La mine d'or et le Conseil constitutionnel
Des dispositions relatives à la prolongation des anciennes concessions minières perpétuelles censurées
Le Conseil constitutionnel, saisi le 6 décembre dernier par le Conseil d'État d'une QPC relative au code minier à l’initiative de l’association France nature environnement, a déclaré plusieurs articles du code minier contraire à la charte de l’environnement.
Les concessions minières initialement instituées pour une durée illimitée devaient expirer le 31 décembre 2018. Le gouvernement a autorisé leur prolongement dès lors que les gisements étaient encore exploités à cette date. C’était le cas en Guyane pour les concessions dites « Montagne d’or » et « Élysée » attribuées à la Compagnie minière de Boulanger. France nature environnement estime que ces « prolongations de droit » interdisaient la prise en compte de leurs effets sur l'environnement. Par sa décision du 18 février dernier, le Conseil constitutionnel relève que la prolongation d'une concession minière détermine notamment le cadre général et le périmètre des travaux miniers, qu’elle est ainsi susceptible de porter atteinte à l'environnement. Le Conseil constitutionnel en déduit que le législateur a méconnu, pendant cette période, les articles 1 et 3 de la Charte de l'environnement. L'article 1er de la Charte dispose : « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ». L’article 3 : « Toute personne doit prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences. » « C’est la première fois, explique Raymond Léost, administrateur et responsable du réseau juridique de FNE, que le Conseil Constitutionnel fait application des articles 1 et 3 de la Charte de l’environnement. Dix-sept ans après l’entrée en vigueur de la charte, c’est une décision vraiment majeure pour le droit de l’environnement ! »
Une jurisprudence qui vise le projet Montagne d’or
Il incombe donc au législateur et aux autorités administratives de déterminer les modalités de la mise en œuvre de ces dispositions. Cela veut dire que depuis l'entrée de vigueur de la loi sur le changement climatique qui modifie le code minier, la prolongation d'une concession doit être refusée si l'administration émet un doute sérieux sur la possibilité de procéder à l'exploitation du gisement sans porter une atteinte grave aux intérêts environnementaux. Mieux, l'administration peut imposer à l'exploitant de respecter un cahier des charges et notamment l'interdiction de certaines techniques de recherche ou d'exploitation, ces dispositions s'appliquant à toutes les demandes en cours d'instruction à cette date.
Au-delà du cas Boulanger, la décision rendue du Conseil constitutionnel pourrait également légitimer le refus de l’Etat de renouveler les concessions Montagne d’or. Jusqu’à maintenant, le tribunal administratif de Cayenne suivi par la cour administrative d’appel de Bordeaux ont jugé que le refus de l’Etat de renouveler ces concessions pour le projet Montagne d’or était illégal, malgré les annonces politiques du gouvernement depuis 2019. « Cette décision, assure Matthieu Barthas, vice-président de Guyane Nature Environnement, est de nature à mettre un point final au projet Montagne d’or grâce aux associations. C’est une excellente nouvelle historique pour la biodiversité guyanaise et on espère que cela appellera à une grande vigilance sur les futurs projets miniers. » La bataille juridique de la Montagne d’or pourrait donc bien connaître de nouveaux rebondissements.
FXG