Alex Descas est Aime Cesaire
Alex Descas incarne Aimé Césaire dans Le prix de la liberté, docu-fiction de Félix Olivier et Christophe Chevalier (26 juin sur France O).
« Une soif immense pour le monde »
Quelle a été votre réaction lorsque Eloa prod vous a proposé d’incarner Aimé Césaire ?
Quand Jean-Loup Monthieu et France Zobda m’ont proposé ce docu-fiction, j’ai accepté avec beaucoup de plaisir, sans me poser de question.
Comment avez-vous travaillé le personnage ?
Je n’ai pas fait de travail particulier dans le sens où je n’ai pas essayé de singer Césaire, ce qui est quasiment impossible. D’autant que ce n’est pas une fiction totale, c’est un docu-fiction. Ça aurait été ridicule que j’essaie d’interpréter un Césaire fictif à côté des images du vrai.
On voit les images d’archive de Césaire prononçant des discours à l’Assemblée nationale ; je ne peux pas me battre avec ca, impossible… Donc je vais le dire d’une autre manière, qui m’appartient, une interprétation personnelle. C’est beaucoup plus honnête de le faire de ce point de vue-là. Et c’était plus simple comme ca, beaucoup plus simple…
Comment interpréter Césaire à différents ages de sa vie ?
J’étais curieux de voir comment ca allait se passer, Césaire âgé, un peu plus jeune, très jeune… Et l’on ne peut pas me rajeunir –, – j’ai déjà un certain âge ! Pour faire Césaire vieillissant, il a suffi de me mettre une perruque avec des cheveux très blancs. J’espère que la blague va prendre ! Et puis, je joue un Césaire beaucoup moins âgé… Là, j’ai une autre perruque, avec des cheveux noirs. Mon visage ne change pas !
Avez-vous découvert un aspect particulier de Césaire ?
Pas découvert, mais il y a la beauté de la langue. Quand vous avez la langue de Césaire en bouche, c’est extraordinaire. C’est très subtil, avec des mots choisis, avec une élégance… C’est parfois même trop, mais c’est d’une telle richesse, d’une telle beauté, que l’avoir en bouche est un plaisir. Ce n’est pas évident avec son phrasé, mais quand on arrive à dompter ou plutôt apprivoiser la langue, on peut la projeter, l’amplifier. C’est une grande voix. Certains de ses textes, comme ses discours à l’assemblée… Ce n’est pas de la comédie. Ils sont empreints d’une certaine gravité. C’était facile de dire le texte dans cette voix.
Aviez-vous rencontré l’œuvre d’Aimé Césaire avant ce film ?
Qui n’a pas rencontré l’œuvre de Césaire sur sa route, à un moment donné ou à un autre ? Et surtout pour n’importe quel Antillais ! Même si je n’ai pas joué son théâtre, j’ai eu déjà à dire un certain nombre de ses textes en lecture.
Que retenez-vous de Césaire apres ce tournage ?
C’est assez mélangé… Je passais d’une époque à une autre... J’ai ressenti, à la fin de sa vie, dans ses derniers discours en tout cas, une grande solitude. J’ai eu cette sensation lors de deux discours. C’était déjà un homme âgé. Il faisait son discours, très tard dans la nuit pour une dizaine de personnes…
Le film a failli s’appeler Césaire, le solitaire…
Oui, c’est vrai, j’ai ressenti une grande solitude. Dans les années où il était plus jeune, au lycée Louis-le-grand avec Senghor et Damas, ce qui me frappe, c’est sa soif de savoir, d’aller vers et de connaître tout ce qui se passait au sein de la communauté noire, qu’elle soit africaine ou afro-américaine. Il avait alors une soif immense pour le monde.
Propos recueillis par FXG, à Paris