Defisc et subventions
L’Etat fait ses calculs pour compenser le dernier coup de rabot sur la défisc
Au lieu de 18 000 euros + 4% du revenu, la défiscalisation outre-mer est ramenée par le Conseil constitutionnel à 18 000 euros. L’Etat affirme qu’il compensera, mais sur quelle base ?
« Notre combat ne porte pas sur l’outil défiscalisation, ce qui importe c’est sa finalité : quel sera le montant global de l’investissement ? Là sera notre combat. » Le cabinet de Victorin Lurel doit anticiper la stratégie qu’il va devoir déployer face aux caisses fermées du ministère du Budget maintenant que le président Hollande a promis, après l’invalidation des plafonds de la defisc dans la loi de finances, de substituer la perte de l’investissement par des subventions. A combien s’élève réellement cet investissement défiscalisé ? Depuis des années, les lois prévoient des commissions d’évaluation pour estimer les sommes, mais les chiffres divergent selon qu’on la soutienne ou la combatte. Ainsi, opposant historique de la défiscalisation, Gilles Carrez, président UMP de la commission des finances s’étranglait le 14 novembre dernier, lors de l’adoption des articles de loi en question : « Un milliard d’euros avec l’investissement locatif social ! » « Seulement 850 millions d’euros prévus pour 2013 », l’a repris le PS Christian Eckert, rapporteur général.
Citant Gilles Carrez et Pierre Méhaignerie, Charles de Courson (UDI) a rappelé ces chiffres : « Grosso modo, l’impôt sur le revenu rapporterait 100 milliards d’euros s’il n’existait aucune niche fiscale et il n’en rapporte que 55 milliards d’euros. »
Serge Letchimy a déclaré que « lorsque le dispositif fiscal a atteint sa plénitude, il portait sur environ 3 milliards d’euros d’investissements alors que ce dispositif porte sur 700 millions d’euros, lesquels financent principalement des investissements productifs.
Jean-Philippe Nilor (GDR) et Charles de Courson ont cité 675 millions d’euros, pour le bâtiment et le logement social. Selon le rapport des sénateurs Patient (PS) et Dolige (UMP) de la commission des finances du Sénat, le montant récolté pour le seul logement social a été estimé à 150 millions d’euros à cette fin en 2012. 200 millions, selon Gilles Carrez contre 80 millions il y a deux ans.
400 ou 800 000 euros
Le ministre du Budget Jérôme Cahuzac a donné lors de cette meme seance, le chiffre de Bercy : « Le montant de la défiscalisation représente en moyenne un peu plus de 400 000 euros par an pour les cent plus gros contribuables de notre pays, qui diminuent ainsi considérablement leur impôt sur le revenu. » 472 000 en 2011, selon Gilles Carrez.
Le ministre des Outre-mer indiquait, lors de la présentation de son budget en octobre, 425 millions défiscalisés en 2012 au titre du seul investissement industriel Girardin dont 330 pour la seule usine de nickel dans la Province Nord de Nouvelle-Calédonie.
En 2013, selon Christian Eckert, il était prévu 800 millions. Cette somme, en principe, sera donc amputée des 4 % du revenu en sus de 18 000 euros du plafond. Les antidéfiscs qui exagéraient la somme pour combattre le dispositif devraient désormais la minorer vu qu’il va falloir compenser…
« On ne sortira pas du dispositif sur le dos de l’Outre-mer », confiait récemment un proche du ministre. Par ailleurs ce panachage de defisc et de subvention qui anticipe l’avenir (réforme de la défisc pour 2014), pose un autre problème, plus politique : la défiscalisation avait l’avantage de refléter la dynamique propre des territoires en faisant émerger des projets. Là, le monde de l’entreprise va se retrouver face aux pouvoirs publics dont il pourra tester le volontarisme politique. Et puis, ce n’est plus la même chose quand les crédits budgétaires sont actionnés par le politique. Ça peut être perçu comme le fait du prince.
FXG