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Publié par fxg

Marigalanteries par Ronald Selbonne

L'anthologie d'une île

Ronald Selbonne vient de publier chez Jasor « MariGalanteries, Marie-Galante à travers les textes », une véritable anthologie consacrée à son île d’origine depuis que la grande galette est portée sur les cartes. L’auteur, par ailleurs professeur de français au lycée du Jardin d’Essai et journaliste, a déjà publié de nombreux écrits dont Albert Béville alias Paul Niger, chez Ibis rouge en 2013.

« Ma Marie-Galante... Comme une assiette renversée sur la nappe chiffonnée de la mer Caraïbe... », propose Selbonne dans son avant-propos avant de définir MariGalanteries comme « un acte fondamentalement culturel », loin des déjeuners champêtres qu’affectionnent nos élus…

Rencontre avec l’auteur à l’occasion de la présentation de son ouvrage à Paris.

Qu’a donc Marie-Galante de si singulier que vous lui consacriez cet ouvrage ?

Elle est singulière parce que c'est l'île de mon cordon ombilical ! C’est l’île que m'a donné ma mère, l’île qui m'a construit, et j'ai voulu rendre quelque part à Marie-Galante tout l'amour qu'elle m'a donné. Je prends souvent l'exemple de René Depestre, le Haïtien qui dit malgré les plus de soixante ans qu'il a passés hors de Haïti, la table du travail de son imagination est toujours sur une petite véranda de Jacmel ! Eh bien pour moi, c'est pareil ! Mon imagination, mon esprit n'ont jamais quitté les routes de mon île. J'aurais pu écrire un ouvrage traditionnel avec une écriture historique dans laquelle je raconte Marie-Galante de A à Z, Mais quand j'ai commencé à fréquenter les textes, les récolter, je les ai trouvés tellement intéressants que je me suis dit que je ne pouvais pas laisser le lecteur sans connaissance de ces textes.

Vous avez tout de même opéré un choix pour raconter l’histoire de l’île…

Aucun des grands évènements qui concerne Marie-Galante n'échappe à cette recension !

Comment est née l'idée de ce livre ?

Quand j'étais lycéen, dès que je lisais un ouvrage qui parlait de Marie-Galante, je notais le titre et les références sur un petit carnet. J'avais peut-être l'intuition que j'en ferai quelque chose… il se trouve qu'en l'an 2000 la communauté des communes de marie-galante il m'a demandé de faire un article sur Marie galante dans la littérature pour l’agenda de l'an 2000, donc j'ai écrit trois pages et là je me suis dit : tiens ! il faut que je creuse… Et un jour, je me suis réveillé, je ne sais pas pourquoi, parce qu’un esprit m'avait dérangé pendant la nuit, et j'ai décidé de commencer !

Comment avez-vous construit cette anthologie ?

J'ai qualifié cette anthologie de carnavalesque puisqu'il y a une multitude de regards différents, de la poésie, de la géographie, de l'histoire, de l'économie, de la géologie et de l'anthropologie ! Cette anthologie est en même temps une autobiographie parce que je me mets beaucoup dans cet ouvrage et c'est aussi un essai. C'est donc un genre tout à fait hybride !

Quels objectifs poursuivez-vous ?

Je voulais que tous les auteurs marie-galantais ayant écrit Sur Marie-Galante soient recensés, quelle que soit la qualité littéraire de leurs textes. J’estime que nous sommes d'une histoire trop jeune pour me permettre de laisser comme ça de côté, pour des raisons un peu universitaires de qualité littéraire des textes qui ont au moins un intérêt mémoriel. Mon deuxième objectif était de ne rater aucun grand événement Et c'est ce que je pense que j'ai réussi à faire !

Avec quel auteur commencez-vous l’histoire ?

Ça commence avec Christophe Colomb et son médecin, Diego Álvarez Chanca, en 1493 et ça continue jusqu'en 2020 avec mes propres textes. Entre les deux, on va retrouver Max Rippon, Guy Tirolien, Sonny Rupaire, Maryse Condé, Gisèle Pineau, Willy Alante-Lima… Il y a plus de 170 titres référencés dans cet ouvrage et une cinquantaine d’auteurs marie-galantais.

N’avez-vous pas été submergé par toutes ces références ?

Quand j'ai commencé à récolter les textes, je prenais de grands morceaux et je me suis vite retrouvé submergé effectivement et j'ai dû en enlever. Aussi j'ai établi à la fin de l'ouvrage une bibliographie très exhaustive dans laquelle se trouvent tous les auteurs, y compris ceux que je n'ai pas pu citer dans le corps même de l'anthologie.

Est-ce un travail d’universitaire ou un travail d’amoureux ?

C’est un travail d’universitaire amoureux ou d’amoureux universitaire ! Ça m'a pris pratiquement près de cinq ans, parce qu'il a fallu que je fasse des allées et venues entre la Bibliothèque nationale de France, les archives de l'outre-mer à Aix en Provence, les archives départementales en Guadeloupe… J'ai commandé pas mal de livres sur internet, je les ai lus, j'ai choisi les extraits, je les ai disposés de façon à ce qu'ils racontent une histoire… Ça m'a demandé de l'énergie, du temps et de l'argent ! Mais quand on aime on ne compte pas.

Comment qualifier vous Marie-Galante aujourd’hui ?

Les gens qui la visitent disent, même si je n'aime pas trop cette expression, que c'est l'île du temps suspendu, La Guadeloupe il y a cinquante ans… C'est un peu vrai. L’étroitesse de l'île fait que l’on a encore — et c’est relatif car les temps changent — le sentiment d'être protégé de la violence que l'on trouve en Guadeloupe. Il y a encore une certaine convivialité entre les gens parce que tout le monde se connaît. D'un point de vue ethnologique, Marie-Galante est beaucoup moins métissée que la Guadeloupe. En 1946, le dernier gouverneur de la Guadeloupe coloniale, a envoyé une note au gouvernement dans laquelle il disait à propos de Marie-Galante que c’était « un morceau d’Afrique » Et qu'il convenait de la diriger comme on dirigeait nos colonies africaines ! Cette histoire de temps suspendu ne me plait pas trop parce que je n'ai pas tellement envie qu'on nous considère comme une sorte de réserve ethnologique, qui de plus nous empêcherait de nous plonger dans la modernité, qui nous empêcherait de prendre des chemins de développement qui, nécessairement, vont choquer la tradition.

Propos recueillis par FXG

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