Martinique et 319 % en Guadeloupe contre 45 % dans l’Hexagone. Et puis, il y a la faiblesse du taux de vaccination : 60 % de la population hexagonale a reçu deux doses et 72 % une seule injection. Ces taux de sont de 22 et 28 % aux Antilles. Voilà pourquoi le gouvernement veut prolonger l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 15 novembre prochain dans nos territoires.