L'offensive du Pr. Belpomme
Chlordécone : le rapport qui fait scandale
Mardi matin, à l’Assemblée nationale, le Pr. Dominique Belpomme, entouré du Pr. Reiss, et du président de l’association Pour une Martinique autrement (PUMA), invité de Jeanny Marc, Christiane Taubira, Serge Létchimy, Victorin Lurel et Louis-Jospeh Manscour, députés des Antilles et de la Guyane, a présenté son rapport de 50 pages sur les effets liés à la pollution au chlordécone. Le Pr. Belpomme est cancérologue, professeur des universités et médecin hospitalier à l’hôpital européen Georges Pompidou. Il affirme que le chlordécone, utilisé pendant vingt ans en Guadeloupe et Martinique, pour éliminer le charençon des bananeraie est un CMR, soit un cancérigène, mutagène et/ou reprotoxique ! Selon ce « rapport d’exrpertise et d’audit concernant la pollution par les pesticides en Martinique. Conséquences agrobiologiques, alimentaires et sanitaire et proposition d’un plan de sauvegarde en cinq points », les cancers du sein et de la prostate sont en nette augmentation aux Antilles. En cause, avance le professeur, le chlordécone qui passe dans les eaux de boissons, les poissons et crustacés et les légumes racines
"Le chlordécone au Kärcher(R)"
« Près d’un homme sur deux présenterait le risque d’être atteint par un cancer de la prostate. Un lien causal avec le chlordécone n’est pas établi, mais il est fortement probable que la pollution chimique engendrée par les nombreux pesticides utilisés soit en cause. A cela s’ajoute une possible augmentation des malformations congénitales et une baisse de natalité, probablement elles aussi liées aux pesticides. » Un tableau alarmant si ce n’est que tout ceci n’est que « probable » de l’aveu même du professeur. Le secrétaire d’Etat à l’Outre-mer, Christian Estrosi a déclaré : « Ce rapport apporte un éclairage mais il ne garantit rien. » Avant de lâcher : « On ne va pas régler la présence du chlordécone dans les sous-sols à coup de Karcher ! »
Basé sur les travaux d’une mission composée de scientifiques qui se sont rendus en Martinique en mai et juin 2007, le rapport propose d’approfondir la connaissance des conséquences écologiques et sanitaires de la pollution par les pesticides, une étude détaillée de la biologie des sols, la recherche à l’origine des causes de l’augmentation des cancers, l’analyse des méfaits du paraquat et enfin la recherche de mesures techniques de dépollution. Finalement le rapport n’affirme rien, mais soulève la question du principe de précaution et, finalement, offre ses services à la future commission d’enquête parlementaire.
Trois questions à Michèle Alliot-Marie, ministre de l'Intérieur, de l'Outre-mer et des Collectivités locales
Le rapport sur la situation sanitaire aux Antilles du Pr Belpomme est très alarmiste. Faut-il le prendre au pied de la lettre ?
Tout d’abord je veux assurer les Antillais de ma détermination à ce que toutes les réponses soient apportées en totale transparence aux questions qu’ils peuvent se poser quant aux effets sur leur santé du Chlordecone.
J’ai une seule ligne de conduite : la transparence.
Le rapport que vient de présenter le professeur Belpomme en tant que président de l’Association pour la Recherche Thérapeutique Anti Cancéreuse expose une situation qu’il considère préoccupante. Cependant comme le reconnait lui-même ce professeur dans son rapport, aucune étude ou preuve épidémiologique ne vient aujourd’hui établir de lien entre le taux de chlordécone et le développement de cancers.
Des études épidémiologiques sont en cours. Je souhaite que leurs résultats soient rendus publics.
Il y a deux ans, les députés n'ont obtenu de la commission des affaires économiques qu'une mission d'information sur le chlordécone, cette fois, votre secrétaire d'Etat se dit partant pour une commission d'enquête. Comment expliquez ce changement d'attitude ?
Je vous ai dit que j’étais pour la transparence. Dans mes précédentes fonctions je l’ai prouvé sur de nombreux sujets. Je suis donc favorable à la constitution d’une commission d’enquête parlementaire, dont je souhaite qu’elle fasse toute la lumière sur le passé et dans la mesure du possible pour l’avenir.
A partir de quand avez-vous considéré la question du Chlordécone comme une question vitale de santé publique ?
Ce sujet a fait l’objet d’un suivi régulier ces dernières années. J’ai réuni lundi Roselyne Bachelot, ministre de la santé, les ministères de l’écologie, du développement et de l’aménagement durable et de l’agriculture et de la pêche ainsi que le secrétariat d’Etat à l'Outre-mer pour faire le point. Christian Estrosi, qui sera dès aujourd’hui aux Antilles, sera vigilant et attentif à l’ensemble des questions que se posent légitimement les Antillais. Je ferai un point avec lui dès son retour.
Que savez-vous de la pollution des pesticides de la banane ?
Stéphane, douanier, Paris
J’en ai entendu parler ce matin dans les journaux, mais je n’ai pas trop eu le temps d’y réfléchir… Et ça fait quoi ? Sur les bananes ?
Leslie, photographe, Paris
Je ne savais pas que le pesticide traversait la peau des bananes. Si ça passe vraiment par la peau, c’est dommage car ce sont les meilleures bananes. C’est un fruit naturellement emballé par la nature, alors si la nature de protège plus…
Emma, agent immobilier, Paris
Ma sœur m’a fait part du fait qu’il y avait des gens qui mouraient à cause des pesticides utilisés en trop grande quantités avec les bananes. S’il y a des retombées chez les gens, il y en a avec les bananes. Maintenant les aliments ne sont plus sûrs.
Jacques Gillot demande qu’un atelier du Grenelle de l’Environnement soit consacré, en Guadeloupe, à la pollution des sols antillais
Le sénateur Jacques Gillot a demandé par courrier au ministre de l’Ecologie, du Développement et de l’Aménagement durables, Jean-Louis Borloo, que se tienne en Guadeloupe un atelier consacré spécifiquement à la pollution des sols antillais. La publication du rapport du professeur Dominique Belpomme sur la pollution des sols après un audit réalisé en Martinique a, selon le sénateur Jacques Gillot, « remis en lumière au plan national » les effets néfastes de l’utilisation du chlordécone et du paraquat dans les sols antillais. Jacques Gillot reprend à son compte l'alarmisme du Pr. Belpomme et parle de « catastrophe écologique et sanitaire qui ne saurait être absente du Grenelle de l’Environnement ». Le sénateur espère que compte tenu du souhait de transparence affiché par le Gouvernement, la réponse pourra être positive. Elle permettra de juger de la conformité des intentions aux actes.