Centenaire de Césaire à Paris et Montreuil
Aimé Césaire prend la place d’un communiste
Un quai à Paris, une place à Montreuil et une soirée à l’Assemblée nationale ont été les temps forts de la célébration du centenaire d’Aimé Césaire dans la capitale.
Le seul hommage national public à caractère républicain, rendu à Aimé Césaire à Paris, a été le fait de l’Assemblée nationale et de son président Claude Bartolone, mardi 25 juin, à l’hôtel de Lassay. La veille, déjà, à l’initiative de Serge Letchimy, les députés ont voté une résolution en hommage à Aimé Césaire. Jean-Pierre Bel, le président du Sénat s’est contenté d’un communique et de l’annonce d’une journée de réflexion en automne sur la pensée de Césaire, à l’image de celle qu’organisera aussi le Palais-Bourbon.
Mardi soir, sous les lambris de la galerie de la présidence de l’Assemblée, Christophe Césaire au piano, Jean-Emmanuel Fatna au ka, Mariann Mathéus et Patrick Karle à la voix ont offert une interprétation du Discours contre le colonialisme, mis en scène par Jean-Paul Césaire (absent pour raison de santé) devant un parterre de personnalités du Paris d’Outre-mer. Au premier rang, autour de MM. Lurel et Letchimy, les sénateurs Larcher et Patient, les députés Fruteau, Vlody et Lebreton de la Réunion, et les eurodéputés Younous Omarjee et Patrice Tirolien. Comme signalé la veille par le député du Mouvement indépendantiste martiniquais, Jean-Philippe Nilor, ni lui, ni Alfred Marie-Jeanne n’étaient présents. Eparpillés dans la salle, où avaient aussi pris place des militants du PPM, se trouvaient le staff de la FEDOM, les conseillers outre-mer de l’ancienne équipe au pouvoir, Olivier Magnaval et Benoît Lombrière, la maire adjointe UMP du 6e arrondissement, la Guyanaise Marie-Thérèse Lacombe, la déléguée interministérielle à l’Egalité des chances des Français des Outre-mer, Sophie Elizéon, la déléguée Outre-mer de la Ville de Paris, Danielle Apocale, le conseiller économique, social et environnemental guadeloupéen, Eustase Janky, la présidente réunionnaise du réseau des Talents de l’Outre-mer, Yola Minatchy, le vice-président de des Jeunes étudiants guadeloupéens, Edwin Laupen, la journaliste Marijosée Alie, la présidente du CNPMHE, Myriam Cottias, l’écrivain Claude Ribbe ou encore le patron du prix Fetkann’, José Pentoscrope. L’affaire s’est terminée par une salve d’applaudissements et un cocktail dînatoire entre happy few sur les pelouses de l’hôtel de Lassay.
Taubira à Montreuil
Le 26 juin, apres le discret hommage du président de la République au Panthéon où il s’est incliné devant la plaque au nom d’Aimé Césaire, la ville de Paris a inauguré, tout près de la passerelle Leopold-Sedar-Senghor, le quai Aimé-Césaire, le long du jardin des Tuileries en bord de Seine. Personne ne pourra toutefois se prétendre de cette adresse postale, ce quai est partie prenante des voies sur berge…
Enfin, mercredi soir, à Montreuil, Christiane Taubira est venue accompagner le maire de cette commune du 93, Dominique Voynet, à laquelle elle venait de remettre le ruban rouge, pour inaugurer la place Aimé-Césaire. A deux pas de l’hôtel de ville, la place Benoit-Frachon (1893-1975), du nom d’un célèbre dirigeant du PCF et de la CGT, était débaptisée pour prendre le nom de place Aimé-Césaire. C’était sans doute, de tous ces hommages, le plus vivant rendu au père de la négritude. D’abord, parce que cette place s’inscrit au cœur de la ville et de ses habitants : un immense ruban bleu peint au sol déroule les phrases incisives du Discours contre le colonialisme entre la place Césaire et celle de la mairie. Mais encore parce que cette substitution de noms donne un prolongement savoureux dans le temps à la fameuse lettre à Thorez de 1953 par laquelle Césaire rompait avec le PCF… Soixante ans après, à Montreuil, Césaire lui a pris sa place !
FXG, à Paris
Trois questions à Claude Bartolone, president de l’Assemblée nationale
« Césaire défricheur d’avenir sur les valeurs qu’il faut respecter »
Votre assemblée honore un membre à la longévité exceptionnelle…
La meilleure manière de rendre hommage à Aimé Césaire, c’est de partir de ses textes, ses discours, ses écrits. Et c’est en entendant sa prose que l’on comprend qu’il est d’une grande actualité. C’est pour ça qu’au mois de septembre, nous réunirons des intellectuels à l’Assemblée nationale pour montrer le côté très présent encore de toute son œuvre. Le texte choisi pour cet hommage, Discours sur le colonialisme, est un symbole fort pour ne jamais oublier. Ce message peut trouver aujourd’hui de nouvelles traductions avec le retour de discours racistes, d’exclusion. Il y a chez Césaire le poète, le politique, le Martiniquais, mais il y a surtout le défricheur d’avenir sur les valeurs qu’il faut respecter.
Quels sont le sens et la portée de la résolution adoptée par les députés lundi dernier ?
Il s’agit de montrer que par son œuvre, il est toujours vivant et qu’il n’est pas simplement rentré dans l’histoire pour qu’on l’y enferme. Il est présent dans les réflexions qui peuvent être celles de l’Assemblée et des parlementaires pour utiliser son message, peaufiner la pensée et l’avenir.
Comment se fait-il que vous n’ayez pas marqué la place où il a siégé avec une plaque à son nom comme il en existe déjà ?
La tradition arrêtée par le bureau de l’Assemblée nationale veut que ce soient les députés morts pour la France ou ceux qui sont devenus Premier ministre ou président de la République qui ont droit à une plaque au sein de l’hémicycle. On m’a posé la question en évoquant le souvenir d’Aime Césaire après le discours de Serge Letchimy, lundi, et je me suis promis de poser la question au bureau pour voir s’il ne pouvait pas y avoir quelques exceptions.
Propos recueillis par FXG, à Paris
Photos RDG