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Publié par fxg

Le procureur de la République de Saint-Denis, Philippe Muller, conteste sa mutation à Grenoble devant le Conseil d’Etat

Le Conseil d’Etat a examiné, mardi midi, le référé suspension du Philippe Muller contre le décret du 18 juin dernier qui le nomme avocat général à la cour d’appel de Grenoble. Menés par le président de la première sous-section, Jacques Arrighi de Casanova, les débats ont mis face à face l’avocat de l’ancien procureur de la République de Saint-Denis, Alain Monod, et le directeur des services judiciaires de la chancellerie, Jean-François Beynel. Pour justifier sa démarche, Me Monod devait établir l’urgence et démontrer un doute sérieux quant à « cette mutation dans l’intérêt du service » qu’il préfère qualifier de sanction disciplinaire. « Cette procédure a été menée très rapidement et M. Muller estime qu’elle porte une atteinte immédiate à ses intérêts. » Me Monod a rappelé que le procureur Muller était à la Réunion depuis un an et que ses rapports avec le parquet général avait dégénéré en début d’année, au point de recevoir un avertissement le 5 mai dernier, puis la dépêche du 19 juin l’informant de sa mutation, de son installation à Grenoble le 26 juin et sa prise effective de poste le 15 juillet. « Il est en arrêt-maladie, a rappelé son défenseur. Il ne peut être à Grenoble à la mi-juillet et ne peut avancer les 10 000 euros de son déménagement… » Avec cette « mutation d’office », Me Monod estime que son client a été affecté dans une « grande brutalité qui porte atteinte à son crédit à s’apparentant à une sanction disciplinaire ». Selon la défense, ou la chancellerie prononçait une sanction exemplaire ou elle l’affectait à la rentrée de septembre à Grenoble ou Montpellier comme il avait été envisagé.

Jean-François Beynel a expliqué la position de la chancellerie en rappelant que « les mouvements de magistrats se font souvent de cette manière » et que 350 magistrats ont les mêmes délais que le procureur Muller. Jean-François Beynel a reçu Philippe Muller le 7 mai dernier à Paris, puis il lui a écrit et annoncé que ce projet se ferait rapidement. A l’audience, il a précisé que le décret du 18 juin ne mettait pas fin à ses fonctions de procureur de la République, mais que c’était son installation dans son nouveau poste qui y mettait fin. « Cela a donc eu lieu le 26 juin et M. Muller a disposé d’un délai de deux mois. Sa femme ne travaille pas, son fils est âgé de 2 ans, nous sommes en période estivale, il n’y a donc pas de difficulté. M. Muller n’a jamais pris attache avec le procureur général de Grenoble pour lui demander un mois de délai supplémentaire alors qu’il nous explique ici qu’il a des difficultés pour son transport et son déménagement… Le procureur général de Grenoble l’attend à l’issue de son congé-maladie et il attend un contact de sa part. » Jean-François Beynel a ensuite expliqué que la nomination de son successeur était en cours et pendante devant le Conseil supérieur de la magistrature pour une installation en septembre.

Me Monod est revenu sur le contexte : « Voilà un procureur de la République qui arrivait de Dunkerque dans un parquet qu’il convenait de réorganiser. Il a pris en main le parquet de Saint-Denis et il s’est heurté à des habitudes constituées ; il a essayé de redresser les choses. Le procureur général et lui ne s’entendait pas très bien ; leurs relations se sont dégradées et la rentrée solennelle en début d’année a été tumultueuse… Le procureur général lui a fait des demandes d’information raides et il en a conclu que M. Muller ne faisait pas son boulot. Il lui a mis un avertissement… » Cet avertissement fait lui aussi l’objet d’un recours devant le Conseil d’Etat pour « excès de pouvoir ». Pour Me Monod, cette mutation d’office dans l’intérêt du service cache une sanction disciplinaire. « La mutation, rétorque Jean-François Beynel, n’est pas une mesure disciplinaire, mais elle met fin à une situation complexe, brutale, de dysfonctionnement du service public. » Une telle situation a démarré, selon le directeur des services judiciaires, en juillet 2013, avec la saisine par les organisations syndicales de la commission d’hygiène et de sécurité des contions de travail et l’alerte lancée par des médecins sur la situation de danger des collaborateurs de Philippe Muller. En résumé, la chancellerie a retenu l’avertissement à cause de l’audience solennelle de rentrée, les manquements professionnels (« Il ne rend pas compte. ») et les problèmes d’ambiance de travail (« Ni les gendarmes, ni le préfet ne voulaient travailler avec lui. »). Ajouté à cela, un comité de soutien au procureur… « Un retentissement qui porte atteinte au service public. M. Muller y contribue en rencontrant ses membres. » Pour contre-attaquer, Me Monod a voulu lier l’avertissement  et la mutation. « Le seul objet de cet avertissement était de ramener le calme au parquet de Saint-Denis », soutient la chancellerie. C’est alors que Me Monod a évoqué la perquisition de son domicile et de son bureau et l’examen de ses ordinateurs, « à cause d’un corbeau qui a dénoncé le procureur général… L’affaire n’est pas close et le départ d’un des protagonistes pose problème. » « Il y a bien, a repris Jean-François Beynel, une procédure pénale en cours et je suis étonné que ce soit M. Muller qui en parle. » Après une petite heure de débat, le président Arrighi de Casanova a annoncé une décision aujourd'hui ou demain.

FXG, à Paris

La conseil d'Etat a mis 24 heures pour rejeter la requête

Le président Arrighi de Casanova a rejeté le recours en référé de l’ex-procureur de la République de Saint-Denis, Philippe Muller. Ce dernier demandait la suspension de l’exécution du décret du 19 juin 2014 du président de la République, le nommant « dans l’intérêt du service », avocat général près la cour d’appel de Grenoble. Il demandait aussi pour ses frais de justice de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros. Philippe Muller a soutenu que « l’exécution du décret portait atteinte de manière grave et immédiate à sa situation familiale ». Il contestait la légalité du décret, estimant que la composition du Conseil supérieur de la magistrature, qui avait rendu son avis sur cette mutation, « ne présentait pas toutes les garanties d’impartialité requises ». Mais surtout, il arguait que « sa mutation d’office dans l’intérêt du service était constitutive d’une sanction disciplinaire déguisée et, par suite, un détournement de procédure ». L’affaire a été examinée mardi et le juge des référés a rendu son ordonnance hier après-midi.

Dans la lettre adressée le 7 mai dernier à M. Muller par le directeur des services judiciaires, ce dernier indique que « la mutation contestée est intervenue en raison de la dégradation du climat social qui a suivi son arrivée, l’année précédente, à la tête du parquet de Saint-Denis » et que « la persistance de cette situation a porté atteinte au fonctionnement serein de la juridiction et à l’image de l’institution judiciaire dans la mesure où la presse locale en a fait état ». Par ailleurs, si le procureur général a infligé à Philippe Muller un avertissement le 5 mai 2014, le juge estime que « la mutation de M. Muller n’a pas de caractère disciplinaire ». Balayant tous les arguments de la défense de M. Muller quant au respect des formes, le juge des référés estime qu’au vu des éléments qui lui sont soumis, il n’apparaît pas que « l’avis du Conseil supérieur de la magistrature aurait été rendu au vu d’informations incomplètes ou en méconnaissance du principe d’impartialité ». Il ajoute : « Aucun des moyens invoqués par M. Muller ne paraît propre à faire naître un doute sérieux quant à la légalité du décret… » En foi de quoi, le juge conclut son ordonnance par le rejet de la requête de Philippe Muller.

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