Talents des cités 2011
Des Ultramarins d’ici et là-bas à Talents des cités
Ils ont moins de 40 ans, sont installés dans un quartier prioritaire au titre de la politique de la ville, sont créateurs d’activité et se sont inscrits dans la catégorie création ou émergence, avant d’être sélectionnés par un jury régional et enfin national. 9 lauréats nationaux et 37 régionaux ont été récompensés, samedi au Sénat. 1 500 euros dans la catégorie émergence et de 3 000 euros dans la catégorie création. Talents des cités est la seule manifestation à se tenir dans l’hémicycle du Sénat et c’est formidable de voir les gens de banlieues, de quartiers, des cités dans les fauteuils de velours rouge de nos sénateurs.
Samedi, il y avait des jeunes venus de Guyane, comme Sarita Briquet, 30 ans, dans la catégorie émergence. Elle propose un projet de création d’une entreprise en ingénierie informatique, BSI Guyane, capable de répondre à la demande de ses clients et de les accompagner. Dans la catégorie création, il y avait Thomas Bebronne, 27 ans, de Kourou. Un jeune du quartier Vieux-Bourg qui a réalisé son rêve de monter sa boite de location et livraison de machines et consommables pour travaux et chantiers, TLM. Une activité qu’il a lancée en décembre 2010. Ce jeune Guyanais est très content qu’on reconnaisse que son projet est valable et porteur d’emplois.
La Martiniquaise (ses parents sont de Sainte-Marie), Dolorès Joseph-Mathieu, d’Epinay sur Seine (93), s’est lancée dans une marque de prêt à porter, Sportwear et streetwear en matières bio et recyclées. Son entreprise, Pique Cœur doit voir le jour à l’automne 2012.
La Guadeloupéenne du quartier Chauffour, aux Abymes, Audrey Jason, 27 ans, (absente) concourait dans la catégorie émergence. Elle a décidé de créer son entreprise, Little English, un service itinérant. Elle apprend l’anglais aux enfants en se déplaçant dans les différentes structures, crèches, garderies, centres de loisirs du département.
Dans la catégorie création, Peggy Caperet, 39 ans, d’origine mornalienne (Guadeloupe), a implanté son entreprise, Psychologie et culture, à Paris, dans le quartier de la Chapelle. Elle est une spécialiste dans l’accompagnement d’expatriés et de migrants, des personnes qui rencontrent des difficultés psychologiques et sociales d’adaptation. Elle propose aussi une formation interculturelle pour les professionnels du social.
Alfred Jocksan (agence de presse GHM)
Jean-Pierre Bel, président du Sénat : « Grace à Talents des cités, le Sénat est encore plus ouvert sur toutes les initiatives de notre société qui récompensent tous les créateurs d’entreprise et les responsables d’association qui, au quotidien, œuvrent pour leur quartier. Je rêve de restaurer le Sénat dans son rôle de représentant des territoires. Vous portez l’espoir et l’avenir de la France avec vos talents. La diversité est une véritable richesse pour tout le pays. Moi, je crois vraiment en tout ces talents qui sont une chance pour notre pays. »
Claude Bartolone, président du conseil général de la Seine Saint-Denis et fondateur de l’opération : « Chaque fois qu’on montre des images difficiles des quartiers, c’et autant de difficultés pour les CV, pour les parcours scolaires, pour l’accès aux lieux culturels, au logement et à tous les espaces de la ville. Parce que la déclaration de droit de l’Homme et du citoyen de 1789 prévoit dans son article 6 que la seule différence sociale qui pourrait être accepté, c’est celle qui se fait sur le talent et la vertu, pas sur la couleur de peau, pas sur la religion. »
Peggy Caperet (Morne-à-l’Eau, Guadeloupe) : « Quand on arrive dans un nouveau pays, il faut comprendre son environnement pour pouvoir s’adapter, s’incérer professionnellement, socialement, être bien dans sa peau dans sa tête. Ce sont toutes ces choses qui m’ont fait créer Psychologie et culture. Je travaille avec des associations du 18e arrondissement. Je reçois des personnes orientées par l’Education nationale, des enfants, des familles… Des ONG m’adressent aussi certains de leurs professionnels qui sont en difficultés. Je fais aussi un travail de formation auprès des centres sociaux. Cette récompense est une reconnaissance importante et je suis fière de pouvoir parler de mon activité et d’être reçue dans ce lieu du pouvoir et de savoir. Une petite jeune fille de banlieue peut, sans avoir toute les connaissances à la base, monter et avancer dans un beau parcours. »
Laurence Lascary, originaire de Sainte-Rose,, promotion 2009 des Talents des cités, et productrice audiovisuelle (De l’autre coté du périph)
« J’ai des nouveaux associés qui sont rentrés au capital. J’ai des séries qui sont diffusées sur les chaines de Public sénat et France télévisions. Maintenant, on prépare un premier long métrage qui est adapté d’un livre, Un tocard sur le toit du monde, qui raconte l’histoire de Nadir Nandoune, journaliste en Seine Saint-Denis, parti gravir l’ Everest alors qu’il ne connaît rien à l’alpinisme. C’est une histoire vraie. Le prix Talents des cités est un accélérateur de notoriété. Il m’a permis de faire connaitre mon projet, ma société de production, ma vision, mais aussi de travailler en réseau et de rencontrer beaucoup de personnes. C’est très positif. C’est à nous les lauréats de transformer cette distinction. »
3 questions la Guyanaise Sarita Briquet, titulaire d’un diplôme de technicien supérieur en maintenance informatique et réseaux.
" J’ai foncé tête baissée "
Qu’est ce qui vous a poussé à créer votre entreprise ?
Premièrement le chômage. Et j’ai pu constater qu’il y avait à Cayenne, un manque d’assistance concrète en informatique pour les TPE et PME. Cela m’a encore plus poussé. Vu, que c’était mon métier à la base. J’ai foncé tête baissée.
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?
Il y a eu des difficultés parce qu’il faut prospecter, expliquer le pourquoi, le comment, de A jusqu’à Z. Les gens ont l’habitude d’avoir une maintenance informatique et moi je leur propose de l’infogérance. Je leur demande de confier toute leur informatique à une personne qui s’occupe de tout et qui est là pour les assister, les guider, les conseiller pour leur outil de travail au quotidien.
C’est important pour vous d’être reçue dans l’hémicycle ?
C’est une reconnaissance et ça motive, ça donne du baume au cœur. Ça m’a permis de rencontrer du monde. C’est un échange qui est super sympathique. Je pousse tous les jeunes qui ont des projets à foncer et à participer au concours Talents des Cités. En tant que Guyanaise, je peux dire que ce n’est pas si simple que ça d’arriver ici, à la remise des prix. Quand nous venons des DOM, on est un peu exclu du cercle qui existe au niveau de l’Hexagone. Vu la distance, certaines rencontres programmées se font sans nous. Ce qui est dommageable.
Propos recueillis par Alfred Jocksan