Interview Claudy Siar
Claudy Siar, patron de Tropiques FM
" Le repli identitaire est dans le peuple dominant"
Tropiques FM a un an, le pari est gagné ?
Un pari n’est jamais gagné ! Il faudrait être la radio n°1 parmi toutes les radios et pas seulement les radios dites communautaires ou de la diversité. Après un an d’existence, je constate qu’on a des résultats plus qu’encourageants. Nous avions bien commencé ; il y a eu après une toute petite baisse et puis on a encore gagné en audience, avec une progression plus forte encore que sur les sondages.
130 000 auditeurs, c’est cela ? Le potentiel est de 300 000…
Potentiellement, ça ne veut rien dire. Ceux qui font ce type de calcul en pensant à la communauté des gens d’outre-mer, se trompent. On ne peut pas faire ce type de compte d’apothicaire parce que les gens ont des façons de vivre, des façons de consommer différentes… Ce n’est parce que les gens sont Antillais qu’ils vont forcément écouter la radio dévolue aux identités du pays d’où ils viennent. Un programme répond à des attentes, des réalités également, mais en fonction de ce que l’on est. Tropiques FM est né de la volonté d’être une radio qui rend compte de la réalité des originaires d’outre-mer, de leurs spécificités culturelles et identitaires en outre-mer mais surtout, avant tout, en France hexagonale. Aujourd’hui, pour entamer notre deuxième année d’existence, nous avons un slogan : Tropiques FM c’est vous. Les auditeurs ne sont plus seulement auditeurs mais ils sont acteurs de leur radio. Ils s’entendent à travers des montages, des jingles, mais ils s’entendent aussi parce qu’ils participent dans les émissions bien plus que par le passé et de façon différente.
Qui sont les nouveaux de la grille ?
José Touré, l’ancien footballeur nous a rejoint pour le Café des sports tous les lundis de 18 h 30 à 19 h 30. C’est vraiment un talk show parce que José Touré est un showman. Autour de lui, il y a des gens passionnés comme Arnaud Ursule, un jeune Guadeloupéen de la rédaction des sports de France 2 (accessoirement, c’est mon neveu !), Eric Siar, Albert Couriol de France-football et l’Equipe magazine.
Des femmes ?
Barbara Jean-Elie, de Trace TV, vient animer Tropiques public, un programme un peu plus égocenté sur les Antilles et c’est un vrai talk, société, culture, politique… Il y a encore Orly qui est une des plus grandes spécialistes des musiques latines dans la capitale française ! Elle anime le vendredi et le samedi à 18 h 30 Rythmo latino.
Vous accueillez aussi Frédéric Fostan qu’on a connu sur Sun, NRJ et sur RFO avec Good morning Gwada…
Frédéric Fostan nous a rejoint sur les grandes matinales. Il avait fait quelques incursions courant juillet et août sur notre antenne. C’est un élément fort qui a une vraie passion pour la radio et pour les cultures et les identités d’outre-mer et c’est un vrai talent. Avoir Frédéric Fostan sur l’antenne, c’étais avoir une autre personnalité forte au milieu des Jean-Jacques Seymour, Logan, Rio, Hortense Asaga ou Johnny Gray. On sait qu’à Tropiques FM, les gens ne sont pas des béni oui oui et qu'ils n’ont pas la langue dans leur poche !
Vous sentez-vous militant ?
On ne peut avoir créé une telle radio et ne pas être différent, ne pas avoir à cœur de mener des combats. C’est normal, nous sommes dans une réalité où nos spécificités culturelles, nos identités sont marginalisées. Il se développe dans ce pays un communautarisme qui n’est pas du côté de ceux que l’on croit. J’aime mieux parler de grand ghetto blanc. Le repli identitaire, il n’est pas de ceux qui ont des origines différentes mais dans le peuple dominant. Et nous on se doit d’avoir une attitude un peu militante, un peu revendicative mais dans un esprit républicain parce que c’est ce que nous sommes réellement. A Tropiques FM, on est là pour avoir un vrai propos citoyen mais aussi pour dire là où ça ne va pas.
Des exemples ?
L’Express a sorti un dossier sur les lieux où il fait bon vivre en France. Il y avait un classement. Il ne concernait que la France hexagonale et la Corse. Nous sommes en 2008, année du 160e anniversaire de l’abolition de l’esclavage, les chaînes publiques françaises, à l’exception de France Ô, n’ont à aucun moment proposé des programmes dignes de ce nom rappelant ce passé de l’histoire de France. Ca veut dire que cette histoire ne que l’histoire d’une partie du peuple de France ! Et nous avons un ministère de l’outre-mer tout comme les étrangers ont une ambassade en France ? Et que veut dire métropole ? Un métropolitain n’est-il que celui qui appartient à l’Etat qui nous gouverne ? Ne peut-il être qu’un Blanc ? L’Etat français doit nous dire quel est son plan. Est-ce à long terme d’accorder une autonomie voire l’indépendance aux départements d’outre-mer ou est-il de dire que nous sommes complètement français ? Ce sera un des axes abordé tout au long de cette saison sur Tropiques FM.
N’êtes-vous pas tenté par la politique ?
Non jamais. Mon métier n’est pas celui de politicien. Jamais, jamais.
Le 10 mai dernier, vous avez pourtant pris la tête d’une marche…
En organisant cette marche, Tropiques FM a permis aux uns et aux autres d’avoir un champs d’actions commun pour s’exprimer sur la question de l’esclavage. On a vraiment souhaité fédérer toutes les associations, toutes celles qui ne s’entendent pas tout le long de l’année. Ca nous a coûté très cher ! Pas seulement financièrement. Ca nous a coûté cher parce que certains, ne voulant pas tel ou tel mariage avec telle ou telle association, ont souhaité faire dissidence. Le CRAN a roulé dans la farine tous ceux qui avaient accepté que le CRAN soit aussi dans cette aventure là. Le CRAN a utilisé cette mémoire et la date du 10 mai pour faire de la communication pour son nom. Je trouve ça inacceptable, mais je ne regrette pas d’avoir fédéré les uns et les autres.
Où en est Africa star ?
Ca a été un vrai succès populaire mais là encore… Moi, Français, afro-guadeloupéen né à Paris, pour assumer mon métier d’animateur et de producteur de télévision, je dois le faire à l’étranger parce qu’il y a tellement de préjugés dans le monde de la télévision en France… On se dit qu’un Noir ne peut pas faire ça. Et aujourd’hui tous mes amis de la télévision française me disent : bravo, c’est énorme d’avoir réussi ça, surtout en Afrique…
Du nouveau pour la saison 2 ?
J’annonce que pour la deuxième saison d’Africa star, il y aura un représentant des Antilles.
Photos : Alban Fatkin
" Le repli identitaire est dans le peuple dominant"
Tropiques FM a un an, le pari est gagné ?
Un pari n’est jamais gagné ! Il faudrait être la radio n°1 parmi toutes les radios et pas seulement les radios dites communautaires ou de la diversité. Après un an d’existence, je constate qu’on a des résultats plus qu’encourageants. Nous avions bien commencé ; il y a eu après une toute petite baisse et puis on a encore gagné en audience, avec une progression plus forte encore que sur les sondages.
130 000 auditeurs, c’est cela ? Le potentiel est de 300 000…
Potentiellement, ça ne veut rien dire. Ceux qui font ce type de calcul en pensant à la communauté des gens d’outre-mer, se trompent. On ne peut pas faire ce type de compte d’apothicaire parce que les gens ont des façons de vivre, des façons de consommer différentes… Ce n’est parce que les gens sont Antillais qu’ils vont forcément écouter la radio dévolue aux identités du pays d’où ils viennent. Un programme répond à des attentes, des réalités également, mais en fonction de ce que l’on est. Tropiques FM est né de la volonté d’être une radio qui rend compte de la réalité des originaires d’outre-mer, de leurs spécificités culturelles et identitaires en outre-mer mais surtout, avant tout, en France hexagonale. Aujourd’hui, pour entamer notre deuxième année d’existence, nous avons un slogan : Tropiques FM c’est vous. Les auditeurs ne sont plus seulement auditeurs mais ils sont acteurs de leur radio. Ils s’entendent à travers des montages, des jingles, mais ils s’entendent aussi parce qu’ils participent dans les émissions bien plus que par le passé et de façon différente.
Qui sont les nouveaux de la grille ?
José Touré, l’ancien footballeur nous a rejoint pour le Café des sports tous les lundis de 18 h 30 à 19 h 30. C’est vraiment un talk show parce que José Touré est un showman. Autour de lui, il y a des gens passionnés comme Arnaud Ursule, un jeune Guadeloupéen de la rédaction des sports de France 2 (accessoirement, c’est mon neveu !), Eric Siar, Albert Couriol de France-football et l’Equipe magazine.
Des femmes ?
Barbara Jean-Elie, de Trace TV, vient animer Tropiques public, un programme un peu plus égocenté sur les Antilles et c’est un vrai talk, société, culture, politique… Il y a encore Orly qui est une des plus grandes spécialistes des musiques latines dans la capitale française ! Elle anime le vendredi et le samedi à 18 h 30 Rythmo latino.
Vous accueillez aussi Frédéric Fostan qu’on a connu sur Sun, NRJ et sur RFO avec Good morning Gwada…
Frédéric Fostan nous a rejoint sur les grandes matinales. Il avait fait quelques incursions courant juillet et août sur notre antenne. C’est un élément fort qui a une vraie passion pour la radio et pour les cultures et les identités d’outre-mer et c’est un vrai talent. Avoir Frédéric Fostan sur l’antenne, c’étais avoir une autre personnalité forte au milieu des Jean-Jacques Seymour, Logan, Rio, Hortense Asaga ou Johnny Gray. On sait qu’à Tropiques FM, les gens ne sont pas des béni oui oui et qu'ils n’ont pas la langue dans leur poche !
Vous sentez-vous militant ?
On ne peut avoir créé une telle radio et ne pas être différent, ne pas avoir à cœur de mener des combats. C’est normal, nous sommes dans une réalité où nos spécificités culturelles, nos identités sont marginalisées. Il se développe dans ce pays un communautarisme qui n’est pas du côté de ceux que l’on croit. J’aime mieux parler de grand ghetto blanc. Le repli identitaire, il n’est pas de ceux qui ont des origines différentes mais dans le peuple dominant. Et nous on se doit d’avoir une attitude un peu militante, un peu revendicative mais dans un esprit républicain parce que c’est ce que nous sommes réellement. A Tropiques FM, on est là pour avoir un vrai propos citoyen mais aussi pour dire là où ça ne va pas.
Des exemples ?
L’Express a sorti un dossier sur les lieux où il fait bon vivre en France. Il y avait un classement. Il ne concernait que la France hexagonale et la Corse. Nous sommes en 2008, année du 160e anniversaire de l’abolition de l’esclavage, les chaînes publiques françaises, à l’exception de France Ô, n’ont à aucun moment proposé des programmes dignes de ce nom rappelant ce passé de l’histoire de France. Ca veut dire que cette histoire ne que l’histoire d’une partie du peuple de France ! Et nous avons un ministère de l’outre-mer tout comme les étrangers ont une ambassade en France ? Et que veut dire métropole ? Un métropolitain n’est-il que celui qui appartient à l’Etat qui nous gouverne ? Ne peut-il être qu’un Blanc ? L’Etat français doit nous dire quel est son plan. Est-ce à long terme d’accorder une autonomie voire l’indépendance aux départements d’outre-mer ou est-il de dire que nous sommes complètement français ? Ce sera un des axes abordé tout au long de cette saison sur Tropiques FM.
N’êtes-vous pas tenté par la politique ?
Non jamais. Mon métier n’est pas celui de politicien. Jamais, jamais.
Le 10 mai dernier, vous avez pourtant pris la tête d’une marche…
En organisant cette marche, Tropiques FM a permis aux uns et aux autres d’avoir un champs d’actions commun pour s’exprimer sur la question de l’esclavage. On a vraiment souhaité fédérer toutes les associations, toutes celles qui ne s’entendent pas tout le long de l’année. Ca nous a coûté très cher ! Pas seulement financièrement. Ca nous a coûté cher parce que certains, ne voulant pas tel ou tel mariage avec telle ou telle association, ont souhaité faire dissidence. Le CRAN a roulé dans la farine tous ceux qui avaient accepté que le CRAN soit aussi dans cette aventure là. Le CRAN a utilisé cette mémoire et la date du 10 mai pour faire de la communication pour son nom. Je trouve ça inacceptable, mais je ne regrette pas d’avoir fédéré les uns et les autres.
Où en est Africa star ?
Ca a été un vrai succès populaire mais là encore… Moi, Français, afro-guadeloupéen né à Paris, pour assumer mon métier d’animateur et de producteur de télévision, je dois le faire à l’étranger parce qu’il y a tellement de préjugés dans le monde de la télévision en France… On se dit qu’un Noir ne peut pas faire ça. Et aujourd’hui tous mes amis de la télévision française me disent : bravo, c’est énorme d’avoir réussi ça, surtout en Afrique…
Du nouveau pour la saison 2 ?
J’annonce que pour la deuxième saison d’Africa star, il y aura un représentant des Antilles.
Photos : Alban Fatkin