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Publié par fxg

Va vis, Norma Claire danse en AvignonElle semble prendre vie, naître, le corps est plié et mettra une vingtaine de minutes à éclore, dans les cris, les gémissements, la douleur. Vingt minutes pour passer d’un bord à l’autre, de cour à jardin, du tabouret africain au tabouret de Guyane. Ansoumana Kanté arrive et entame une danse timide avec elle. En fait un cours... « Je fais un pas de danse africaine avec Norma Claire. Comme elle a été formée avec un grand danseur de l’Afrique, elle m’a demandé de faire le maître qui lui apprend à danser. » Ansoumana Kandé joue aussi du djembé et du bongoma de Guinée. Avec lui, à la cora à 21 cordes, Djélimoussa Condé qui a commencé à travailler avec Norma en 1995 : «  La mélodie qui accompagne la danse et les pas est dans toutes ses inspirations. Nous on fait les recherches musicalement et on s’adapte en fonction de son corps sur scène. » Comme dans le spectacle Ti péyi loin loin, inspiré du roman de Gisèle Pinault, L’exil selon Julia qui traite du déracinement et de la transmission de la culture créole entre une grand-mère et sa petite-fille, Norma Claire revient sur ces thématiques avec la symbolique de la déportation et de la traite, dans une relation mère-fils, mais c’est pour elle l’aboutissement d’une quête, l’aboutissement d’une affirmation identitaire. Après son solo de danse afro-contemporaine, son fils Nelson Ewandé vient auprès d’elle signifier  la rencontre de la danse hip hop et de la danse afro-créole. Les danseurs dialoguent, puis Nelson s’en va vivre sa vie et Norma Claire va et vit.
Le spectacle a été joué en Martinique lors de la biennale de la danse en Martinique, en avril dernier et sera joué à Cayenne, Kourou et Saint-Laurent dans la première quinzaine du mois de novembre, puis au Mal et en janvier 2009 au théâtre du Lierre, à Paris. Norma Claire espère aussi pouvoir se produire en Guadeloupe en 2009.

Interview. Norman Claire, chorégraphe
« Direction intérieure »
Avec sur scène, un tabouret africain et un autre guyanais, c’est un spectacle sur la transmission ?
Une transmission, une poursuite. C’est un tabouret africain, au départ, les premiers signes d’enracinement qui sont liés à l’Afrique, pour une part et de ce tabouret, je raconte les souffrances et les épreuves. Je suis poings et mains liés... Et puis pour évoquer l’autre rive, rot bo, c’est le tabouret de la Guyane, l’un des pays où s’installe ce peuple créole. Dans la musique, il y a de la créolité, de la musique classique, du Mahler, parce qu’il est question des métissages. La musique créole est en train de naître et la musique classique émane du vieux monde, c’est ce qui nous constitue, qui nous brise et qui nous fait être. Ces ambivalences de naître dans le déni et la souffrance et dans l’affirmation. C’est tout cela qui est symbolisé par la présence de ces deux tabourets.
Après la transmission géographique, il y a la transmission filiale. N’est-ce pas votre fils qui danse du hip hop avec vous ? Vous lui massez la tête comme seule une mère peut le faire…
Je fais comme quand les enfants sont petits… On ne les masse pas si fort, mais d’une façon qu’il reçoive quelque chose, un message inconscient et en même temps, ça définit son corps. On donne de la forme à son corps. Quand on malaxe la tête, c’est pour l’arrondir comme en Afrique ou en Inde. On masse jusqu’à temps que la tête revienne bien ronde et en même temps on fait passer à l’enfant des messages. Quand je danse avec Nelson, je lui passe par le mouvement, par la main, par le bras et il reprend cette vague comme parade à lui, mais plus la mienne, plus la même. Et ça va rentrer dans sa danse.
Nelson Ewandé est un smufer…
Les smurfers sont des danseurs qui font beaucoup de vagues. Il y a des choses de cette gestuelle qui rappellent quelque chose que j’aurais pu lui transmettre. Quand il vit son solo, il vit son histoire. Il est sur son territoire et lui-même affirme ce qu’il est dans sa danse et sa différence avec moi-même. Je suis là, à veiller, mais je ne suis pratiquement plus là. Et il s’en va. Il peut me laisser la place. J’aurais pu la lui laisser mais Va, vis, ça me concerne particulièrement.
C’est votre bilan ?
Au moment où on a passé toutes les épreuves identitaires, les épreuves personnelles, les passations de mère à enfant et au moment où on a un âge où on a besoin de s’apaiser, la trajectoire, ce solo, c’est chercher des directions, en finir avec les pertes de temps et comprendre que la direction, c’est vers l’intérieur.
A la fin du spectacle, vous dansez un transe, c’est que vous n’avez plus besoin des autres ?
C’est plutôt se ressourcer à l’intérieur de ses vibrations, avec sa vibration intérieure. Et c’est un souffle, ce n’est plus un râle… Le spectacle commence par un râle, par la mort en fait. Nous sommes constitués dans une ambivalence mortifère, nous les Créoles. Ensuite ça finit par de l’inspiration et de l’expiration, du sourire et de la respiration tranquille. Nous sommes invités à vivre, à respirer dans la douceur du temps.

Nelson Ewandé, danseur et fils de Norma Claire
« Une chance et un privilège »
Comment fait-on pour danser professionnellement avec sa mère ?
On la suit ! On la suit parce que c’est une grande professionnelle. Pouvoir bosser avec elle sur une scène, c’est une chance et un privilège.
Vous avez deux approches différentes de la danse… Comment les danses se confrontent-elles ?
Je vois plus ma mère comme une danseuse afro que contemporaine. La danse africaine est plus proche de la danse hip hop au niveau des pieds et du rapport au sol. La danse contemporaine qu’elle introduit, par son bougé, son mouvement rejoint aussi le hip hop, donc ça se fait simplement. Et puis je connais sa danse depuis tout petit…
C’est un spectacle sur la transmission. Que vous a transmis votre mère de la Guyane ?
Les valeurs de la famille, de la foi mais aussi de la danse et de l’amour de la musique.

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