Comité pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage
Le mandat de Françoise Vergès au CPMH est achevé
A moins de cinq mois de la Journée nationale des mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions, le Comité pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage est vacant.
Le mandat de l’équipe présidée par Françoise Vergès a pris fin au 31 décembre, après avoir été prorogé de six mois (il aurait du s’achever en mars 2012, juste avant la présidentielle). Ses ministres de tutelle d’alors, Marie-Luce Penchard et Frédéric Mitterrand, ont confié à sa présidente une mission sur l'avenir du Comité. Ses membres estimaient qu’il était « temps d'ouvrir une nouvelle étape… »
Fondé par la volonté de Jacques Chirac, ce Comité permanent de personnalités qualifiées, instauré en janvier 2004 en application de la loi Taubira, est chargé de « proposer, sur l’ensemble du territoire national, des lieux et des actions qui garantissent la pérennité de la mémoire de ce crime à travers les générations ». Maryse Condé l’a présidé avant d’en claquer la porte. François Vergès lui a succédée en février 2008. On doit à la première le choix de la date du 10 mai pour célébrer « les mémoires de la traite, de l’esclavage et de leurs abolitions », et à la seconde la pose de jalons d’une nouvelle politique publique mémorielle lancée avec les ministères de l’Education nationale, de la Recherche, de la Culture, des régions, des départements et des villes dans l’hexagone et outre-mer. Depuis le 6 mai 2009, le CPMHE attribue chaque année un prix récompensant une thèse autour de ces questions.
Renouvellement imminent
Tous les présidents de la République ont honoré ce 10 mai. Chirac et Sarkozy l'ont coprésidé en 2007. Esi le deuxième a boycoté le jardin du Luxembourg en 2010, il y a présidé la plus réussie en 2011. Quant à François Hollande, il en a fait son premier acte de président en mai 2012.
L’affaire du Jardin d’acclimatation, sur la mémoire des expositions ethnographiques et coloniales, en pleine année des Outre-mer en France, a révélé une demande accrue de « reconnaissance mémorielle et une exigence de vérité historique », selon le rapport de mission rendu à Aurélie Filipetti et Victorin Lurel, en décembre dernier. Celui-ci conclut : « Un récit historique confiné aux limites de l’Hexagone ne parvient pas à rendre compte de la société française. En la réduisant, elle exacerbe les tensions : il faut élargir le champ et renouveler la cartographie de l’histoire. »
Il suggère au final « un renforcement de cette instance consultative unique en matière de politique Mémorielle » pour en faire le centre d’expertise du gouvernement et l’organe de médiation publique citoyenne de référence. A ces recommandations s’ajoute la création du Centre des mémoires de l’esclavage, centre de ressources, de documentation et de rencontres, « en lien avec la future cité des Outre-mer », à la demande de Victorin Lurel..
Le gouvernement aurait déjà rendu ses arbitrages sur ces propositions mais le renouvellement du Comité est suspendu à la modification du décret qui doit faire l'objet d'un examen par le Conseil d'Etat.
FXG, à Paris
Le bal des prétendants
Dans le contexte de cette succession, Daniel Dalin, le président de Collectifdom a adressé un courrier à l’Elysée. Dressant un portrait au vitriol de Françoise Vergès, il lui reproche de s’être alliée avec les « imposteurs communautaires du CRAN » avec les quels elle a signé le « manifeste pour des réparations ». « C’est la porte ouverte à une judiciarisation », déplore Daniel Dalin. Et pour mieux forcer le trait, il dénonce les ascendances esclavagistes de la famille Vergès… Non s’en sans prendre au secrétaire général du Comité, Frédéric Lazorthes, taxé d’être « extrême droite ». « Totalement faux et franchement diffamatoire », rétorque l’intéressé pour qui la lettre de Daniel Dalin à l’Elysée n'est que « la partie émergée d'une campagne et d'un travail de sape destinés à appuyer les visées de certains sur la présidence du Comité » ; les méthodes employées sont qualifiées de « détestables et inqualifiables ». Le Comité se tait comme s’il était inquiet de « l'effet détestable d'une polémique de ce niveau ».
Lors de la cérémonie des vœux du ministre des Outre-mer, le 15 janvier, dans le salon Delgrès de la rue Oudinot, Françoise Vergès, après un petit entretien avec le ministre, nous a confirmé qu’elle n’était plus en poste sans faire d’autres commentaires. Quelques membres sortants du Comité (François Durpaire, Greg Germain) n’ont pas commenté le sujet. Daniel Dalin et Françoise Vergès ont mutuellement sans doute évités de se croiser. Claude Ribbe, organisateur de la cérémonie du Général Dumas le 10 mai à Paris, a pris le soin de nous montrer sur son smartphone la publication de la lettre de Daniel Dalin sur le site Zinfo974. « Beaucoup de gens ont eu le texte de cette lettre… », se défend Claude Ribbe que d’aucun soupçonne d’en être le véritable auteur. « Ce qui est important, ajoute-t-il c'est que Françoise Vergès a signé en qualité de présidente du CPMHE un appel aux réparations du CRAN. »
Serge Romana, le président du Comité marche 98, qui a refusé naguère d’en être membre, a discuté un moment avec le conseiller Outre-mer de Hollande, Marc Vizy. Personne ne revendique ouvertement de candidature mais Daniel Dalin assure qu’il soutiendrait Claude Ribbe ou Serge Romana. Plus loin, semblant plus éloigné de ce théâtre d’ombres, le comédien Luc Saint-Eloy confirme qu’il prépare la mise en scène du prochain 10 mai au jardin du Luxembourg. Un travail inspiré de l’œuvre du togolais Godwin Fété, un parcours ouvert et participatif en 26 stations…
FXG
Les membres sortant
Françoise Vergès, présidente
Greg Germain,
Claude-Valentin Marie,
Henriette Dorion-Sébéloué,
Guy Lavaud,
Jean Hébrad,
Myriam Cottias,
Marie-Hélène Joly,
Jean-Claude Judith de Salins,
Frédéric Régent,
Philippe Pichot,
François Durpaire
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