Carnaval tropical sur les champs Elysées - Firmine Richard
Interview
Firmine Richard, marraine du 10e Carnaval tropical de Paris
« Le préfet de police n’a pas voulu d’un déboulé »
Peut-on parler d’un combat pour arracher l’autorisation de défiler sur les champs Elysées au préfet de police de Paris ?
Il fallait juste faire comprendre au préfet pourquoi l’on voulait être sur les Champs-Elysées. Pour défendre ses arguments, le préfet nous a même fait passer un DVD où l’on voit les interpellations qu’il y a eu en fin de carnaval l’année dernière. Ce à quoi j’ai répondu qu’ils faisaient tout le temps des interpellations similaires à la sortie des matches de foot. Mais doit-on stigmatiser les Antillais parce qu’il y a eu quelques incivilités à la fin d’une manifestation que nous voulons populaire. On nous encore opposé que l’on ne pouvait bloquer les Champs-Elysées un samedi. On a déplacé la manifestation au dimanche… Il fallait juste contrer ses arguments et lui dire ce que nous voulons : nous faire connaître. Le président de la République a déclaré 2011, année des Outre-mer français pour faire voir l’outre-mer autrement. Nous voulons nous montrer tel que nous sommes avec notre culture… On a bien laissé les handballeurs fêter leur victoire sur les Champs-Elysées. Nous faisons partie de la nation française et nous nous devons d’être là aussi.
Le préfet attend de l’organisation une plus grande professionnalisation…
Alors, ça a été ça… Et c’est ça le problème des Français ! Dans leur tête, il n’y a qu’eux qui savent faire et les Noirs ne savent rien faire ! Nous devons réagir. Nous savons ce que nous valons et j’c’est ce que j’ai dit au préfet : donnez-nous l’occasion de montrer ce que nous pouvons faire. C’est un carnaval jeune que j’ai vu évoluer… C’est ça le problème des Noirs en général, quel que soit le milieu où nous sommes. Nous devons montrer que nous sommes capables de faire plus que les autres. On dit toujours que pour un Blanc il faut deux Noirs, et bien, c’est valable à tous les niveaux ! Il faut montrer, démontrer et redémontrer. C’est ce que j’ai fait.
Pour le coup, vous êtes co-marraine avec l’adjointe au maire en charge de la Sécurité… un comble !
Ce n’est pas pour convaincre le préfet car avec Myriam El Khomri, nous ne pouvons pas mieux représenter la diversité de la France dont on parle. Et on nous balance de la diversité à toutes les sauces ! Myriam el Khomri est adjointe à la sécurité et moi je suis la première conseillère de Paris ultramarine ! Nous existons et nous voulons être là. C’est tout ce que j’ai fait et le préfet m’a entendue.
Combien de temps a pris cette négociation avec le préfet de police ?
Pas trop… En tant que conseillère de Paris, j’ai fait un vœu que j’ai présenté au préfet qui assiste aux réunions du conseil de Paris. J’ai d’abord une réponse qui n’était pas positive. Puis il a convoqué tous les partenaires, mairie, sous-traitants sécurité, prévention, médiateurs de nuit… autour d’une grande table ronde. Nous lui avons garanti que nous réussirions cette manifestation...
Qui ce ne sera pas un déboulé…
Le préfet n’a pas voulu d’un déboulé… Il ne voulait pas de ceci, pas de cela ! On lui a dit qu’on mettrait un agent de sécurité tous les cinquante mètres. Jamais, on n’a vu ça ! Je ne sais pas quelles sont les garanties qu’on peut encore leur donner. Mais s’il faut faire encore autre chose pour montrer que nous sommes, bien nous le ferons ! C’est agaçant d’avoir à mener un tel combat pour montrer juste que nous existons et qu’on a besoin de nous au moment des votes ! On ne nous le demande pas ce que nous sommes capables de faire au moment du vote…
Alors ? En attendant qu’on vienne solliciter vos voix…
Rendez-vous le 3 juillet sur les Champs-Elysées !
Propos recueillis par FXG (agence de presse GHM)