5e édition des Trophée des arts afro-caribéens. La soirée au Châtelet
La quintessence de la culture noire récompensée
Le théâtre du Chatelet était en effervescence face aux talents afro-caribéens, lundi soir. Les Trophées des Art Afro-Caribéens ouvraient leur 5e édition.
Chacun des dix trophées récompense un écrivain, un musicien ou un cinéaste lié à la Caraïbe ou à l’Afrique. Mais cette cinquième édition n’est pas un bon cru pour la culture antillaise. L’honneur est tout de même sauf, grâce à la révélation de l’année, la jeune chanteuse hispano-martiniquaise Kim, mais aussi grâce au Prix d’honneur que remporte la cinéaste Euzhan Palcy (en compagnie du directeur général des TAAC, Joe Dunoyer sur la photo).
Fidèles à la tradition, les TAAC ont réuni sur leur tapis rouge le monde du cinéma, de la littérature et de la musique issu de la Caraïbe et du continent africain. L’événement gratifie les artisans de la culture noire contemporaine qui ont marqué l’année de leur empreinte. Cette édition a été marquée par un hommage à Patrick Saint-Eloi avec Jacob Desvarieux, émouvant, ensuite rejoint par l’ensemble des artiste qui ont offert un medley aussi poignant que discordant à la mémoire de l’artiste. C’est donc sur des débuts quelques peu poussifs que les TAAC entrent en scène. Marie-José Alie et Audrey Chauveau ne ménagent pas leurs efforts pendant ces deux heures de spectacle, pour passer outre les problèmes de sons et erreurs de lancements, dans leur numéro d’animatrice (l’émission sera retransmise sur FTV).
Organisation bancale
Car c’est bel et bien une organisation plus que bancale qui entache cette soirée. Franck Anretar, président de l’équipe du TAAC, dresse un bilan laconique de l’édition : « Elle aurait pu être mieux, mais c’est une très bonne édition », avant de se montrer plus loquace sur son avenir au sein du comité : « Je vais apprendre à déléguer et me consacrer à d’autres missions… D’autres membres vont prendre le relai pour les prochaines éditions. »
Mais la magie des TAAC est tout de même palpable de par des invités de qualité et des artistes de talent. De nombreuses personnalités ont répondu à l’appel ; à l’instar de Samuel Eto'o, de Liz McComb ou d’Audrey Pulvar. Les trophées pleuvent et les lauréats défilent. Au total, la Caraïbe est décorée de trois trophées, les six autres prix reviennent à la culture réunionnaise et subsaharienne. C’est tout un peuple qui ce soir là prend conscience des potentialités et des richesses qu’il recèle en son sein, malgré les grincements de dents sur le maigre cru caribéen.
Gaëlle Jotham (Agence de presse GHM)
Photos : Alfred Jocksan
L’accès difficile aux lauréats
La presse, confinée dans une salle du sous-sol du Théâtre du Châtelet pouvait suivre la soirée sur des écrans de télévision. A charge pour l’équipe de l’organisation de conduire dans cette salle les lauréats. C’est ainsi que les stars réunionnaises de Groov Lélé ont échappé ) l’exercice de l’interview et du photo call. Quant aux Carimi, à Kaf Malbar ou encore Marc Barat, ils n’étaient tout simplement pas là.
Les Lauréats de la 5e édition des Trophées des Arts Afro-Caribéens
Meilleur essai : Mohammed Aïssaoui, L’affaire de l’esclave Furcy
Meilleur roman : Léonora Miano, Les Aubes Ecarlates
Meilleur documentaire : Pascal Lamche, « Black diamond »
Meilleur film : Rachid Bouchareb, « London River »
Prix d’honneur : Euzhan Palcy
Meilleur artiste : Kaf Malbar
Meilleur album : Groove Lélé & Ernst Reijseger – Zembrocal Musical
Meilleur clip : Youssoupha, « L’effet papillon »
Meilleur groupe : Carimi
Révélation de l’année : Kim
Ils ont dit
Audrey Pulvar
« Pour ceux d’entre vous qui vivez ici, on entend tous les jours des propos dans la bouche des hommes politiques, des leaders d’opinion, parfois des journalistes. Des propos tendancieux, qui sont blessant, humiliant. C’est important de ne pas laisser passer ces choses. Alors, j’ai poussé un cri et parfois, il faut qu’il y des gens qui poussent des cris dans la nuit, et demain ce sont d’autres personnes qu’ils le pousseront. Je pense que c’est important d’être debout. »
La star de la télé, Babette de Rosière, est venue remettre le prix du meilleur album remporté par le groupe réunionnais, Groove Lélé.
« La musique, c’est tout a fait comme la cuisine, ça rime. Musique et cuisine, ça rime bien. Je pense que je vais trouver une bonne sauce épicée et de bonnes notes aussi. C’est une soirée symbolique. Mettre en avant et reconnaitre mes compatriotes, ça me plait. »
Philippe Lavil
« Je suis venu pour participer et rendre hommage au regretté Patrick St Eloi, le crooner créole décédé. Je regrette de ne pas être dans la salle, mais assis dans un grand couloir, et de voir le spectacle à la télé ! C’est moins marrant que d’être dans la salle et, de plus, on emmerde tout le monde. Mais c’est une belle initiative. Maintenant, il sera peut-être bien un jour de trouver une vraie mixité qui ressemble à la France. »
Charly Clodion, réalisateur du clip de Youssoupha, « L’effet papillon ».
« Je suis extrêmement fier. Un clip à petit budget… Un jour, j’ai reçu un coup de fil de Youssoupha pour partir tourner le clip à Kinshasa. Le talent et la disponibilité a permis à ce clip de franchir la ligne de la victoire. Mais, je ne veux pas m’enfermer. Pour moi, c’est un modeste prix. »
Francois Durpaire, président du jury des arts Afro-caribéens
« Ces trophées des arts afro- caribéens sont un événement important parce qu’avant, il n’y a pas grand-chose. Les Césaires sont devenus le trophée des arts afro-caribéens. Il y des esprits chagrin en France et certains laissent entendre que c’est communautariste. Pourquoi les noirs remettent des prix aux Noirs ? C’est est une valorisation de la diversité de notre héritage. Se priver de l’Afrique, des Caraïbes, de la Réunion, c’est se priver d’une partie de nous-mêmes, quelles que soient nos origines. Nous savons valoriser les cultures et nous savons aussi entreprendre. »
(Réactions recueillies par Alfred Jocksan)