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Publié par fxg

Un an après l’inauguration de son nouveau siège à Marseille, la 3e compagnie mondiale de transport maritime, a ouvert son QG à l'agence de presse GHM.
-CMA CGM assure le lien entre l'Hexagone et les Antilles depuis 1862
-Elle détient 47 % de parts sur le marché antillais où sont présents 7 compagnies
-Faute de développement suffisant des ports antillais et guyanais, CMA CGM pourrait aller transborder à Trinidad ou Saint-Domingue.
« La part du fret dans le prix des produits, c’est peanuts ! »
Tour-CMA-CGM-vue-de-face---Philippe-Ruault.jpgLe siège de la CMA CGM, une œuvre architecturale de Zaha Hadid, inaugurée en janvier 2011, élève fièrement ses 32 étages dans le ciel marseillais, à 148 mètres de hauteur, soit 1 mètre en-dessous du socle de calcaire sur lequel repose Notre-Dame de la Garde, la Bonne mère. Au 21e étage, avec une vue imprenable sur la rade, se trouve la direction des lignes de la zone Antilles. Elle rassemble, sous l’autorité de Xavier Eiglier, une dizaine d’opérationnels, autant de commerciaux et une poignée de contrôleurs de gestion. Ensemble, ils gèrent les 7 lignes qui desservent les Caraïbes. Il y a d’abord, les 4 PCRF (porte containers réfrigérés frigorifiés) dédiés uniquement aux Antilles françaises depuis Dunkerque. D’une capacité de 2260 EVP (containers équivalents 20 pieds) et 500 prises frigo, ils sont la nourrice entre les Antilles et l’Hexagone. Ils arrivent avec de quoi remplir les supermarchés et autres enseignes de bricolage, meubles, etc… Ils repartent avec de la banane (35 % du fret en sortie) et du rhum. Mais comme aime bien le rappeler Xavier Eiglier, « tout ne vient pas du Havre ! » Cette ligne représente tout de même le plus fort chiffre d’affaires de la direction Caraïbe. Une autre ligne, la Medcaribe permet à 6 cargos (d’une capacité de 2500 EVP à partir de cette année) de relier l’Italie, l’Espagne, le sud de la France, le Maroc aux Antilles françaises et au-delà, Trinidad, le Venezuela, la Colombie, Panama et Saint-Domingue. Cette route permet, grâce au hub de Tanger, des transbordements de marchandises en provenance d’Asie sans passer par le Havre, ce qui économise 7 jours de mer et autant de carburant. C’est par cette ligne qu’est importée en France la banane de Saint-Domingue pour le compte de l’UGPBan.
Une troisième ligne a été spécialement édifiée pour assurer une desserte directe entre la métropole et Guyane française avec six navires de 1 700 EVP spécialement étudiés pour pouvoir escaler à Degrad des cannes. Deux sont à Marfret, 4 à CMA CGM. Ils sont exploités en vessels sharing agrement (VSA), un accord de partage de navire. Cette ligne relie le Havre à la Guyane, Saint-Martin, Trinidad, Fortaleza et Belem.
7 lignes en Caraïbe
CMA-CGM-Fort-St-Louis---Copyright-CMA-CGM.jpgUne 4e ligne dépend encore de cette direction Caraïbe quoiqu’elle ne quitte pas l’Atlantique Est. Elle est constituée de feeders (petits cargos) qui chargent leur fret à Bordeaux, Montoir ou Brest avant de rejoindre le Havre où cette marchandise est transbordée sur les PCRF qui rejoignent les Antilles françaises.
Une 5e ligne, la Guyanas, est travaillée par deux navires de 700 EVP. Elle relie les Antilles françaises aux Guyanes via Trinidad. Elle permet d’assurer un lien commercial entre la Guyane et les Antilles françaises, de ramener la banane du Suriname en Guadeloupe où elle est chargée sur les PCRF et, enfin, elle joue un rôle de petit transporteur (feeder) pour l’export dans ce bassin régional.
Une 6e ligne, le Golfe bridge est desservie par 4 navires de 2500 EVP. Elle va de New-Orléans à la Guaira, Carthagène et Kingstone via Houston, Vera Cruz et Alta Mira. Cette ligne connectée permet de drainer les marchandises en sortie des USA et du Mexique vers Kingstone d’où elles peuvent partir vers l’Asie, de même qu’elle permet les importations antillaises du Mexique ou de Carthagène.
Enfin, CMA CGM exploite une 7e ligne dans la zone avec un navire roulier, le Cap Canaille. Il dessert depuis la Guadeloupe les îles Leewards (Saint-Martin, Saint-Barth, San Juan). Mais bien d’autres bateaux de CMA CGM transitent dans cette région sans être supervisés par la direction Caraïbe de Marseille. C’est le cas des cargos (2000 EVP) qui partent de la zone franche de Manaus au Brésil pour gagner Panama via Belem et Trinidad, mais aussi ceux qui assurent la ligne tour du monde (Europe du nord, côte est des Etats-Unis, Kingstone, Panama, Papeete, Nouméa, Australie, Nouvelle-Zélande, Panama, Kingstone, Etats-Unis, Europe. Et encore la ligne Brésil, Trinidad, côte est des Etats-Unis et celle qui relie la côte est et la côte ouest des Etats-Unis via Panama.
FXG (agence de presse GHM)


Quelle concurrence aux Antilles ?
Moller-Maersk.jpgCMA CGM n’est pas en situation de monopole aux Antilles. Elle détient 47 % de parts de marché et se trouve en concurrence frontale avec Maersk et Marfret, mais aussi de petites compagnies qui complètent l’offre. Elles sont Ferron, Seatrade, Geest et Soreidom. « On vend de l’espace à nos concurrents », explique Xavier Eiglier. Ainsi Maersk, Marfret et Ferron peuvent emprunter les navires de CMA. Et si le Havre reste un passage obligatoire, la SOREIDOM qui exploite un navire conventionnel (du vrac en cale) lui préfère La Rochelle. Sa place de leader, CMA CGM la doit à son ancienneté dans la zone (150 ans), à son offre de service dédié à jour fixe hebdo, et à son offre de service global toute origine, toute destination. Depuis 2008, selon une étude de l’autorité de la concurrence, les taux de fret ont chuté de 22 %, notamment avec l’arrivée de Seatrade, « et ce malgré la hausse des cours du pétrole ! », souligne Xavier Eiglier. La tonne de pétrole coûtait en moyenne 650 $ en 2011. Ce qui fait dire à l’intéressé : « La part du fret dans le prix des produits, c’est peanuts ! »


Les infrastructures portuaires
EIGLIER-Xavier.jpg« Si la Guadeloupe n’améliore pas le niveau de son tirant d’eau, à long terme, on devra transborder en Martinique, Trinidad ou Saint-Domingue », prévient Xavier Eiglier qui insiste sur l’importance cruciale de développer les infrastructures portuaires.
A Degrad des cannes (Guyane), le quai n°1 a été entièrement refait, malheureusement il n’est pas exploitable car, aussitôt après sa remise à niveau, on s’est aperçu qu’il y avait une épave engloutie le long du nouveau quai, mais surtout que le fond est un socle rocheux qu’il faudrait dynamiter sans abîmer le quai… Selon Xavier Eiglier, cela nécessite au moins trois mois de délai. Après quoi il faudra s’attaquer aux quais n°2 et 3 qui présentent de vastes zones menaçant de s’effondrer…
Le port de Fort-de-France a un projet d’extension pour gagner un poste à quai supplémentaire et de l’espace de stockage pour les containers. « Il manque un poste additionnel, explique Xavier Eiglier, pour pouvoir faire travailler un deuxième bateau en même temps. »
Jarry.jpgLe terminal container de Jarry dispose d’assez de postes à quai mais il y a un problème de tirant d’eau. Un navire de CMA CGM s’est échoué récemment à l’entrée du chenal. Le port a donc lancé un appel à projet en juin 2011 auquel CMA CGM a répondu en septembre dernier. « On a été les seuls à répondre, indique Xavier Eiglier, mais on était un peu hors sujet car on n’a pas suivi le projet initial… » Les autorités portuaires de la Guadeloupe ont axé leur projet sur l’approfondissement du chenal et l’augmentation des surfaces de stockage pour drainer plus de volume en transbordement. « Notre proposition représente un coût 50 % moins élevé que celui évalué par le port. »
CMA CGM a besoin d’un port de transbordement, voire deux, dans l’Est de la Caraïbe car le hub de Kingstone ne sera pas suffisant pour les lignes qui ne vont pas jusque-là, selon M. Eiglier. Et là, les concurrents ne manquent pas : Port of Spain, mais aussi, La Guaira au Venezuela. « Notre offre n’est pas totalement hors des clous… Mais leur projet à 600 millions € est ingérable et inexploitable. Nous on propose de draguer à 14 mètres de  profondeur, mais sur une largeur de 50 mètres, sinon, ça s’effondrera… » L’idée étant de pouvoir accoster avec un cargo de 8 000 EVP mais aussi d’enrichir la desserte à l’export et à l’import. En 2011, CMA CGM a ouvert une nouvelle ligne entre Ponte-à-Pitre et New York et, en 2012, elle ouvrira une connexion directe entre Fort-de-France et le Costa Rica.
L’activité aux Antilles, en volumétrie, était inférieure en 2011 à ce qu’elle était en 2010. Les chiffres 2009 indiquent que le marché est de 100 à 110 000 EVP par an pour les deux îles. En comparaison, le marché guyanais est à 25 000 EVP. 300 personnes travaillent directement pour les Antilles dont 200 sur place.


CMA CGM dans les autres outre-mer
Kor FakanA la Réunion, CMA CGM a une agence mais si elle opère une rotation hebdomadaire, elle n’assure plus de desserte en directe. Les marchandises arrivent d’Europe, Amérique ou Asie sur de gros porteurs (5500 EVP) à Khor Fakan aux Emirats arabes unis avant d’être transbordés sur de plus petits (1700 EVP) qui font office de feeders. Ce transbordement a permis de faire chuter le taux de fret à la Réunion. « Nos clients antillais ou guyanais n’acceptent pas l’idée d’avoir un service en transbordement depuis la métropole », note le vice-président en charge de la région Antilles Guyane.
Papette et Nouméa sont desservies tous les 14 jours. Les marchandises arrivent de l’Europe du nord, via la côte est des Etats-Unis, la Caraïbe et Panama avant que les navires ne poursuivent leur route vers l’Australie et la Nouvelle-Zélande. « Ce marché ne se justifie que grâce au fret pour les Etats-Unis, l’Australie et la Nouvelle-Zélande », explique Luc Portier, directeur des études au sein du siège à Marseille. Aucune marchandise n’est exportée de Papeete, ce qui n’est pas le cas de la Nouvelle-Calédonie qui exporte son nickel en container.
La Polynésie, la Nouvelle-Calédonie, mais aussi la Réunion importent de plus en plus de produits en Chine. Une situation bien différente de celle qui prédomine aux Antilles alors que l’existence de lignes maritimes l’autorise.


La société CMA CGMtour CMA CGM
CMA CGM, la compagnie maritime qui opère notamment aux Antilles et en Guyane, est aujourd’hui le 3e armateur mondial derrière le Danois Maersk et le Suisse MSC. Elle emploie 17 000 personnes, réparties dans 650 bureaux à travers la planète, 400 ports d’escale, 29 terminaux de manutention, et 6 hubs qui lui permettent d’offrir un service global mondial (Le Havre, Malte, Tanger, Khor Fakan, Port Kelong et Kingstone) pour 170 lignes régulières. Elle exploite 390 navires dont 90 en propriété et détient à elle toute seule 8.5 % de la capacité du transport maritime mondial. Jacques Saadé est à l’origine de cette réussite industrielle. Arrivé du Liban en guerre en 1978, il s’installe à Marseille et se lance avec trois personnes et un unique bateau qu’il affrète mais ne lui appartient pas (d’où le nom, compagnie maritime d’affrètement). En 1986, il ouvre la première ligne Europe Asie ; en 1992, c’est le premier bureau en Chine. Deux ans plus tard, CMA, est devenu le 20e armateur. En 1999, le processus de reprise de la CGM (enclenché en 1995) est achevé. La flotte comporte alors 78 navires. En 2003, CMA CGM est devenu le 5e armateur mondial avec 153 cargos. La croissance continue avec l’acquisition de Delmas en 2006 et la livraison, en 2009, du premier super cargo Christophe Colomb d’une capacité de 13 800 équivalent containers équivalents 20 pieds (EVP). En décembre dernier, CMA CGM signe un accord de partenariat avec sur l’Asie et l’Amérique latine avec MSC. Le chiffre d’affaires de la compagnie en 2010 s’établissait à 14.3 milliards de $ et environ 15 milliards en 2011. La compagnie a fait 1 milliard de perte en 2009, mais a fait 2 milliards de bénéfice en 2010 et devrait être à l’équilibre en 2011. Rodolphe Saadé, patron opérationnel, a d’ores et déjà commencé un plan d’économie de 400 millions de $. La croissance de CMA CGM progresse deux fois plus vite que celle du marché. Elle a transporté 1.9 millions EVP en 2001 pour 10 millions en 2011. Quant au trafic de containers, il a cru de 459 % en 10 ans chez CMA CGM contre 118 % pour l’ensemble du marché.


Le 150aire
500px-Louisianne-Lebreton.jpgLe 14 avril 1862  le Louisiane (tableau ci-contre) quitte Saint-Nazaire pour Fort-de-France où il arrive le 28 avril. C’est le début du service régulier par les 4 navires Louisiane, Floride, Tampico et Vera Cruz (renommés Martinique et Guadeloupe  des la fin de l’expédition au Mexique en 1867). Mais bien sûr, de nombreux autres navires de charge et paquebots (Impératrice Eugénie, par exemple) feront le voyage pour accompagner la logistique de la flotte proprement militaire. En 1861, la France de Napoléon III a décidé d’ouvrir une ligne France - Antilles - Mexique et de faire de Fort-de-France le port relais pour l’expédition militaire au Mexique où l’armée débarque ses premières troupes dès janvier 1862 (elles repartiront  en avril 1867).
1862 voit donc l’installation de la Transat (elle-même créée sous le nom de CGM en 1855 par les Frères Pereire) aux Antilles. Un accord est signé avec la colonie au terme duquel deux quais sont construits et les terres pleins « concédés » (la fameuse concession rendue volontairement à la CCIM en 1985).
Sources : Jean-Louis Saulnier et les ouvrages « La guerre du Mexique » d’Alain Goutman (Ed Perrin) et « La Martinique, base navale dans le rêve mexicain de Napoléon III » de Sabine Andrivon-Milton (Ed L’Harmattan)

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T
<br /> Vu des antilles que l'import soit plus cher qu'en métropole boosterait la culture locale, ce qui lui permetterait de rester dans ses us et coutumes. Le prix des "pommes France" est protecteur de<br /> la culture antillaise.<br />
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