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Publié par fxg

Thierry Dol s'était rendu à l'Elysée le 18 mai dernier

Thierry Dol s'était rendu à l'Elysée le 18 mai dernier

L'État a-t-il été négligent ?

Libéré depuis plus de deux ans, le Martiniquais Thierry Dol n'a toujours pas trouvé d'accord avec le fonds de garantie des victimes. Pourtant, les décisions de l'État durant ses années de détention semblent lui avoir été préjudiciables, ainsi qu'aux autres otages. Retour sur la chronologie des négociations.

À peine Thierry Dol, Daniel et Françoise Larribe, Marc Ferret, Pierre Legrand, Jean-Claude Rakotoarilalao et Alex Ahonado étaient-ils enlevés le 16 septembre 2010, que les négociations pour leur libération ont commencé. D'un côté, les employeurs des otages, les sociétés VINCI et AREVA et l'Etat, actionnaire d'AREVA, et de l'autre, AQMI. Jean-Marc Gadoulet, ancien colonel du service Action de la Direction Générale des Services Extérieurs (DGSE), est désigné pour mener ces négociations.

Il rencontre alors Abou Zeid, chef d’AQMI pour la zone du sahel, à plusieurs reprises. Ainsi, en janvier 2011, Abou Zeid transmet à Marc Ferret une photo de son fils qui est né en novembre 2010. Le 24 février 2011, Jean-Marc Gadoulet réussit à faire libérer Françoise Larribe, Jean-Claude Rakotoarilalao et Alex Ahonado.

Par la suite, il s’acharne à faire libérer les autres otages, jusqu’à se faire tirer dessus alors qu’il s’apprête à rencontrer Abou Zeid une nouvelle fois fin 2011. Le 27 avril de cette même année, une vidéo est diffusée par la société de production « Al Andalus » sur le forum « Shomoukh al islam ». Elle met en scène les quatre otages français et comporte une séquence intitulée « Messages d’otages français au président de la France Sarkozy ». Comme dans chacune des vidéos, les terroristes demandent aux otages de s’adresser au gouvernement français. Le message est clair : c’est à l’Etat français d’agir pour leur libération.

Le 12 janvier 2012, AQMI émet un communiqué menaçant la France en cas d’intervention militaire au Mali. La mort imminente des ressortissants français détenus est clairement formulée. Le 1er avril 2012, par une lettre signée et marquée de son empreinte digitale rouge, Abou Zeid propose un prix pour la rançon. Quelques jours plus tard, le terroriste communique une deuxième proposition.

Processus de libération enlisé ?

Jean-Marc Gadoulet est alors pré positionné au Niger et la logistique est mise en place pour intervenir. Mais pour une opération de ce type, il faut l’accord du preneur d’otages, des sociétés concernées et aussi celui, indispensable, du gouvernement.

Or, en France, le 22 avril a lieu premier tour de l’élection présidentielle... Le processus de libération des otages s’enlise alors qu’Abou Zeid fait libérer une ressortissante suisse le 24 avril !

En mai 2012, les quatre otages sont réunis durant trois semaines. Ils comprennent qu’ils auraient dus être libérés, mais que les négociations ont échoué. Comment expliquer un tel échec ? La France a un nouveau président, des annonces électorales à mettre en œuvre : les otages ne sont plus la priorité ! Une telle désillusion interviendra trois fois puisque les otages seront de nouveau réunis tous les quatre à la fin de l’année 2012 et au printemps 2013.

Les mois s’écoulent... De son repaire du massif des Ifoghas, « Abou Zeid, agacé, commence à perdre patience et fait savoir, en août, qu’il n’a plus aucun contact avec les Français », se rappelle un négociateur touareg. Le 10 août 2012, dans une vidéo, l’organisation terroriste exhorte le gouvernement français à reprendre les négociations et à trouver un accord en vue d’une libération.

Le 19 octobre 2012, le porte-parole d’AQMI, Abdallah Al Chinguetti fait des déclarations à des journalistes de France 2. Il indique que « les négociations pour la libération des otages détenus par l’AQMI sont bloquées à cause de la partie française. Ces négociations directes et sans intermédiaire avec la France ont commencé après l’enlèvement, l’arrestation et la capture de la première vague d’otages. Un des dossiers a été résolu mais comme je vous l’ai dit, ces négociations ont été interrompues par les Français. Le blocage est du au manque de sérieux de la partie française qui n’a pas donné suite à nos réclamations ».

Peu après, sous la pression des familles et des sociétés, l’Etat fait enfin une proposition pour les quatre otages. Mais cette dernière est faite à minima. Abou Zeid refuse catégoriquement et fait une contre-proposition. « C’était trop, bien sûr ! Mais c’était sa façon à lui de dire : revenez discuter avec moi », explique un intermédiaire touareg.

La force ou la discussion

Les intermédiaires touaregs quittent le massif des Ifoghas, las d’attendre une réponse qui ne vient pas. A la fin de l’année 2012, Jean-Marc Gadoulet sait qu’Abou Zeid est prêt à transiger, mais l’Etat français ne lui en donne pas les moyens. Et, alors même que l’Etat sait que Jean-Marc Gadoulet est le mieux placé pour faire libérer les otages, il est écarté des négociations par le nouveau président de la République, François Hollande.

Des rumeurs pèsent alors sur cet intermédiaire et le gouvernement français veut soigner son image. Mais en faisant cela, il sait très bien que le processus des négociations va être considérablement retardé. Dans le même temps, la France évoque ouvertement une intervention au Mali.

L’opération « Serval », est lancée en janvier 2013, coupant tout contact avec les ravisseurs de Thierry Dol et de ses camarades. Abou Zeid est tué par l’armée française en mars 2013 : il est remplacé par Saïd Abou Moughatil.

La décision de la France d’intervenir au Mali lui est propre, mais elle ne semble pas avoir prévu d'opération de sauvetage. Marc Ferret se souvient de tirs et bombardements de l’armée française très proches de leur lieu de détention...

Le 24 juin 2013, François Hollande déclare que « Paris est toujours à la recherche de contacts pour les faire libérer ». Cette déclaration est en contradiction avec la désignation d'Abou Moughatil après la mort d’Abou Zeid.

Une nouvelle vidéo, également adressée à l’Etat français, est diffusée. Une fois de plus, les ravisseurs somment la France d’intervenir. C'est dans cette vidéo que Thierry Dol rappelle la maladie cardiaque dont il souffre et qui nécessite l’accès à des soins quotidiens. Le 16 juillet 2013, l’Elysée confirme l’assassinat de Philippe Verdon par AQMI. À ce moment là, le gouvernement est parfaitement conscient que son inaction est susceptible d’entrainer la mort de ses ressortissants, finalement libérés le 29 octobre 2013.

FXG, à Paris

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