Lurel et la FEDOM
La FEDOM dit sa manière de penser au ministre des Outre-mer
Le ministre a énervé les patrons à la Réunion avant de passer trois heures avec une délégation de la Fedom pour faire un tour approfondi des questions.
Après le déplacement de Victorin Lurel à la Réunion, le week-end dernier (sa deuxième visite ministérielle en outre-mer après la Guyane), ses propos concernant la vie chère ont quelque peu troublé les acteurs économiques ultramarins. Alors comme le ministre l’avait indiqué, il a rencontré une délégation de la Fédération des entreprises d’outre-mer (FEDOM), mardi soir. L’entretien qui a duré près de trois heures a mis face au ministre, le président de la FEDOM, Jean-Pierre Philibert et quatre représentants des DOM, Franck Desalme pour les MPI Guadeloupe, Philippe Jock du Medef Martinique, Xavier Thieblin du Medef Réunion et M. Filleul du Medef Guyane. Cet entretien, inhabituellement long a été qualifié par le président Philibert de « franc et cordial », c’est-à-dire qu’il a commencé par une réplique des patrons aux propos du ministre ç la Réunion, « mal ressenti par les milieux économiques ». Ce à quoi Victorin Lurel a répondu qu’il n’avait pas voulu stigmatiser les acteurs, mais plutôt des secteurs où il y aurait des abus de position dominante… Car c’est bien au sujet de la vie chère qu’il existe une pierre d’achoppement au niveau de la méthode et du contenu de la loi en préparation ou d’un éventuel décret. Le ministre a déjà rassuré les patrons en affirmant qu’il n’était pas question d’un retour de l’économie administrée. La Fedom n’est pas opposée aux injonctions structurelles relatives aux abus de position dominante à condition qu’une différence soit faite entre des rentes de situation dues à des monopoles historiques et des positions dominantes dues à la seule performance entreprenariale. « La seule position dominante n’est pas caractéristique d’un abus », a souligné M. Philibert.
« Rien ne se fera sans les entreprises »
La Fedom a fait part au ministre de ses doutes quant à la formule employée par le sénateur martiniquais Maurice Antiste. Ce dernier a parlé lors de l’audition du ministre de « tropicalisation du droit » : « Si le droit de la concurrence était spécifique en outre-mer, ce serait une rupture du principe d’égalité mais si le ministère veut renforcer la lutte contre les abus et la non transparence, le patronat n’y est pas opposé. » Victorin Lurel est prévenu : s’il veut tirer des conclusions par rapport aux situations dominantes non abusives, ça serait un mauvais coup porté aux économies d’outre-mer. Par ailleurs, la Fedom a mis en doute les chiffres de 30 à 70 % d’écart de prix entre l’Hexagone et les outre-mer. « Il y a un problème, oui, a concédé M. Philibert, mais il faut raison garder. Il ne faut pas généraliser les abus ni stigmatiser les patrons. » Le projet de loi du ministre n’est pas bouclé et celui-ci a assuré le patronat qu’il tiendrait compte de son point de vue. Victorin Lurel a donné le sentiment qu’il avait compris que rien ne se ferait sans les entreprises.
Le nouveau ministre avait laissé au patronat le souvenir d’un homme responsable en 2009 lors du mouvement social en outre-mer. Il s’est en outre montré plutôt satisfait de la vive réaction du patronat. De son côté, Jean-Pierre Philibert a fait part d’un certain optimisme en rappelant que le ministre disposait de vrais soutiens avec Marc Vizy à l’Elysée, Jean-Marc Falcone et Stéphane Grauvogel à Matignon et cinq députés ultramarins à la commission des finances. Et puis, en dehors de toute considération politique, il a lâché : « J’aime bien Lurel. »
FXG (agence de presse GHM)
Conférence éco, défisc et rénovation hôtelière
La troisième heure de l’entretien a été consacrée à la conférence économique qui devrait se tenir à la rentrée en même temps que la conférence sociale outre-mer. La Fedom entend déconnecter les deux : « Même s’il doit être question de formation et d’emploi, il s’agira surtout de compétitivité et de financement des entreprises. » La défiscalisation et les exonérations de charges ont été évoquées en même temps que la préparation de la loi de finances 2013 et de la loi de finances rectificative. Victorin Lurel a assuré que la défiscalisation serait maintenue y compris dans le social, mixé de subventions. Quant aux zones franches, certains critères devraient être précisés : « Sur le plan para-touristique, notamment à la Réunion, les activités sportives de Canyoning, de VTT sont exclues du bénéfice des zones franches touristiques. » De même, dans la mesure où le gouvernement entend rapatrier les services de hot line et les call centers, le concept de la zone franche pourrait leur être appliqué en outre-mer.
Victorin Lurel a encore réaffirmé que la défiscalisation des investissements productifs et sociale sera maintenue et leur plafond bien déconnecté du plafond dans l’Hexagone même si le plafond en outre-mer pourrait être ramené à la baisse. « Ca se discute, concède M. Philibert. Actuellement, le plafond de 18 000 € + 4 % des revenus pourrait passer à 16 000 + 4 %. C’est acceptable dans la mesure où l’on ne touche pas aux 4 %. »
Sur les accords salariaux dits COSPAR ou Bino qui doivent arriver à terme en 2013, tous ont plaidé pour une sortie intelligente du système. Victorin Lurel fera des propositions. Il a encore été question des problèmes d’agrément de défiscalisation sur des projets pluriannuels par Bercy, de l’arrêté tarifaire du photovoltaïque (faut-il l’intégrer au bâti ou le surimposer ?) ou encore de la circulaire sur la rénovation hôtelière qui ne fonctionne pas : sur 12 M€ seuls 1.5 ont été consommés. Non seulement, les entreprises doivent être à jour de leur cotisation, mais surtout, elles doivent avancer la trésorerie… La circulaire devrait là aussi être revue.