Faces au théâtre de la Ville
Face à Faces
Faces, une chorégraphie et mise en scène de Maguy Marin en collaboration avec Denis Mariotte au Théâtre de la Ville jusqu’au 21 octobre.
© Jean-Pierre Maurin
Le Festival d'Automne propose ce spectacle dans le cadre d’une monographie consacrée à Maguy Marin.
Au fond de la scène, face à la salle, un vaste miroir réfléchit l’image du public. Le noir se fait dans la salle, le plateau est éclairé et les 28 danseurs du ballet de l’opéra de Lyon entrent un à un et se figent en fixant leur regard vers les spectateurs. La scène, silencieuse, dure… Quelques raclements de gorge se font entendre, semblant même créer une forme de dialogue d’ennui dans la salle. Le public est jeune, scolaire, accompagné de professeurs, d’agents de médiation culturelle et d’abonnés à Télérama ou aux Inrock. Les danseurs sont toujours immobiles, le noir se fait en même temps qu’une déferlante sonore (création de Denis Mariotte), très dense, bouscule l’écoute et l’espace. Cette « musique concrète » accompagne dans un hyper ralenti une alternance de pénombre et de clair-obscur qui permet un enchaînement d’images arrêtées sur des acteurs figés, qui vont représenter tous les tableaux de cette chorégraphie. Il s’agit selon l’auteur qui cite volontiers l’ouvrage « Masse et puissance » d’Elias Canetti, de mettre en scène « les natures de la métamorphose des masses humaines » et de montrer ainsi ce que l’homme en foule est capable, du meilleur comme du pire. La foule portant lunettes de soleil et chapeau va ainsi se commuer en foule de croisés, de croyants, de consommateurs, de footballeurs, mais aussi en foule de morts dans les charniers… C’est comme si des enfants jouaient à « 1,2, 3 Soleil » pour dévoiler à chaque temps d’arrêt un de ces tableaux, étape singulière de la nature de la métamorphose de la masse humaine. Voilà pour le procédé qui se déroule avec une régularité exemplaire tout au long de l’heure que dure ce ballet contemporain.
© Jean-Pierre Maurin
Ca ne prend pas vraiment dans la salle (applaudissements mous et départs au moment des saluts). Les spectateurs qui sont venus là ont répondu à la convocation de leurs éducateurs soucieux de leur faire partager la proposition du Théâtre de la Ville, une grande salle subventionnée par la ville de Paris, dirigée par le metteur en scène Emmanuel Demarcy-Mota, par ailleurs directeur du festival d’automne. Ces dernières minutes du spectacle nous questionnent sur les enjeux des politiques culturelles avec leur généreuse envie de partage (Frédéric Mitterrand parlait volontiers de « culture pour tous » en bon héritier de Jean Vilar) et leur difficulté manifeste à transmettre au public. Sans doute eût-il été intéressant de déplacer ce programme artistique dans une salle de banlieue et d’inviter les spectateurs à incarner eux-mêmes, à la place des danseurs de l’opéra de Lyon, ces figures humaines agrégées en masse. Le spectacle est un jeu. Plutôt que d’y convoquer la jeunesse, les médiateurs culturels devraient s’attacher à cultiver son désir.
Augustin De Coulondres
Programmation «Portrait Maguy Marin» dans le cadre du Festival d'Automne 2012
— du 16 oct. au 27 oct. 2012, théatre de la Bastille, Création 2012.
— du 13 nov. au 15 nov. 2012, Le Centquatre, Cap au pire.
— du 16 nov. au 17 nov. 2012, Le Centquatre, May B.
— du 20 nov. au 1 déc. 2012, théâtre du Rond-Point, May B.
— du 22 nov. au 27 nov. 2012, théâtre de la Cité Internationale, Ca quand même et Prises/Reprises.
— du 29 nov. Au 1er déc. 2012, théâtre National de Chaillot, Cendrillon.
— du 6 déc. au 8 déc. 2012, maison des Arts de Créteil, Cendrillon.
— du 13 déc. au 15 déc. 2012, théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines, Cendrillon
— le 3 déc. 2012, La Cinémathèque française, Maguy Marin: retour sur Umwett.