Le théâtre école Kokolampoe de Saint-Laurent-du-Maroni en Hexagone
Les élèves théatreux de Guyane dans l'Hexagone
« On a eu l’occasion de visiter l’Ecole nationale supérieure des arts et techniques du théâtre (ESNATT) à Lyon et on a vu leur spectacle de fin d’année. » Sander Anakaba, élève technicien, était visiblement heureux de sa semaine passée avec ses camarades du théâtre école Kokolampoe de Saint-Laurent dans l’Hexagone. 17 des 19 élèves de cette première promotion de formation aux métiers du spectacle vivant sont allés s’immerger à la Fabrique, un théâtre près de Rouen (Seine-Maritime), accueillis par la Cie Ephémèride de Patrick Verschueren, le professeur d’art dramatique venu leur dispenser auparavant à Saint-Laurent son enseignement. Ils ont pu présenter avec succès deux spectacles de la compagnie KS and Co, Koudip et Kaidara. « On a bien bossé, on a joué et tous les spectateurs nous ont vraiment applaudis », témoigne Mario Kwadjani, élève comédien qui incarne Kaidara. « Certains des professeurs, metteurs en scène, ajoute Ewlyne Guillaume, directrice de KS and Co, ont estimé que c’est un travail qui doit être vu et nous avons décidé, l’année prochaine, de travailler sur une diffusion plus large de ces spectacles. Quand on crée un spectacle, on le fait pas pour son village mais pour qu’il soit vu par le monde. » Belisong Kwadjani, élève comédien, fait un premier bilan positif : « J’ai appris beaucoup de chose comme la comedia dell’arte, le travail sur la voix… Et pour être un bon comédien, il faut suivre des cours ! » Même chose pour Mario Kwadjani (photo) même s’il tempère : « Je voulais être metteur en scène mais on n’a pas encore l’école de mise en scène ! »
Spectacle et évaluation le 30 juin
Mardi, élèves et formateurs étaient à Bagnolet au Centre de formation professionnel des techniques du spectacle où les élèves techniciens ont retrouvé leur enseignant en électrotechnique, Marc Simoni qui leur a fait une présentation des ateliers. « L’idée de notre partenariat, explique Ewlyne Guillaume, est d’autonomiser les élèves. Ca veut dire qu’ils soient capables à l’issue de leur formation de fonder leur compagnie, s’ils le désirent en Guyane, mais surtout de pouvoir travailler avec leurs homologues français, canadiens ou américains qu’il s’agisse de cinéma ou de théâtre. » Ce premier voyage d’études s’est achevé hier mais le travail est loin d’être terminé puisque les élèves comédiens seront évalués lors de la présentation de leur spectacle de fin d’année le 30 juin tandis que les élèves techniciens vont subir une semaine d’examens avec, bien sûr, la mise en lumière du spectacle des élèves comédiens. Et puis, se profile déjà la rentrée de la deuxième promotion du TEK qui s’annonce, selon Ewlyne Guillaume, déjà prometteuse : « Nous sommes allés au lycée Bertème-Juminer pour faire des appels d’offres et déjà des élèves du lycée sont partants pour l’aventure. »
FXG (agence de presse GHM)
Le TEK de Saint-Laurent
La Cie KS And CO, en partenariat avec la Région Guyane, le FSE, la Ville de Saint Laurent du Maroni à ouvert au mois de janvier une école de théâtre (Theatre Ecole Kokolampoe) adossée à ses activités. Deux cursus existent: les techniques du spectacle et l'art dramatique. Les enseignants proviennent de l'ENSATT et du CFPTS, deux établissements d'enseignement supérieur liés par une convention pluriannuelle. Les cours sont dispensés à raison de trente heures par semaine, d'octobre à juin et chaque année est validée par un examen. Afin de parfaire leur culture générale et d'accroître leurs compétences, les élèves, au nombre 20, font chaque année un voyage au cours duquel, ils sont plongés en immersion dans des établissements ou bien visitent des lieux en rapport avec la pédagogie mise en œuvre.
Interview
Patrick Ferrier, directeur du centre de formation professionnelle des techniques du spectacle de Bagnolet (région parisienne)
« On peut devenir des professionnels du spectacle sans avoir un bac + 10 »
A travers le théâtre école Kokolampoe, le CFPTS est présent en Guyane. Comment est né ce mariage ?
C’est la compagnie KS and Co qui a projeté d’intégrer des jeunes pour aborder d’un côté le métier d’artiste interprète et de l’autre les métiers de la technique. KS and Co s’est rapproché de l’ENSATT de Lyon et de nous, à Bagnolet, pour former les techniciens.
Vous envoyez vos formateurs en Guyane ?
Ils s’y rendent pour animer des sessions qui sont préétablies de manière pédagogique. C’est un parcours sur trois ans qui va nous permettre d’atteindre des objectifs pédagogiques importants, c’est-à-dire qu’ils deviennent des professionnels. On n’est pas là pour faire du social ! Au bout de trois ans, on doit leur donner un diplôme pour qu’ils soient reconnus professionnellement et qu’ils puissent porter notre école sur leur CV…
Comment trouvez-vous cette première promotion ?
Ils sont formidables ! L’expérience est remarquable et elle va nous enrichir parce qu’ici, en métropole, nous avons des professionnels qui ont de la culture générale, qui savent lire et écrire, et là, nos formateurs sont confrontés à des gens qui découvrent nos métiers et il y a une pédagogie différente, adaptée et qui nous posent des questions au CNPTS sur l’insertion de jeunes en difficultés scolaires. On voit, avec ces élèves guyanais, qu’ils peuvent facilement intégrer nos écoles supérieures parce qu’il y a des savoir faire et des potentialités évidentes pour devenir des professionnels des techniques du spectacle sans avoir un bac + 10 !
Ne faudrait-il pas qu’ils puissent passer plus de temps en immersion avec vous ?
« C’est prévu de les faire venir ici plus longuement car on ne veut pas s’arrêter à la seule manipulation du matériel dont ils disposent à Saint-Laurent. C’est trop réducteur par rapport au métier. Si on ne les confronte pas aux nouvelles technologies, ils ne seront pas des professionnels. Comme l’objectif est qu’ils le soient, il faudra absolument qu’ils viennent faire des stages avec nos formateurs et notre matériel haut de gamme.
Propos recueillis par FXG