Tribune de Patrick Karam
Présidence de l’UMP : séisme politique annoncée
Patrick Karam, Conseiller régional d'Ile-de-France, Ancien délégué interministériel pour l'égalité des chances des Français d'outre-mer, Ancien responsable de campagne de Nicolas Sarkozy pour la diversité, avait pris fortement position pour, François Fillon dans la campagne pour la désignation du président de l'UMP. Après la victoire de Jean-François copé, il signe ici une tribune pessimiste pour le parti qui l'a fait élire au conseil régional d'Ile de France en 2010.
"La droite républicaine se réveille avec la gueule de bois. L’élection du président de l’UMP qui devait être un grand moment démocratique et renforcer l’UMP tourne à la farce et annonce un séisme politique qui fait les affaires de l’extrême-droite et des socialistes.
Il s'agit pour M. Copé d'une victoire à la Pyrrhus qui signe un triple échec : celui de M. Copé lui-même, celui de l’UMP et enfin celui de la droite républicaine.
M. Copé tout d’abord. Voici donc un chef de guerre auto-proclamé qui malgré trois ans à la tête d'une UMP pourtant légitimiste qui a tendance à reconduire ses dirigeants, malgré tous les moyens d'un parti utilisés pour sa campagne, n’arrive pas à s’imposer nettement et clive même au sein de sa propre famille politique. Sa légitimité incertaine l’empêchera-t-il d’engager son parti dans une direction refusée par la moitié des adhérents et la l'immense majorité des sympathisants. Il est permis d’en douter au regard de son discours et de son comportement le soir de l’élection.
L’UMP ensuite, tant le divorce aujourd’hui est net entre les militants UMP et les sympathisants de la droite qui avaient clairement et massivement marqué leur préférence. Le choix des militants interroge la cohésion de la droite et son existence même sous la forme d'un parti hégémonique unique. Il va entrainer une hémorragie des sympathisants centristes, modérés, humanistes, ou même gaullistes révulsés par l’utilisation de la provocation comme arme politique. Les militants d’Europe Ecologie les Verts qui avaient choisi à l’élection présidentielle Eva Joly au lieu de Nicolas Hulot contre l’opinion de leurs sympathisants l’ont payé dans les urnes. Mais il s’agissait d’une élection ponctuelle et pas du choix d’une direction. Pour l’UMP, la descente aux enfers commence.
La droite républicaine enfin car avec Jean-François Copé, ce n'est pas la droite qui est décomplexée mais bien l'extrême-droite. A force de surenchères et de dérapages au moment justement où le FN tente de se normaliser, Copé a banalisé le vote frontiste. En dédiabolisant l'extrême-droite, en donnant une crédibilité à ses thèses et à ses méthodes, on efface les réticences qui jusque-là empêchaient de considérer son émanation comme un parti de gouvernement. Car après tout, plutôt que choisir un parti qui s'est trompé durablement et qui se rallie tardivement à des thèses hier vilipendées, certains électeurs de la droite traditionnelle pourraient bien préférer l'original, le parti qui n'a pas varié sur ces sujets.
Avec M. Copé, l'UMP sortira laminée, débordée sur sa droite par le Front National en embuscade et écrasée par les centres qui deviendront les seuls vrais partis offrant une alternative républicaine crédible au pouvoir en place, sous réserve de trouver un leader incontestable et une unité.
M. Copé est en cela le meilleur allié du gouvernement Hollande qui se réjouit de sa victoire ; une victoire qui pourrait bien lui permettre de se maintenir au pouvoir le plus longtemps possible.
Le dernier grand perdant de cette mascarade est Nicolas Sarkozy. Toute stratégie de reconquête aura à résoudre la difficile équation d'un parti en lambeau et discrédité, qui aura du mal à porter les aspirations présidentielles de l'ancien président."