Kenjy Grillon, champion du monde de karate
Kenjy Grillon, champion du monde de karaté
Un jeune combattant de 23 ans, Kenjy Grillon, d’origine antillaise, né à Bondy (93) de père guadeloupéen et de mère martiniquaise, est devenu champion du monde de karaté samedi à Bercy.
Sur le tatami du palais omnisport de Pris Bercy, en présence de sa famille et de son oncle venu spécialement de Guadeloupe, Kenjy Grillon a créé la surprise, samedi 24 novembre, en remportant sa finale devant le Japonais Araga Ryutaro, un vaillant combattant qui n’a pas résisté à la puissance du Guadeloupéen. Une victoire sans appel par 6 points à 3, dans la catégorie des 84 kg, en kumite individuel masculin. Le dernier titre de la France date de 2002 à Madrid, par la victoire de Yann Baillon. Le POPB est survolté, « Kenjy, Kenjy, merci ! » Heureux, il déploie ses bras devant ses 15000 fans qui ont trouvé leur idole. Il plane sur le toit du monde. Il est champion du monde.
A 23 ans, le gamin de Bondy qui a fait ses premiers pas à Bobigny avant de rejoindre le club de Garges les Gonesse pour se perfectionner et s’aguerrir savoure sa victoire. Il saute dans les bras de son entraineur, Victor Beaudry. Pour ce dernier, son poulain est un véritable professionnel : « Un jeune homme pointilleux. Il s’investit dans son travail. Il a une bonne hygiène alimentaire. » Alors qu’on fait déjà la fête dans les travées, il déclare : « Le public de Bercy est magnifique. Il m’a transcendé. C’est la première fois que je vis une telle ferveur. » Son rêve est exaucé. Avec cette victoire masculine, la France reste parmi l’élite mondiale de la discipline.
Malgré un doigt en piteux état, il est allé au bout, au bout de la souffrance. « Au championnat du monde, on ne peut pas craquer pour un doigt. C’est au mental que ça se joue. » Il détient un atout redoutable, ses bras, à la fois armes et boucliers. Son point fort, sa volonté à toute épreuve et sa grande technique des jambes lui donnant de la vélocité, lui permettant de jaillir et surprendre. Puis, il suffit qu’il frappe.
Sa victoire, Kenjy l’a construite après un long chemin. « J’ai travaillé dur. En montant sur le tatami, je n’avais qu’une idée en tête, battre mon adversaire. Je me suis concentré sur lui. Et, une fois la victoire acquise, j’ai tout lâché. J’étais en apothéose. C’est magnifique ! » explique-t’il, sa médaille autour du coup. Il rappelle ses glorieux ainés, tels qu’Emmanuel Pinda, Gilles Cherdieu ou David Félix, grands maîtres du tatami mondial.
Alfred Jocksan (agence de presse GHM)
Trois questions à Kenjy Grillon, nouveau champion du monde de Karaté
" On dit que le travail paye, je le prouve "
Comment avez-vous préparé cette finale mentalement ?
Ma technique était de partir le premier dans ce combat et surtout d’être bien mobile. Mon adversaire était très tonique avec des actions très courtes. Le travail a été fait et je remporte ce combat. Je suis champion du monde. C’était mon objectif avant l’ouverture de la compétition. Je suis content de réaliser mon rêve. Je serai encore plus heureux si je réalisais le doublé, une médaille d’or avec l’équipe demain. Je serais encore plus heureux.
A quels moments avez-vous pensé que vous aviez gagné ?
C’est seulement quand le gong a retenti à la fin du combat quand l’arbitre a annonce ma victoire. Là, je vois que je mène, c’est un soulagement. Puis je pense à mes parents, mon oncle venu de Guadeloupe, mes cousines et cousins qui étaient dans la tribune. Ils étaient comme des fous. Pour moi, c’est magnifique. On est à Paris, il me fallait absolument gagner, je me suis investi. On dit que le travail paye, je le prouve.
Depuis 2002, il n’y a pas eu de champion du monde masculin en France. Etes-vous conscient de l’espoir que vous portez ?
Je suis extrêmement honoré. Il est important de remporter ce championnat. Pour moi, c’est la folie. Je vis le moment présent. Etre champion du monde, ça donne des ailes.
Propos recueillis par AJ
Ils ont dit
Son entraineur, Olivier Beaudry : « Kenjy s’entraîne comme un professionnel, pointilleux jusqu’à la nourriture. Il a fait beaucoup de sacrifices pour être là aujourd’hui, malgré sa jeunesse. Il remporte le titre d’une superbe manière contre un japonais qui était très fougueux, très dur, dans un combat serré. Il se détache dans la deuxième partie du combat. Je vous dis qu’il a préparé ce rendez vous de Paris avec un entrainement personnalisé. Il a tout misé pour ce championnat qui était important pour lui. A Bercy, devant son public, devant ses parents, sa famille venue de Guadeloupe pour l’encourager. Personnellement, je n’ai eu aucun doute sur ses capacités à pouvoir gagner, malgré sa blessure au doigt et la douleur, il a décroché son premier titre. Sa médaille est une récompense pour toute l’équipe de France. Je suis fier de lui. Grace à sa victoire, il hisse la France au rang de premières nations. C’est un Antillais et les Antilles sont des fournisseurs de champions dans les arts martiaux. C’est une bonne chose. »
Sa mère, Sonia, originaire de Trenelle, Fort-de-France : « J’ai félicité mon fils. J’ai dit bravo, c’est super, extraordinaire ce que tu viens de réaliser. Dans la tribune, j’ai vécu son combat avec beaucoup d’intensité, beaucoup de stress. C’était dur à supporter jusqu’à la fin. Mais, j’avais confiance en lui, je savais qu’il allait gagner. Il avait travaillé pour être prêt le jour J. Et ça a été le cas pour mon plus grand bonheur. Il est champion du monde et à Paris. En tribune avec toute la famille, nous avons crié, poussé, filmé pour l’encourager ou pour qu’il attaque et marque un maximum de points. Il devait être le patron sur le tatami. Car à ce stade de la compétition, on ne fait pas de cadeaux si on veut être champion du monde. Je suis ravie, fière pour mon fils. »
Son papa, Eric Grillon : « C’est une finale particulière, nous sommes à Paris Bercy, le lieu des stars et des champions. J’ai dit à mon fils qu’on ne doit pas perdre ici. Nous sommes chez nous. Il faut aller chercher cette victoire. C’est son troisième championnat du monde. Au Japon, il a raté la médaille et en Serbie, il s’est mis trop de pression. Il a été tétanisé. Il gagne bien par 6 à 3. C’est une belle victoire. Je suis heureux, malgré un début de combat très stressant. Mais à trente seconde de la fin, quinze secondes, dix secondes, je me suis dit, c’est bon, on a la victoire. C’est un titre qui fait du bien à tout le monde. »
Propos recueillis par Alfred Jocksan