Affaire Claudy Elisor
L’IGS se saisit de l’affaire Elisor
Cinq hommes suspects d’être impliqués dans le décès de Claudy Alisor ont été interpellés par la police judiciaire entre jeudi soir et vendredi matin, en région parisienne. Brice Hortefeux a saisi la police des polices.
Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, a accédé à la requête de Patrick Karam, délégué interministériel à l’égalité des chances des Français d’outre-mer qui voulait que l’inspection générale des services (IGS) soit saisie de l’affaire Claudy Elisor. Claudy Elisor est ce jeune Guadeloupéen de 33 ans, employé de la SNCF et installé à Stains en région parisienne, qui est décédé des suites de la violente agression dont il a été victime, avec sa famille et ses amis, dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier, dans la salle du Château d’Egypte au Blanc-Mesnil. L’intervention du délégué a fait suit à l’émoi qui a soulevé la communauté antillaise d’Ile de France suite à ce qu’il convient d’appeler un lynchage en règle. Le délégué a posé trois questions au ministre de l’Intérieur. « Pourquoi a-t-il fallu attendre 20 à 25 minutes après le premier appel à la police, sachant que dans la nuit de la saint Sylvestre, un dispositif d’intervention rapide était mis en place ? Pourquoi les policiers ne sont-ils venus qu’à quatre alors qu’un grand nombre de témoins indiquent qu’eu égard à la situation, il leur avait été précisé de venir nombreux ? Pourquoi les policiers n’ont-ils pas interpellé ces voyous qui les avaient menacés et avaient commis ces actes d’une violence extrême – le disc jockey se trouvant alors dans un état critique ? » Cette saisine de la police des polices semble justifiée aux yeux du délégué par le fait que les Antillais d’Ile de France ont eu l’impression qu’ils ne bénéficiaient pas des mêmes protections que les autres Français. Le délégué a aussi indiqué au ministre de l’Intérieur qu’il avait du appeler au calme la population antillaise (épaulé en cela par Tropiques FM et l’épouse de Claudy Elisor) et qu’il lui demandait « toute sa détermination pour accélérer l’enquête et éviter des affrontements communautaires à la veille de la visite du président de la République aux Antilles ».
La pression du voyage présidentiel aux Antilles
Il est vrai que le sentiment des Antillais d’Ile de France pourrait sembler justifier si l’on s’en réfère au fait que le seul soutien psychologique proposé à la famille de Claudy Elisor ait été du seul fait de l’adjoint au maire de Sarcelles, le Guadeloupéen, Jean-Pierre Passé-Coutrin, et que le préfet de la Seine Saint-Denis, Christian Lambert, se soit contenté d’un simple coup de fil à la famille… Et ce, alors même que Brice Hortefeux avait déclaré dans un communiqué que la nuit du réveillon s'était déroulée « sans qu'aucun incident majeur n'ait été signalé sur l'ensemble du territoire national ». Il a fallu que le patron de Tropiques FM, Claudy Siar, s’occupe lui-même de donner la résonnance nécessaire à cette affaire sur les ondes de la radio antillaise de Paris et saisisse un avocat pour la famille. « Jusqu’à jeudi, relate Me Benaïem, qui prend en charge le dossier pour la partie civile, rien ne s’était passé côté judiciaire à part la plainte de trois lignes pour coups et blessures aggravés déposée par l’épouse de la victime. » Désespérée de n’avoir aucune nouvelle d’aucun officiel, la famille a finalement été visitée longuement, jeudi après-midi, par Patrick Karam. Les parents de Claudy Elisor venaient d’arriver tout juste de Saint-Laurent du Maroni où ils sont établis (Air Caraïbes a accepté de leur faire 250 euros de réduction !). Dans les faits, la police judiciaire était déjà en train d’enquêter et avaient déjà quelques noms, mais deux choses ont précipité les interpellations qui ont eu lieu hier matin. D’abord, un contrôle routier inopiné de la BAC, jeudi soir, qui a conduit à interpeller incidemment quelqu’un qui était présent avec les agresseurs le soir du réveillon, et d’autre part l’imminence de l’arrivée du président de la République aux Antilles.
FXG (agence de presse GHM)
Des Africains contre des Antillais
Claudy Elisor n’endossait le costume de DJ que pour ce réveillon antillais amical et familial, une soirée kompa où la moyenne d’âge des participants était de 35 à 50 ans. Pour cette soirée, les invités avaient donné une participation aux frais et étaient invités à participer au tirage d’une tombola. C’est vers 5 heures du matin que le principal suspect, Ibrahim T, 20 ans, d’origine sénégalaise, s’est présenté en affirmant qu’il était chez lui. Econduit sans violence, selon les témoins, par le vigile et Claudy Elisor, le jeune homme a promis de revenir. « Ils sont revenus à plus d’une dizaine avec une arme à feu, des poings américains, des battes de baseball et un pitbull. Ils ont frappé Claudy, lui ont cassé une bouteille et une chaise sur la tête. Son beau-frère, Fabien P, a tenté d’intervenir et a reçu un coup de poing américain qui lui a ouvert l’arcade sourcilière. Le reste de la bande s’est répandu sur la piste de danse, a renversé les tables et s’est mis à donner des coups à tous les convives. Ceux-ci ont voulu s’enfuir mais la sortie était bouclée de l’extérieur avec le renfort du chien d’attaque. Le premier à appeler la police a été Chris H. Cinq minutes plus tard, la police a rappelé pour demander confirmation des faits et de l’adresse tandis que les violences se poursuivaient. Les pompiers, prévenus plus tard sont arrivés à peu près en même temps que la police. Entretemps, les agresseurs étaient repartis, à pied, tranquillement, emportant même des bouteilles de champagne. Après l’arrivée des policiers, une dame a signalé le retour de la bande. Selon des participants à la soirée, les policiers auraient été menacés de subir le même sort que Claudy Elisor avant que les agresseurs ne partent, cette fois, en courant. Parmi les personnes interpellées vendredi matin, la veuve a reconnu deux personnes. Les principaux suspects sont tous des jeunes gens âgés de 17 à 21 ans et sont d’origine africaine. Ils seraient résidents de la cité 212, voisine de la salle du Château d’Egypte, et pour la plupart connus des services de police et de justice. Pour Me Benaïem, il était important de se constituer partie civile pour avoir accès au dossier et pour s’assurer que l’on parvienne bien à identifier les auteurs et, surtout, attribuer à chacun la responsabilité des actes. « Ce n’est pas le premier incident entre Antillais et Africains », regrette le délégué interministériel. D’ailleurs, un communiqué du Conseil représentatif des associations noires (CRAN) condamnant ces actes « barbares » a été du plus mauvais effet au sein de la communauté antillaise d’Ile de France.
Obsèques la semaine prochaine
Le corps de Claudy Elisor qui se trouvait jusqu’à jeudi à l’institut médico-légal de Paris a été restitué à sa famille vendredi. Il serait inhumé en région parisienne en début de semaine prochaine.