Docufiction : Cesaire, le prix de la liberte
Alex Descas est Aimé Césaire
Un étudiant noir de Nanterre vient rencontrer le député Césaire. Celui-ci le reçoit dans la bibliothèque de l’Assemblée nationale. Nous sommes en 1986, avant-dernière mandature législative du poète maire. « J’habite une version absolument ratée du paradis et c’est parfois pire que l’enfer… », dit-il à Julien Béramis, l’étudiant. « Le choix d’Alex Descas pour incarner Césaire a été évident », raconte Jean-Loup Monthieux, producteur. Quant au jeune Alex Ogou, dans le rôle de Senghor, « il a pour lui d’avoir la bonne taille vis-à-vis de Descas pour respecter les proportions des deux poètes », s’amuse un membre de l’équipe de tournage…
Autre séquence, à l’Assemblée, dans l’hémicycle, trente ans plus tôt, avant le congrès de Varsovie, après le vote des pleins pouvoirs à Guy Mollet pour l’Algérie, avant la lettre à Thorez. Senghor, sur les bancs, écoute son ami Césaire à la tribune… « A la présidence de l’Assemblée, relate François Fèvre, on nous a dit : si c’est pour Césaire, on autorise ! »
Ces scènes sont quelques unes des parties fictionnées de ce « Césaire, le prix de la liberté » que proposent France Zobda (Eloa productions) et François Fèvre (Caméra one télévision), les producteurs de ce docu-fiction de Félix Olivier et Christophe Chevalier. A l’origine, ce devait être « Césaire, le solitaire »…
D’autres scènes ont été tournées, avec Alex Martin en Léon-Gontran Damas, ou Laurent Claret en François Mitterrand, à la cité universitaire internationale de Paris, au restaurant, ou au lycée Louis-le-Grand… Porteuse du projet depuis le mois de septembre dernier, France Zobda est allé chercher un vieil ami martiniquais, François Fèvre, le fondateur d’ATV. Il avait déjà produit pour la collection Empreinte, un documentaire sur Césaire. Cette fois, il s’agit davantage de parler du Césaire politique que du littéraire, du Parisien plus que du Martiniquais. Une manière de rappeler comme le dit François Fèvre : « Césaire manque au débat. »
FXG, à Paris
Le film est programmé sur France Ô, le 26 juin à 20 h 45 dans le cadre d’une soirée consacrée au centenaire de la naissance d’Aimé Césaire.
Interview croisée de France Zobda et François Fèvre, producteurs de Césaire, le prix de la liberté.
« Ce qui nous intéresse, c’est sa dimension politique nationale »
Comment est née l’idée du docu-fiction ?
François Fèvre : En 1956, à l’Assemblée nationale, il n’y avait pas de caméra et quand il y en avait, les séances de nuit n’étaient pas filmées…
France Zobda : On a voulu allier le documentaire et la fiction parce qu’il y a beaucoup d’images d’archive que l’on ne pouvait pas trouver. La fiction permettait de les reconstituer ; Et puis, il y a déjà eu beaucoup de documentaires… Pourquoi ne pas prendre la fiction pour le rendre plus proche des gens aussi…
Quelle valeur ajoutée apportera la fiction aux documentaires existant comme le vôtre ?
François Fèvre : On fait quelque chose de différent parce que le sujet n’est pas le même. Pour Empreinte, on a fait un Aimé Césaire sur l’ensemble de sa vie avec son expression. Cette fois, ce qui nous intéresse, c’est sa dimension politique nationale ou encore la facette de Césaire en métropole même s’il y a des choses qui se passent en Martinique. Eloa prod est spécialisée dans la fiction, Camera one télévision dans le documentaire. On a conjugué nos forces pour faire quelque chose de différent et racontant autre chose de la personnalité d’Aimé Césaire.
Les scènes à l’Assemblée nationale se situent à quel moment de sa vie ?
François Fèvre : L’une se passe en 1986, après un discours éprouvant, tard la nuit… Un étudiant vient l’interpeller, mais je ne vais pas raconter la fin du film !
France Zobda : L’autre est en 1956, une date importante chez Césaire…C’est un moment fort pour lui et un angle pour nous…
C’est une date plus importante que 1946 et la départementalisation ?
France Zobda : On en parle quand même de la départementalisation, mais 1956 représente un démarrage plus important.
François Fèvre : 1946, ce sont les débuts de Césaire en politique alors qu’en 1956, c’est un moment charnière. Et puis dans une heure de programme, il faut faire des choix parce que la vie de Césaire se résume en beaucoup plus qu’une heure…
France Zobda : On va aussi retrouver le jeune Césaire à l’époque de l’Etudiant noir avec Senghor au lycée Louis-le-Grand ; Le film fait de grands sauts dans l’histoire.
Y est-il question de cet échange avec Mitterrand qui propose à Césaire un ministère en 1981 ?
France Zobda : Pas tout à fait… On parle d’une rencontre entre les deux hommes pour se rendre compte de la position de Césaire par rapport à Mitterrand. Donc, on a fait une rencontre dans un restaurant…
Pas de scène avec Nicolas Sarkozy ?
France Zobda : Non. Le président Sarkozy apparait à la fin lors des obsèques. On lui a laissé cette place et l’épitaphe au Panthéon.
Propos recueillis par FXG, à Paris