Edith Lefel - la commémoration au Cabaret sauvage
Un concert pour Edith Lefel
Le 18 janvier prochain au Cabaret sauvage, à Paris, le producteur d’Aztec musique, Eric Basset, et une dizaine d’artistes caribéens offrent un concert pour commémorer la chanteuse Edith Lefel disparue, il y a 11 ans, un 28 janvier. Interview de Tony Chasseur, directeur artistique de la soirée.
« Une commémoration et une transmission »
Quelle est la genèse de cette commémoration ?
Eric Basset, comme il l’avait fait avec Malavoi l’année derniere ! Il est un amoureux de ces artistes depuis fort longtemps et il vient de réaliser un joli documentaire sur Edith. Il avait envie d’agrémenter cela de choses vivantes et pas simplement d’éléments d’archives puisque ce concert sera capté. C’est un monsieur qui pense aussi en termes de transmission avec de jeunes artistes qui n’ont pas connu Edith vivante, mais qui chanteront ses chansons. Il s’agit de perpétuer la voix, le talent et le souvenir de cette grande chanteuse. On se remémorera notre amie et son sourire à travers ses chansons. Nous serons une vingtaine sur scène…
Quel va être votre rôle ?
Je vais chanter, c’est ma première fonction. Mais j’ai établi le répertoire qui sera au programme et pour que ca ne soit pas trop rigide, il y aura beaucoup de duos, de trios, de combinaisons… Ce sera un concert, mais l’interprétation des chansons sera plus imagée que le simple chanteur qui vient interpréter sa chanson d’Edith. Il y aura beaucoup de parties instrumentales, car quand Edith était là, on permettait beaucoup aux arrangeurs d’exister dans la musique antillaise. Ça va faciliter les relais entre les voix. Ce sera dynamique de voir Fanny avec Lynnsha, des choristes venir chanter en lead devant, ou Warren chanter une chanson d’Edith…
Vous-même, que chanterez-vous ?
Je prefere ne pas le dire… Il faut garder un peu de surprise. Le conducteur existe, phrase par phrase ! Je peux dire encore qu’il y aura Valérie Louri qui vient de lui consacrer un album hommage à sa couleur (Edith Lefel tribute, ndlr), Loriane Zacharie dont le timbre de voix est très proche de celui d’Edith, Tanya Saint Val… Jean-Luc Alger qui a chanté Ich Manman avec elle sera là aussi. Il y aura 21 chansons, les plus marquantes de son répertoire.
Qui va assurer l’accompagnement musical ?
J’ai essayé de réunir les musiciens qui avaient travaillé avec Edith, ceux qui étaient son back band… On retrouvera son saxophoniste Nicolas Guéret qui a été très proche d’elle, et son équipe de cuivres, Christian Martinez et Philippe Henri. Il y aura évidemment Marie-Céline Chroné, Thomas Bellon à la batterie, qui remplace Hervé Laval. Thierry Vaton et Bago seront aussi sur scène, et nous avons un jeune guitariste qui a pris le relais, Alex K-By.
Ronald Rubinel sera-t-il de la partie ?
Nous espérons que Ronald et les enfants d’Edith seront des nôtres. C’est tout à fait envisageable. Ronald, de toute façon, est derrière tout cela. Il n’y a pas eu une avancée dans ce projet sans qu’il n’ait été informé et sans qu’il n’ait donné son assentiment !
Une telle commémoration ne devrait-elle pas être relayée par nos medias nationaux eu égard à la personnalité d’Edith ?
(Rires…) Je veux bien reconnaître que pour ces medias la disparition d’Edith ne soit pas d’actualité quoiqu’une chanson est éternelle… Pour Edith, nous dirons à la limite que ce n’est pas grave, mais faut-il devenir un Noir intégriste avec des propos subversifs pour passer à la télé nationale ? Peut-être que notre image est trop lisse, que nous n’avons rien de dérangeant à proposer… Nos artistes ne sont pas des gens qui s’exhibent avec un slip panthère, pas non plus des gens auxquels on peut demander s’ils boivent, s’ils se droguent ou s’ils s’envoient quinze gonzesses dans une chambre… Nous avons des auteurs, des gens qui écrivent des textes… La langue est-elle une barrière ?
Propos recueillis par FXG, à Paris
Un documentaire sur France O, le 24 janvier
Edith Lefel, une vie est le documentaire réalisé par Eric Basset. Conçu à partir d’archives et de témoignages, le film raconte qui était Edith Lefel, mais aussi quelles traces elle a laissées. « C’est pour ca, explique le réalisateur, que nous avons laissé la place à des chanteuses comme Milca, Leila Chicot ou Lynnsha qui sont la génération d’après, mais qui se reconnaissent dans ses traces. » Et puis bien sûr, le film donne le plus possible la parole à Edith. Beaucoup d’interviews ont été exhumées, comme pas mal d’images d’émissions de télé, de concerts et de clips. « J’ai été à la rencontre de ceux qui ont participé à son histoire et qui l’ont bien connue. Tony Chasseur en fait partie, comme Marie-Céline Chroné, Philippe Lavil, Ralph Thamar… » Au final, ce qui ressort de cette femme, c’est son aura, son humilité, son ouverture aux autres, « le tout agrémenté d’un professionnalisme hors pair et d’une gentillesse à toute épreuve », parole de producteur.
Warren chante Edith
« Un événement familial »
Que représente Edith Lefel pour un chanteur de votre génération ?
Elle est d’origine guyanaise et elle a grandi dans la même commune que moi à Saint-Laurent du Maroni. Nos familles se connaissaient ! Elle represente une grande dame et, enfant, j’ai suivi la carrière de cette grande artiste de la communauté afro-caribéenne.
Avez-vous compris que Tony Chasseur vous sollicite ?
Je me suis dit : Pourquoi moi ? Mais, entre la pression et la joie, je me dois honorer cette invitation ! Dans l’idée du passage de relais, ç’aurait pu être moi comme un autre de la scène de la nouvelle génération…
Qu’allez-vous chanter ?
Je vais interpréter deux chansons, deux figures imposées. Il y aura un titre en duo avec Tony Chasseur et un autre que je ne dévoilerai pas. Ce sera un carrefour intergénérationnel et on va jouer la carte de la famille, de l’union. On sera dans la même énergie de groupe, même si des artistes, comme Tanya, ont un regard sur nous les jeunes artistes et n’hésitent pas à nous parler, nous conseiller… Ce sera un événement familial.
Edith Lefel a-t-elle influencé votre creation ?
Carrément ! j’ai toujours dit que ma musique était un mélange de ce qu’écoutaient mes parents, de mes origines, de ce qui a bercé mon enfance. Et ma plus tendre enfance, c’est Tanya, Edith, Jean-Michel Rotin, Kassav, La Perfecta… Il y a cette empreinte bien diluée derrière ma musique avec de la soul, de la r’n’b ou de la pop. Edith fait partie de ces artistes qui ont influencé la couleur de ma musique.
Quel est votre titre préféré d’Edith ?
Mon ange. Je sais pas si c’est bien de le dire, mais j’ai toujours été attaché à des artiste comme… Daniel Balavoine. Sa derniere chanson avait un rapport avec le passage à l’au-delà et dans cette chanson d’Edith, franchement, j’ai ressenti exactement la même chose. Donc, s’il y a une chanson d’elle qui me touche, c’est celle-là. Je pourrai même la reprendre dans un album. J’en ai carrément envie.
Propos recueillis par FXG