Deuxieme journee du proces Mamodtaky
La défense décrédibilise l’enquête
L’audition du policier qui a dirigé l’enquete de la tuerie de la famille Remtoula à Madagascar en avril 2011 a permis a la défense de fragiliser l’accusation.
« Je veux bien reconnaître des contacts avec Me Marianne Razafimanana ; il y a mon adresse mail sur ces mails. Je ne me souviens pas (les) avoir envoyés… J’ai un copain qui voulait recaser des centrales d’écoutes téléphoniques, mais je n’ai pas proposé d’argent à Marianne. Si elle servait d’intermédiaire, c’est lui qui l’aurait rémunéré. » La révélation, hier devant la cour d’assises de Créteil, par Me Dupond-Moretti de cinq courriels adressés entre 2007 et 2010 par l’officier de police judiciaire et directeur d’enquête, Gérard Demmer, a Marianne Razafimanana, l’un des principaux témoins a charge du procès Mamodtaky a été un coup de théâtre. La défense a vu dans ces courriels pas moins de trois délits : violation du secret de l’instruction, subornation de témoin et faux… Depuis l’ouverture de l’audience, hier matin, la cour auditionnait l’officier de police désormais en retraite. Celui-la même dont la cour d’assises de Saint-Denis avait mis en cause l’impartialité lors du premier procès Mamodtaky en 2007 après qu’un soupçon sur une éventuelle liaison avec la principale victime, Anita Remtoula a été levé. Et tandis que Mes Baloup et Boniface, avocats des parties civiles, s’efforçaient par leurs questions de démontrer que l’enquête de Demmer avait bien exploré toutes les pistes, la défense attendait son moment : « Vous rirez moins tout à l’heure », avertissait Me Dupond-Moretti. Le contenu des mails révélés (voir hors-texte), ce dernier menaçait même de demander un supplément d’information. Bien que surpris par cette révélation, le ministère public et les parties civiles ne se sont pas opposés à la requête de la défense. « Un point important et regrettable », selon l’avocat général Jean-Paul Content. « Nous déplorons que le témoin ait eu cette relation épistolaire avec Me Razafimanana, mais cela ne veut pas dire que ça ferait échec à ce procès. Nous cherchons nous aussi la vérité et nous savons que Mamodtaky a tué ces gens », a déclaré Me Jean-Michel Baloup qui a remis toutefois en cause la légalité du procédé. « Et si c’était Marianne Razafimanana qui nous avait remis ces mails », a répliqué Eric Dupond-Moretti. Avec la reconnaissance même partielle des faits par Gérard Demmer, actée par le président Jean-Paul Albert, la défense a renoncé à sa requête, satisfaite d’avoir ainsi décrédibilisé le travail du policier qui est reste pantois. Dupond-Moretti s’en est pris au ministère public : « Vous le défendez depuis le début alors que l’avocat général de Saint-Denis a demandé la nullité de son enquête et stigmatisé son comportement. »
Le président Albert suspend l’audience. Dehors, dans la salle des pas perdus, Anita Remtoula pleure.
FXG, à Créteil
Les mails de Gérard Demmer à Marianne Razafimanana
1er mail du 19 mars 2007 : « … Vous pouvez sans crainte m’adresser vos informations (…) Je continue mon interrogatoire de Damjy. Salutations cordiales. Gérard. »
2e mail du 22 mars 2007 : « Je pense que la presse demain dira plus de choses plus précises… Saya a avoué et a partiellement craqué. Merci pour votre collaboration tellement efficace (…) La chute de Mamodtaky n’en sera que plus douloureuse. La famille Remtoula aura tout le temps de faire son deuil. Cordialement. Gérard. »
3e mail de juin 2007 (l’enquêteur tutoie désormais le témoin)
« Merci pour tes informations (…) Le dossier va être bouclé (…) Compte sur nous pour que la presse ne t’en remette pas une couche. »
4e mail du 11 janvier 2009
« Tous mes vœux (…) J’ai eu le président du tribunal. Pas de problème pour le billet d’avion (…) Aux dernières nouvelles, Dupond-Moretti ne veut plus défendre Mamodtaky pour impayé (…) J’ai relancé mon ami pour les centrales d’écoutes téléphoniques à Madagascar. Nous cherchons un correspondant pour ouvrir une porte et le mettre en contact avec un décideur. J’ai pensé à toi contre rémunération bien évidemment… »
Dernier mail du 24 novembre 2010
« (…) Le procès est terminé. (…) Chute de Mamod… »