Pêche et chlordécone en Guadeloupe
Les autorités au secours des pêcheurs guadeloupéens
Après les restrictions de zone de pêche imposées par le préfet en raison de la pollution due à la chlordécone, une réunion de travail s’est tenue hier matin au ministère des Outre-mer. L’avant-veille déjà, une délégation de la profession des marins pêcheurs martiniquais avaient acté une aide d’urgence de 3,5 millions d’euros. En Guadeloupe, seule la côte entre Goyave et Trois-Rivières est concernée ; toute la profession n’est donc pas touchée contrairement à la Martinique. Jean-Claude Yoyotte, président du comité régional des pêches et son secrétaire général, Nicolas Diaz, le préfet Amaury de Saint-Quentin, Jacques Gillot, sénateur et président du Conseil général, Richard Nébor, président de la commission agriculture pêche et développement rural à la Région , Dominique Laban, directeur de cabinet de Josette Borel-Lincertin, les deux sénateurs Jacques Cornano et Félix Desplan, et les collaborateurs d’Ary Chalus et Gabrielle Louis-Carabin ont été reçus par Victorin Lurel et le conseiller pêche et aquaculture du ministre de la mer et de la pêche pendant un peu plus d’une heure et demie. « Nous avons décidé de nous inspirer de ce qui s’est passé pour la Martinique pour venir en aide aux marins pêcheurs de la Guadeloupe », a confié Richard Nébor à la sortie. Aucune somme n’a été fixée puisque le nombre de pêcheurs concernés n’est pas encore déterminé mais les fonds seront abondés par l’Etat, la Région et le Département. Toutefois, M. Nébor n’a pas hésité à parler, en ce qui concerne la Région, d’un montant qui pourrait aller aux alentours de 500 000 €. « Nous allons participer comme la Région, a indiqué Jacques Gillot. Si c’est une somme de 500 000 €, pourquoi pas mais il faut d’abord savoir combien de pêcheurs et de matelots sont à indemniser. » Le département devrait concentrer son aide sur les salariés même s’il entend participer aussi à la restructuration de la filière. L’Etat verserait des aides de minimis de 30 000 € pour trois ans par entreprise. Cette aide serait être distribuée au plus tard avant la fin du premier trimestre. Mais au-delà de l’aide d’urgence, la discussion a porté sur la restructuration de la filière pêche en Guadeloupe. Il a donc été question de reconversion vers l’aquaculture pour laquelle la Région a déjà pris ses marques, de structuration de la filière qui seule permettra à nos pêcheurs de bénéficier des aides européennes.
L’Etat devrait par ailleurs renforcer la lutte contre la pêche clandestine pour protéger les revenus des pêcheurs. Dès la semaine prochaine, le préfet pourrait organiser les premières réunions pour établir la liste des professionnels bénéficiaires de ces aides d’urgence.
FXG, à Paris
Trois questions à Jean-Claude Yoyotte, président du comité régional des pêches
« Chaque fois que l’eau de la montagne descend, c’est la mer qui se pollue »
Que retenez-vous de cet échange ?
Les réponses que nous avons eues sont à même de pouvoir désamorcer l’explosion qui se préparait du côté des pêcheurs. Il y aura des aides d’urgence pour les pêcheurs impactés et, à moyen terme, il y aura des aides qui permettront la restructuration de la filière pêche parce qu’il va falloir prendre en compte les effets collatéraux de cette crise. On ne sait pas combien de personnes ont concernés, mais ceux qui le seront sont des chefs d’entreprise et leurs salariés car il n’y a pas de navires sans les matelots. L’étude d’impact socio-économique qui aurait du avoir été commencée doit démarrer immédiatement de façon à ce que nous puissions quantifier les besoins et les possibilités de chaque entreprise. Le chlordécone est installé pour des siècles et c’est pourquoi nous avons demandé qu’il y ait des fonds alimentés de manière à prévoir dans le futur de nouvelles zones à nouveau impactées et d’autres professionnels touchés puisque chaque fois que l’eau de la montagne descend, c’est la mer qui se pollue…
Comment va s’opérer la restructuration de la filière ?
Elle doit toucher l’ensemble de la filière avec la remise sur pied de la coopérative et la mise en place du comité technique industriel. Nous y réfléchissons si tant est qu’on nous donne les moyens de mettre cette politique en œuvre par le biais du comité régional des pêches. Nous aurons accès aux POSEI si nous présentons une filière organisée. Ces financements ne sont, hélas, pas dans les tiroirs compte tenu de la crise. Certains ont déjà touché une partie des aides de minimis* en 2010 et il y a une possibilité supplémentaire. Mais ceux qui en ont bénéficié (entre 2 et 10 000 €) n’ont eu ni reconversion, ni accompagnement. L’aide d’urgence, oui, mais si on ne va pas vers un redéploiement de la profession sur de nouvelles activités, dans quelques mois on sera encore au point de départ.
Quelles sont ces nouvelles activités ?
Ce peut être des sorties de flotte, une réorientation vers la pêche hauturière ou, pour ceux qui ont des terrains, une reconversion vers l’écotourisme et les gîtes d’accueil. Ils auront tous besoin de plans de financement. Nous sommes donc partis pour quelques bonnes séances de travail encore.
Propos recueillis par FXG
* Aide d’Etat selon le jargon de Bruxelles