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Publié par fxg

Interview de Suzanne Dracius, écrivain.

Anamnesis-1-COUV.jpgLa ville de Besançon a reçu plus de 200 écrivains pour son festival du livre intitulé « Les Mots Doubs », les 19, 20 et 21 septembre derniers. La littérature des Caraïbes y était représentée, avec Suzanne Dracius pour la Martinique et Lyonel Trouillot pour Haïti. Les deux auteurs sont intervenus, en compagnie de l'ancienne ministre Catherine Trautmann, lors d'une table ronde dont le thème était "l’écrivain face aux convulsions du monde". A cette occasion, l’éditeur martiniquais Jean-Benoît Desnel a présenté le numéro 1 de la revue Anamnésis, intitulé « Contre l’obscurantisme - Hommage à Jean Jaurès ». Suzanne Dracius et Catherine Trautmann, y signent chacune une contribution aux côtés d'Édouard de Lépine ou Gilles Candar...

"Jaurès a laissé aux Antilles les premiers pas de la presse militante"

Pourquoi avoir choisi Jaurès pour ce numéro de la revue « Anamnésis » ?

Dracius-Jeannerot-Trautmann.jpegLe Centenaire de la mort de Jean Jaurès coïncide avec celui de la Première Guerre mondiale. Dans les convulsions du monde aujourd’hui, j’ai donc trouvé utile de revenir sur ce Centenaire où toutes les commémorations de la guerre de 14-18 pouvaient laisser à penser que l’on faisait l’apologie de la guerre, afin de mettre l’accent sur le contraire et de démonter l’idéologie de l’absurde de tel ou tel conflit actuel, qui, par l’obscurantisme, qu’il soit religieux ou autre, empoisonne la vie des plus démunis ! J’ai jugé bon de rappeler que Jaurès s’est élevé contre cette guerre — il en a payé le prix en y perdant la vie, assassiné par un fasciste. La lutte contre le fanatisme, c’est la lutte pour la survie de nos démocraties et de nos libertés, malheureusement très malades et très compromises. Savoir, c’est pouvoir !

Qu'est-ce que nos auteurs antillais ont trouvé à Jean Jaurès, à son action, sa pensée ? Quelles empreintes a-t-il laissées aux Antilles ?

L’idée et le principe de luttes des classes et de mouvements de défense des masses ouvrières sont arrivés aux Antilles avec des personnages comme Jules Monnerot et Joseph Lagrosillière en Martinique, et en Guadeloupe avec Géraut Richard, député et ami de Jaurès, mais surtout Hégésippe Légitimus, premier député noir, élu en 1898 à l’âge de 28 ans, sous la IIIe République. Fondateur du Parti socialiste guadeloupéen, il fut surnommé « le Jaurès noir ». La première empreinte laissée par Jaurès aux Antilles, c’est les premiers pas de la presse militante avec Justice, organe du Groupe Jean Jaurès, le journal Le Prolétaire, et enfin Le Peuple, pour ne citer que les principaux journaux engagés de l’époque. Comme le signale Édouard de Lépine dans son texte « Jean Jaurès et le socialisme à la Martinique », il n’y a pas si longtemps on pouvait encore retrouver aux Antilles de vieux militants qui savent par cœur et récitent, sans aucune hésitation, de larges extraits de grands discours de Jaurès : celui d’Albi « À la jeunesse » (1903), celui de Toulouse (1908) sur « Réforme et Révolution », celui de 1910 à la Chambre des Députés, en défense de l’École laïque, par exemple. 

Comment ce numéro de la revue « Anamnésis » a-t-il été perçu ?

Ce numéro d’Anamnésis a reçu un excellent accueil et a suscité l’intérêt. Le public s'est étonné de voir qu'aux Antilles, la figure de Jaurès était aussi importante que celles de Fanon, Césaire ou Aliker ; un article de la revue est d’ailleurs consacré à l’assassinat du directeur du journal Justice. Sans nul doute, Jaurès appartient à l’humanité, à l’universel, sa figure tutélaire plane encore de nos jours sur les lecteurs, et une revue ultramarine lui rendant hommage fait naître la curiosité. La revue, sans dogmatisme aucun, ne se contente pas de rendre hommage à Jaurès, mais elle lutte contre l’obscurantisme, en faisant, entre autres, un état des lieux de la survie du capitalisme mondialisé, face à ses propres vicissitudes.

Quels seront vos prochains rendez-vous avec le public autour de ce numéro de la revue en Guadeloupe et en Martinique ?

Le titre sera en librairie aux Antilles la semaine prochaine, et pour la Martinique et la Guadeloupe nous avons prévu des rencontres - débats avec le public et des séances de dédicaces des différents contributeurs dans les médiathèques et librairies majeures des deux îles, à partir du mois d’octobre 2014, autour de ce numéro, et aussi autour du précédent numéro de la revue consacré à « L’An II du cinquantenaire de l’indépendance algérienne, regards de l’Outre-mer ».

Propos recueillis par FXG, à Paris

Photo : Suzanne Dracius avec Catherine Trautmann et le sénateur du Doubs Claude Jeannerot au festival des mots Doubs à Besançon 

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