Exploration et exploitation des grands fonds marins
Le Sénat aborde le retard français vis-à-vis de ses grands fonds marins
Un rapport sénatorial préconise la relance de la stratégie française d’exploitation des ressources minières sous-marines, avec un vrai ministère de la Mer.
Depuis le temps que la France s’enorgueillit d’avoir la deuxième zone économique exclusive (ZEE) maritime du monde grâce à ses outre-mer, rien n’est fait pour valoriser cet atout indéniable. La Norvège envisage d'accorder dès l'an prochain des licences d'exploration pour tirer parti des ressources minérales de ses grands fonds, la France, elle, temporise au risque de laisser d'autres puissances moins hésitantes creuser l'écart sur le plan technologique et s'approprier le sujet de façon difficilement contrôlable. C’est contre cela que le Sénat a réuni une mission d’information sur "L’exploration, la protection et l’exploitation des fonds marins : quelle stratégie pour la France ?", présidée par Michel Canévet et le rapporteur polynésien Téva Rohfritsch. Les deux sénateurs ont présenté leur rapport mardi à Paris. Ils formulent vingt recommandations.
Ils proposent d’abord de mettre en place une gouvernance avec un délégué interministériel aux fonds marins car le sujet concerne huit ministères compétents, les territoires d’outre-mer, le monde scientifique, économique ainsi que les ONG. Ensuite, il s’agit de rétablir un ministère de la Mer de plein exercice. Voilà pour le cadre. Les sénateurs ne veulent pas encore trancher le débat entre la question de l’exploration et celle de l’exploitation : « Prématuré en l’absence de connaissances scientifiques suffisantes ». Il s’agit donc de relancer la mise en œuvre de la stratégie sur les ressources minières, évaluer l’impact environnemental, le cadre et la faisabilité́ d’une exploitation minière durable des grands fonds marins, d’abord en zone internationale puis éventuellement dans la ZEE des collectivités d’outre-mer qui y seraient favorables. L’Autorité internationale des fonds marins, le bureau qui attribue les autorisations d’exploration dans les eaux internationales, se trouve en Jamaïque et pour l’heure, a attribué 31 autorisations. Les sénateurs voudraient conditionner toute exploitation minière à un débat parlementaire transparent ayant préalablement associé les collectivités d’outre-mer, procédé à une clarification juridique en introduisant des normes environnementales propres aux grands fonds marins. Préalablement aussi, un conseil scientifique aura éclairé la décision de politique publique notamment sur le besoin en minerais d’origine marine pour la transition énergétique, compte tenu des ressources alternatives potentielles.
Premières consultations publiques en 2028
Et cela ne va pas sans renforcement des moyens humains et financiers de l’IFREMER, tout comme la modernisation de la flotte océanique française (et militaire). Un pôle d’excellence « fonds marins » sur le modèle du pôle cyber renforcera l’offre de formation, particulièrement outre-mer.
Si la compétition fait déjà rage dans le Pacifique avec la Chine et les Etats-Unis, les sénateurs préconisent la coopération. Au plan européen, l’Allemagne et la Norvège sont les deux pays les plus avancés. L’écueil principal au développement de partenariats avec ces derniers réside dans le manque de détermination et de moyens dans la mise en œuvre de la stratégie française. « Les bassins ultramarins (qui) présentent aussi des perspectives de partenariats internationaux ne sauraient être sacrifiés sur l’autel d’un tropisme trop exclusivement européens », prennent soin de préciser les sénateurs.
Sur le papier, le rapport sénatorial envisage, si la relance de la stratégie sur les ressources minières est faite dès cette année, que les premières consultations publiques pour l’ouverture d’exploitations minières se fassent en 2028.
FXG