Transat Bénodet Fort-de-France- ITW Eric Baray
Interview Eric Baray, skipper de Van dan vwel 972, voile n°30
« Je connais ma détermination sur l’eau »
Dans quel état vous trouvez-vous à la veille du départ ?
Ce qui est fabuleux, c’est toute cette attente… Parce que des projets marins, on a eus : l’AG2R, le Rhum et là, changement de situation, de personne, c’est une année faste et les choses tombent enfin. En Martinique, l’association Van dan vwel fait monter la mayonnaise pour faire connaître mieux le monde la voile. Je trouve ça fabuleux !
La Martinique est au cœur de votre projet…
La Martinique est déjà à bord du bateau au point que je me demande si je vais bien faire une transat en solitaire… Je navigue pour les jeunes, pour faire partager ma passion de la mer et de la voile. Dans deux ans, il y aura au départ un jeune que j’ai formé, Emeric. Même si je me battrai contre lui !
Ressentez-vous de la pression ?
Pression ? Non, y en a pas ! Je me refuse à la recevoir. Je suis cool, mais je connais ma détermination sur l’eau. Gildas Morvan (tenant du titre, NDLR) contre qui j’ai navigué en Martinique, connaît mon engagement. Et Quand ces choses arrivent, tu sors tout, même ce que tu n’as pas !
C’est pourtant votre première transat en solo…
C’est la 3e et la 1ère en solo. Je sais déjà ce que ça me fait personnellement. Quand on est en mer, on ne veut pas que ça se termine. C’est la fin qui me dérange ! Quand on voit des dauphins, qui a envie que ça s’arrête ? Personne. Même les moments dantesques, les moments durs, on les aime.
Ca vous apporte quelque chose de particulier la mer ?
A terre, on voit des gens qui la pète ; qu’ils viennent en mer, ils découvriront ce qu’est l’humilité.
Comment imaginez-vous traversée ?
A donf ! Je serai tranquille, je sais bien me parler à moi-même. A terre, j’aime échanger mais en mer, j’aime les deux ou trois premiers jours quand tu te mets en osmose avec le bateau et les éléments. C’est alors qu’on redevient nature. Et puis, les trois derniers jours à la barre ! Sans dormir et, à fond, si je suis pas trop mal placé ! Après avoir mis les bouchées doubles, tu casses les freins et tu avales la clé !
Est-ce que vous savez quelle stratégie vous allez avoir ?
On va attendre avec Marc Emig de voir la météo, puisque depuis le début de la semaine on regarde comment elle évolue. On fera encore un point aujourd’hui (samedi)…
Il semble que l’anticyclone des Açores soit bien établi et que vous serez pas mal au portant. Ca ne devrait pas changer fondamentalement d’ici dimanche…
Normalement, ça ne devrait pas mais on préfère vérifier que tout soit établi avant et ensuite construire quelque chose. On a jusqu’à dimanche matin pour le faire parce qu’après on sera en mer et alors là, c’est parti… On aura de toute façon un choix de route au départ, mais tout ça sera fait au dernier moment.
Concernant la vie à bord, question nourriture, qu’emportez-vous ?
Ce sera en grande partie du lyophilisé, des fruits secs, du frais aussi puisqu’on fait des courses aujourd’hui. Ce sera des fruits et des choses qui ne pourrissent pas au moins la première semaine. Et puis des barres au chocolat énergisantes pour les coups de tabac.
Pas question de lancer une ligne pour attraper une daurade…
Ce n’est pas prévu au programme !
Et concernant les toilettes ?
Très simple. C’est quand même pas mal grand autour ; on n’a pas besoin de tirer la chasse. Et pour le reste, il y a les seaux, les petits sachets et les petites lingettes pour bébé.
Comment allez-vous dormir ? Je n’ai pas vu de bannette à bord…
J’ai un pouf à bille. C’est plus simple que de s’installer une bannette. On rentre et on s’affale. On est bien plus reposé quand on dort recroquevillé. Pourquoi s’allonger ? Vous devriez essayer les billes, c’est sympa !
Emmenez-vous de la musique ?
Oui, il y aura du son. En cas de forte mer, j’ai du classique. C’est calme, ça permet de repositionner les choses. Et puis si c’est du spi et que ça envoie, j’ai du hard rock, du reggae…
Avez-vous une idée de ce qui vous attend à l’arrivée ?
Non. Je subodore mais j’ai l’impression que je suis un peu loin de la réalité… Si mon arrivée fait qu’on a autant de monde qu’on l’imagine (je sais que mes copains de la yole seront là), ça veut dire que le rêve qu’on avait de voir les gens se tourner vers la mer aura au moins été enclenché.
Vous dîtes vouloir y aller à donf, mais vous avez presque une obligation morale d’arriver…
Quand on dit à donf, ça veut dire que ce soit la gestion du sommeil, la marche du bateau, l’idée est de trouver la bonne limite et non pas de rester sur la corde raide en permanence au risque de la casse.
Que vous reste-t-il à faire ?
Compartimenter tous les repas, préparer les sacs de fringues pour le beau temps, pour la pluie, etc… Et puis travailler sur la navigation, revoir tous les systèmes électroniques, vérifier que tous les paramètres sont bien rentrés dans le caisson.
C’est quoi un bon départ ?
C’est partir au top, dégagé de tout, en direction de la route la plus courte vers la première marque et y arriver devant. Il faut être un peu tête brûlée, savoir mettre un petit coup de boule là où il faut. C’est un jeu de coq !
Propos recueillis par FXG (agence de presse GHM)