Arthuis et Torre, sénateurs en colère
La grande escroquerie du logement social
La commission des finances du Sénat dénonce le discours de Villepin aux Antilles et propose des coupes, des transferts et de mettre fin aux privilèges des retraites outre-mer.
Jean Arthuis, président (Mayenne, UMP) de la commission des finances au Sénat, et son rapporteur, Henri Torre (Ardèche, UMP) n'ont pas leur langue dans leur poche dès qu'il s'agit des rapports entre l'Etat et l'outre-mer. Hier matin, ils ont présenté le rapport d'Henri Torre sur le logement social outre-mer. Henri Torre a visité auparavant la Guadeloupe et la Guyane. « Le buget de l'Outre-mer (2 milliards d'euros) est essentiellement consacré au logement et à l'emploi. La situation est extrêmement critique depuis 2001 car on a inscrit beaucoup plus de d'autorisations d'engagement que de crédits de paiement. » Pour Henri Torre, il s'agit d'un « laisser aller de la part des ministres du Budget et de l'Outre-mer ». Laisser aller d'autant plus grave que 80 % des populations ultramarines peuvent prétendre au logement social. Entre les autorisations d'engagement et les crédit de paiement, il y a un écart de 500 millions d'euros en début d'année, et 8 à 900 000 en fin d'année. Les préfets reçoivent les autorisations d?engagement, mais n'ont de quoi honorer les traites. Voilà comment les opérateurs sociaux et les artisans sont devenus d'énormes créanciers de l'Etat.
Le Premier-ministre, lors de son voyage aux Antilles, a annoncé qu'il allait couvrir la dette par une rentrée de 30 millions d'euros de la Caisse des dépôts provenant du crédit immobilier, 9,6 millions de la réserve gouvernementale et 12 millions qu'il reste à trouver sur le collectif budgétaire de fin d'année. Selon les sénateurs, le budget ne reflète réellement que 13 millions d'euros.
Villepin a encore promis de débloquer 120 millions d'autorisation d'engagement dont 60 pour 2007. « On va encore accroître le déséquilibre actuel ! » s'exclame le sénateur de l'Ardèche. Cette année on essaie de résorber 60 millions de dette de l'Etat, mais en fin d'année, elle atteint déjà les 100 millions ! Ca ne nous satisfait pas. Nous allons discuter fermement avec le ministre de l'Outre-mer lors de sa comparution devant le Sénat ! » Les deux parlementaires semblent remonter contre « le ministre de l'Outre-mer qui ne devrait pas se considérer ministre de l'outre-présidentielle ». Rendez-vous en tribune sénatoriale le 6 décembre.
LES PROPOSITIONS DU RAPPORT
Défiscaliser le logement social
La défisc en logement représente 180 millions d'euros. Les crédits de paiement dévolus au logement social sont de 175 000 euros. Henri Torre propose donc d'étendre la défisc au logement social, d'autant qu'il a remarqué que « la défiscalisation a provoqué des tensions sur le prix des terrains ». Arthuis en rajoute : « La défiscalisation ouvre la voie à des activités qui ne contribuent pas pleinement au développement ultra-marin et captent une partie de la ressource sous forme de commissions, de publicités et d'honoraires qui ne viennent pas fertiliser l'économie ultra-marine ». Arthuis et Torre, chantres de la lutte contre les niches fiscales, ont trouvé une parade pour que l'équité fiscale qui leur est chère soit respectée même dans la défiscalisation.
Des coupes budgétaires
Les amendements proposés par la Commission prévoient une réduction de 3 millions d'euros au fonds de coopération régionale (les sénateurs se demandaient à quoi pouvaient bien servir cette somme) pour abonder le fonds logement, et une diminution de 10 millions d'euros des autorisations d'engagement du ministère, « pour montrer à tous que l'on n'annonce pas trop d'autorisations d'engagement quand on n'a pas de crédits de paiement derrière ».
La chasse aux retraites dorées des fonctionnaires
Henri Torre et Jean Arthuis ont déposé un amendement contre les surretraites outre-mer. Ils veulent mettre un frein à l'envolée des frais occasionnés par un article du code des pensions de retraite, permettant à des fonctionnaires de toucher leur retraite survalorisée de 35 à 75 % s'ils vivent à la Réunion, Saint-Pierre et Miquelon, Mayotte, Polynésie, Wallis et Futuna ou en Nouvelle Calédonie. « Ca coûte 300 millions d'euros par an pour les deux prochaines années ! », selon Jean Arthuis. 9 618 personnes étaient concernées par le dispositif en 1989, 29 861 en 2005. « Il faut arrêter ce système et baisser le stock », ajoute Henri Torre. C'est la cinquième fois qu'Arthuis propose un tel amendement. L'an dernier, il a recueilli 8 voix.
De nouveaux titres fonciers en circulation en Guyane
Le directeur des services fiscaux de la Guyane a annoncé au sénateur Torre que pour alimenter loffre de foncier qui fait défaut pour le secteur du logement, il allait émettre 500 titres fonciers. Ces terrains proviendront du patrimoine de l'Etat, propriétaire à 90 % du sol guyanais.