Le pari outre-mer avec Stomy Bugsy Edouard Montout et Stany Coppet
Stany Coppet réunit Edouard Montout et Stomy Bugsy sur scène
Le festival Le pari outre-mer qui se déroule du 27 au 29 nombre au 104, dans le XIXe à Paris s'ouvre par une lecture de textes sur l'esclavage et la colonisation.
Discours et poèmes sur le colonialisme et l’esclavage est un montage de textes de Malcolm X, Léon Gontran Damas (Pigments), Jesse Jackson, l’esclave américain Frederick Douglass, Alexandre Dumas (L’ingénue), Frantz Fanon (Peau noire, masque blanc), Aimé Césaire (Discours sur le colonialisme) et Huey P. Newton (Revolutionary suicide), rassemblés par le comédien guyanais Stany Coppet. Après l’avoir joué seul sous le kiosque de l’amandier à Cayenne, puis au festival des Tréteaux du Maroni et aux Nuits du maronaj à l’Encre de Cayenne, Stany Coppet a voulu poursuivre l’aventure avec son compatriote Edouard Montout et le chanteur comédien capverdien Stomy Bugsy, dans une mise en espace accompagnée musicalement de Vivaldi, Haydn, Bach, Ben Harper, Massiv attack et de percussions. Cette nouvelle création a inauguré le festival Le pari outre-mer qui s’est ouvert à Paris, vendredi soir (28 novembre) et devrait par la suite voyager aux Antilles et en Guyane… En attendant, Stomy Bugsy s’apprête à sortir un nouvel album avec la MC Malcriado, Fidju criulo. Edouard Montout sera bientôt sur France Télévision aux côtés d’Anthony Kavanagh dans une série, Les amants de l’ombre, de Philippe Niang. Er l’on verra bientôt Stany Coppet dans Chienne de lutte de Jérémy Banster avec lequel il écrit un long-métrage dont on sait juste qu’il se passe en forêt amazonienne, une sorte de Into the wild de Sean Penn.
FXG, agence de presse GHM
Interview croisée
« Si je me définis par mon corps, je nie l’univers »
Comment s’est fait la fusion entre vous autour de ces textes ?
Stany Coppet : Je pensais depuis longtemps à Edouard et il y a deux mois, j’ai croisé Stomy...
Stomy Bugsy : On a papoté autour d’un verre de vin. Souvent paroles de nuit ne voient pas le jour, mais Stany m’a rappelé peu après. Les textes sont tellement riches et une lecture par des comédiens amène du vivant…
Edouard Montout : Certains textes sont désuets mais ont force de mémoire. Je ne veux pas revenir avec un cheval de bataille : notre peuple qui a souffert… Mais avec ce qu’on veut nous faire avaler sur l’identité nationale, je trouve qu’il y a des choses qui résonnent aujourd’hui.
Que représentent ces textes pour vous ?
Stomy Bugsy : Ces textes constituent ce que je suis, à 100 %, un homme créole, métis, noir. C’est mon histoire, mon sang. Mon peuple a été créé de ça, de l’esclavage des hommes… De tout ça est né une belle nation avec un lourd passé.
Stany Coppet : Ces textes sont mon identité nationale. Ils font partie de mes classiques.
Edouard Montout : Je me rappelle d’un texte de Bernard Dadié : « Je vous remercie mon Dieu de m’avoir créé Noir et d’avoir fait de moi la somme de toutes les douleurs ». De la colonisation et l’esclavage, n’est-il pas né la poésie, le militantisme ? Aurait-on eu tous ces penseurs là s’il n’y avait pas eu l’adversité et l’horreur ? Tous ces textes sont une réaction à cette souffrance. Je ne légitime rien, mais je lance une idée…
Vous dites à un moment un texte sur le regard que l’on porte au Noir, « l’ennemi de l’Europe ». Avez-vous pu ressentir un tel regard ?
Edouard Montout : Quand Malcolm X disait : « Je suis assis à cette table et je ne profite pas du fruit de l’Amérique ». Je pose la question : profitons-nous des fruits de la France ?
Stomy Bugsy : Ca m’attriste de parler d’Aliker... Dans ce film, nous essayons de raconter notre histoire, l’histoire de France aussi ! Comment les acteurs et réalisateurs noirs doivent se battre pour survivre dans cette industrie.
Stany Coppet : Pour ce spectacle, j’ai frappé à de nombreuses portes et on m’a dit : « Encore des histoires d’esclavage… Pourquoi revenir avec ça ? ». Heureusement, il a trouvé sa place naturellement au festival Le pari outre-mer…
Edouard Montout : En France, Le film La première étoile a cartonné. Si ça n’avait pas été une comédie, il ne serait même pas sorti. Si Aliker avait été une comédie, il aurait eu sa place. On est crédible si on n’est pas penseur. On est écouté quand on gagne une coupe du monde, un match de tennis ou alors on doit faire rire ! Spike Lee en France, ce n’est pas pour demain.
Qu’est-ce que c’est pour vous d’être Français ?
Edouard Montout (citant Huey P. Newton): Si je me définis par mon doigt, je nie ma main…
Stany Coppet : Si je me définis par ma main, je nie mon corps…
Stomy Bugsy : Si je me définis par mon corps, je nie l’univers.
Propos recueillis par FXG, agence de presse GHM
PS
Le théâtre de l'Air Nouveau donnera lui aussi une représentation exceptionnelle de Trottoir chagrin, pièce de Luc Saint-Eloy, mise en scène par l'auteur avec Agnès Noël et Stephane Demangeat - Prologue de Patrick Saint-Eloi. Le 27 novembre à 20h 30 Salle 200 au 104 rue d'Aubervilliers 75019 Paris, M° Riquet.